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Correspondance de Voltaire/1769/Lettre 7705

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Correspondance : année 1769GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 491-492).
7705. — À M. LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU.
8 novembre.

J’attends ces jours-ci, monseigneur, les Souvenirs de madame de Caylus. En attendant, j’ai l’honneur de vous envoyer cette nouvelle édition des Guèbres, dont on dit que la préface est curieuse. Comme vous êtes actuellement le souverain des spectacles, j’ai cru que cela pourrait vous amuser un moment dans votre royaume.

Je ne vous envoie jamais aucun des petits livrets peu orthodoxes qu’on imprime en Hollande et en Suisse. J’ai toujours pensé qu’il m’appartenait moins qu’à personne d’oser me charger de pareils ouvrages, et surtout de les envoyer par la poste. Je n’ai été que trop calomnié ; je me flatte que vous approuvez ma conduite.

Mme Denis m’a assuré que vous me conservez les bontés dont vous m’honorez depuis cinquante ans. J’ai toujours désiré de ne point mourir sans vous faire ma cour pendant quelques jours ; mais il faudra que je me réduise à consigner cette envie dans mon testament, à moins que vous n’alliez faire un tour à Bordeaux l’été prochain, et que je n’aille aux eaux de Barèges ; mais qui peut savoir où il sera et ce qu’il fera ? Mon cœur est à vous, mais la destinée n’est à personne ; elle se moque de nous tous.

Daignez agréer mon tendre respect. V.

Oserais-je vous supplier, monseigneur, d’ordonner qu’on joue à Paris les Scythes ? Je n’y ai d’autre intérêt que celui de la justice. Les comédiens ont tire dix-huit cents francs de la dernière représentation. Je ne demande que l’observation des règles. Pardonnez cette petite délicatesse[1].

  1. On a signalé, à la date du 8 novembre 1769, une lettre de Voltaire à M. Imbert, secrétaire général du lieutenant de police M. de Sartines. Dans cette lettre, datée de Genève, le vieillard se plaint de ses soixante-quinze ans et des infirmités nombreuses qui viennent l’assaillir. Je m’en vais en détail, ajoute-t-il mélancoliquement ; puis, sa philosophie railleuse reparaît, et il prend bravement son parti de ce qu’il ne peut empêcher…. Ce qu’il regrette le plus, c’est sa vue, qui se perd complètement ; et il attribue à la neige cet affaiblissement des yeux. Voyez le journal le XIXe siècle du 10 janvier 1878.