Correspondance de Voltaire/1756/Lettre 3152

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Correspondance de Voltaire/1756
Correspondance : année 1756GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 25).

3152. — À M.  LE PRÉSIDENT DE RUFFEY[1].
Aux Délices, près de Genève, 12 avril 1756.

En revenant, monsieur, à mon petit ermitage qu’on nomme les Délices, je reçois presque à la fois votre lettre et votre présent. M.  Tronchin, qui me faisait vivre, m’a abandonné pour aller Inoculer des princes ; vous réparez le tort que me fait son absence en daignant m’envoyer du vin de Bourgogne, qui vaudra mieux pour moi que tous ses remèdes.

Il ne me manque, monsieur, que d’avoir l’honneur de boire ce vin avec vous. J’ai aussi des vignes, mais ce sont des vignes plus hérétiques qu’à Genève : elles sont maudites de Dieu et de l’Église. Ma retraite est d’ailleurs aussi agréable qu’elle puisse l’être ; je m’y attache tous les jours, et je sens que je ne pourrai la quitter que pour venir vous remercier de vos bontés. Ce que vous me mandez de la santé de M.  de La Marche me pénètre de douleur : c’est le plus ancien ami qui me reste ; la mort m’a enlevé presque tous les autres. Je me flatte encore de le retrouver à Dijon avec vous, si ma santé me permet de faire ce voyage. Adieu, monsieur, recevez les tendres remerciements de votre très-humble et très-obéissant serviteur. V.

[2]Je suis fort en peine de M.  le maréchal de Richelieu : j’ai bien peur qu’il ne trouve des vaisseaux anglais dans son chemin avant d’arriver à Minorque ; mais s’il peut ou les devancer ou les battre, il prendra Port-Mahon, il vengera la France, et reviendra comblé de gloire. Adieu, monsieur, je vous réitère mes remerciements et les tendres sentiments avec lesquels je serai toute ma vie votre très-humble et très-obéissant serviteur. V.

  1. Éditeur, Th. Foisset.
  2. Ce post-scriptum seulement a été publié par Beuchot.