Correspondance de Voltaire/1760/Lettre 4098

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Correspondance de Voltaire/1760
Correspondance : année 1760GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 356).
4098. — À MADAME DE FONTAINE,
à paris.
Aux Délices, 19 avril.

Partez-vous bientôt, ma chère nièce, pour votre royaume d’Hornoy, et abandonnez-vous cette ville de Paris, qui n’est bonne que pour Messieurs du parlement, les filles de joie, et l’Opéra-Comique ? Êtes-vous bien lasse de cette malheureuse inutilité dans laquelle on passe sa vie, de ces visites insipides, et du vide qu’on sent dans son âme après avoir passé sa journée à faire des riens et à entendre des sottises ? Comptez que vous aurez beaucoup plus de plaisir à gouverner votre Hornoy et à l’embellir qu’à courir après les fantômes de Paris. Tout ce que j’apprends de ce pays-là fait aimer la retraite.

Luc m’écrit toujours, mais il ne m’écrit que pour me montrer qu’il a de l’esprit, et pour me dire qu’il ne craint rien. Il prétend que nous n’aurons jamais ni honneur ni profit dans la belle guerre que nous faisons : j’ai grand’peur qu’il n’ait raison. J’embrasse tendrement M.  de Florian et monsieur votre fils, etc.