Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 3896

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Correspondance de Voltaire/1759
Correspondance : année 1759GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 147).

3896. — DE M. LE COMTE DE TRESSAN.
À Commercy, ce 29 juillet 1759.

Sa Majesté polonaise, monsieur, veut que je supplée à sa vue pour répondre à la lettre charmante qu’elle vient de recevoir de vous. Ce prince m’ordonne de vous assurer de son amitié pour vous, et de sa haute estime pour vos ouvrages.

Sa Majesté confirme de nouveau l’attestation[1] qu’elle m’avait ordonné de vous envoyer au sujet de l’exacte vérité de tous les faits contenus dans votre Histoire de Charles XII. Elle apprend par vous, monsieur, avec un plaisir sensible, que le roi son gendre, en renouvelant les anciens privilèges de vos terres, vous donne une marque distinguée de sa bienveillance et de son estime. Mais je sens, monsieur, tout ce que vous perdriez si vous ne voyiez pas du moins les caractères d’une main que vous baiseriez avec tant de plaisir ; un seul mot de ce prince adoré, qui exécute sans cesse tout ce que vous aimez à célébrer dans les grands rois, sera mille fois plus précieux pour vous que tout ce que le plus fidèle de vos serviteurs et amis pourrait vous dire.


Tressan.

[2]P. S. Je vous réponds de cœur, au défaut de vue, pour vous assurer que je conserve toujours les sentiments d’une parfaite estime et amitié pour vous.

[3]P. S. Votre cœur vous fera deviner que mon cher et aimable maître vous écrit : Je vous réponds de cœur, au défaut de vue, etc. Plaignez une âme active (et celles des rois le sont si rarement) ; eheu ! plaignez-la d’être privée du bonheur de revoir ses ouvrages, de ne pouvoir plus lire, écrire, peindre, jouer des instruments, et voir votre ancienne amie, chez qui le roi vient d’écrire ce petit mot.

  1. Voyez cette pièce, tome XVI, pages 142-143.
  2. Ce P. S., de la main du roi Stanislas, était à peine lisible, ce qui explique le P. S. suivant. (B.)
  3. Ce second P. S. est de Tressan.