Correspondance de Voltaire/1756/Lettre 3242

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Correspondance de Voltaire/1756
Correspondance : année 1756GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 115-116).

3242. — À MADAME LA COMTESSE DE LUTZELBOURG.
Aux Délices, 6 octobre.

Si je ne me mourais pas d’un vilain rhumatisme, madame, je crois que je mourrais de joie des nouvelles que vous avez eu la bonté de m’envoyer. Mais sont-elles bien vraies ? Si vous en avez la confirmation, achevez mes plaisirs.

Vous avez bien raison de détester le style d’un polisson[1] qui veut faire le plaisant, et parler en homme de cour des princes et des femmes dont il n’a jamais vu l’antichambre. Il y a encore une raison de mépriser son livre : c’est que, d’un bout à autre, il contient un tissu de mensonges ou de contes trainés dans les rues. Il est très-bien à la Bastille, pour quelques impostures punissables ; notre chère Marie-Thérèse y est pour quelque chose[2]. Si Marie-Thérèse est victorieuse, comme je l’espère, et si je suis en vie, ce que je n’espère guère, vous pourriez bien encore revoir à l’île Jard votre ancien courtisan, qui vous sera attaché jusqu’au dernier soupir de sa vie. Mille respects à votre digne amie.

  1. La Beaumelle
  2. Dans ses Mémoires de Mme de Maintenon (livre XIII, chap. 1er), La Beaumelle dit que la cour de Vienne était soupçonnée de réparer par ses empoisonneurs les fautes de ses ministres. (B.)