Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 4011
Jouissez de la santé, madame, l’année 1760 ; n’ayez point mal aux yeux, comme moi, qui ne peux vous écrire de ma main. Vivez avec votre amie[1], et avec monsieur votre fils, tant que vous pourrez ; voyez d’un œil tranquille nos énormes sottises ; mettez à la tontine, et enterrez votre classe. J’ai envoyé un gros paquet à Colini, dans lequel il y a une lettre pour monseigneur l’électeur palatin, et une autre pour le valet de chambre favori ; il devrait l’avoir reçu. Les bontés dont vous l’honorez, madame, me mettent en droit de vous prier de l’en avertir.
On dit qu’on a roué le révérend père Malagrida ; Dieu soit béni ! Vous aviez deux jésuites bien insolents, l’un à Strasbourg, l’autre à Colmar[2]. Monsieur le premier président, votre frère, ménageait ces maroufles. Ne sait-il pas qu’ils sont à présent fort au-dessous des capucins ? Je mourrais content si la paix était faite, et si je voyais les jansénistes et les molinistes écrasés les uns par les autres. Mille tendres respects.