Correspondance de Voltaire/1752/Lettre 2382

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Correspondance de Voltaire/1752
Correspondance : année 1752, Texte établi par Condorcet, GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 37 (p. 431).

2382. — À MADAME LA MARGRAVE DE BAIREUTIH[1].
À Potsdam, 5 juin (1752).

Madame, frère Voltaire qui n’en peut plus, frère Voltaire qui se meurt, interrompt l’agonie pour dire à Votre Altesse royale qu’il croit à présent M. d’Adhémar à votre service ; il me paraît qu’il sent tout son bonheur. Pour moi, je ne suis plus bon à rien, et je ne sais pas comment le roi votre frère a la bonté de me garder. On dit que Mme  la margrave d’Anspach est à Berlin. Il y a une margrave que je voudrais bien y voir revenir. J’imagine que l’honneur de lui faire ma cour me rendrait la santé. Pourquoi n’y viendriez-vous pas, madame ? On prétend que la peste est dans le haut Palatinat, cela n’est peut-être pas vrai : la Renommée ne va pas à Potsdam quand le roi n’y est pas.

On y est séquestré du genre humain. Lui absent, tout est enterré. S’il est vrai que la peste soit dans vos quartiers. Potsdam est une vraie sauvegarde. On enverra contre elle des détachements de grands grenadiers : elle s’enfuira comme les Autrichiens.

Le marquis d’Adhémar m’écrit encore pour me dire qu’il serait déjà aux pieds de Votre Altesse royale sans une grande maladie qu’il a eue. Je me flatte que ce n’est pas la peste. Frère Voltaire se prosterne sur son grabat devant Votre Altesse et devant monseigneur.

  1. Revue française, 1er février 1866 ; tome XIII, page 220.