Correspondances et nouvelles 2e trim. 1830/01

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Correspondances et nouvelles 2e trim. 1830

GRANDE-BRETAGNE. — Statistique religieuse. — Les églises ou chapelles épiscopales sont, dans les vingt-deux diocèses entre lesquels est divisée l’église nationale de l’Angleterre proprement dite, au nombre de 9,983, d’après les derniers tableaux officiels. Dans les quarante comtés qui répondent aux divisions diocésaines, les églises ou chapelles appartenant aux dissidens protestans de diverses dénominations sont au nombre de 6,422. Il y a dans ces mêmes comtés 388 chapelles catholiques.

Sur les 9,983 églises nationales, il n’y en a que 62 dont le ministre soit nommé par les habitans de la paroisse. La nomination des ministres de toutes les autres appartient, soit au gouvernement, soit à l’église, c’est-à-dire aux évêques, chapitres, etc., soit aux nobles et aux propriétaires, soit aux deux universités, soit à des corporations.

Les églises dissidentes, dont le nombre est égal aux deux tiers de celui des églises épiscopales, bâtissent leurs temples, font instruire leurs ministres, choisissent et paient leurs pasteurs, soutiennent leurs écoles, et contribuent en outre à tous les frais et à toutes les dépenses qu’occasionne l’entretien de l’église nationale.

Dans le pays de Galles, les diverses églises dissidentes protestantes ont 1,100 temples ou chapelles ; l’église nationale n’en a que 825.

En Écosse, l’église nationale est presbytérienne ; les épiscopaux n’y forment qu’une très-petite minorité. En Irlande, l’immense majorité des habitans est catholique.

Le total des recettes des sociétés de missions des trois dénominations dissidentes a été, en 1829, de 90,000 liv. sterl. (environ 2,250,250 fr.).

Le total des recettes des sociétés des missions épiscopales a été, dans la même année, de 67,528 liv. sterl. (environ 1,688,200 fr.).

Les églises dissidentes, qui contribuent à toutes les dépenses de l’église nationale et qui pourvoient à tous les frais de leur propre culte, ont donc consacré, en 1829, à la propagation de l’évangile parmi les payens, 562,050 fr. de plus que les églises nationales, qui sont plus nombreuses et plus richement dotées.

Les recettes de la société qui travaille à répandre les opinions unitaires en Angleterre et à l’étranger n’ont été que de 1,250 liv. sterl. (environ 31,250 fr.).

Il résulte de ces chiffres que l’église peut fort bien exister sans être salariée par l’état, et que la religion ne périt pas quand elle n’a pas le gouvernement pour auxiliaire.


GRANDE-BRETAGNEStatistique du parlement. — L’état suivant du nombre des fonctionnaires publics rétribués, qui siègent dans le parlement britannique, donnera la mesure de son indépendance.

On compte dans la chambre haute 5 princes du sang, dont un est amiral de la flotte et général du corps de la marine, 3 sont feld-maréchaux et colonels et un autre est sans emploi. Ils reçoivent chacun un traitement de 18,000 liv. sterl. Il y a en outre 19 ducs, dont 1 feld-maréchal, 1 amiral, 5 colonels, 6 fonctionnaires publics, tous largement rétribués ; 18 marquis, dont 2 généraux, 1 amiral, 2 colonels, 5 officiers publics, tous salariés ; 104 comtes, dont 1 feld-maréchal, 6 généraux, 18 colonels, 2 capitaines, 1 amiral, 2 ministres protestans et 24 officiers publics ; 22 vicomtes, dont 4 généraux, 4 colonels, 2 amiraux, 7 officiers civils ; 164 barons, dont 10 généraux, 14 colonels, 1 capitaine, 1 cornette, 3 amiraux, 4 capitaines de marine et 24 officiers civils, tous payés par l’état.

On compte enfin dans la chambre basse 20 généraux, 49 colonels, 8 majors, 5 capitaines, 4 lieutenans, 7 amiraux, 15 capitaines de marine et environ 80 officiers civils à traitement.

W.


GRANDE-BRETAGNE Statistique électorale de l’Écosse. — La population de l’Écosse s’élevait, en 1821, à 2,135,300 habitans. Le nombre des pairs est de 86 (non compris dix titres éteints ou réunis à d’autres), lesquels élisent seize membres pris dans leur sein, pour les représenter à la chambre. Ceux-ci ne siègent point à vie, mais seulement pendant la durée du parlement.

L’Écosse envoie 45 députés à la législature, savoir : les comtés 30, et les bourgs royaux 15.

Le revenu annuel des propriétés du pays étant de 3,804,157 liv. sterl. d’Écosse, si l’on fixe à 400 liv. le cens électoral, on aura un total de 9,511 francs-tenanciers. Le nombre toutefois n’en était que de 3,065, en 1825, et de 3,240, en novembre 1828.

66 bourgs, avec une population de 613,404 habitans, nomment 15 membres du parlement ; mais, de ce nombre, 20 habitans environ par ville, ou 1320 pour les 66 bourgs, prennent part à l’élection : les 612,084 autres exercent peu ou point d’influence sur le choix des représentans.

On peut en juger par le tableau suivant :

La population générale étant de 
2,135,300 habitans.
si l’on en retranche la population des bourgs 
613,404 613,490
et les pairs 
86
il restera pour le pays 
1,511,810
qui sont représentés par 30 membres, choisis par 
3,242 francs-ten.
De sorte que la majorité de 
1,508,568 habitans.
n’est pas, à proprement parler, représentée. Elle n’a ni voix dans les élections, ni aucun contrôle sur les mandataires de la nation
D’un autre côté, si la population des bourgs 
613,404 habitans.
n’offre que 
1,320 électeurs.
il résulte que l’immense majorité de 
612,084
est privée jusqu’à un certain point des droits électoraux : d’où il appert que, sur une population de 2,135,300 habitans, il n’y en a guère que 4,562 qui prennent une part directe aux élections des membres du parlement.
B.


GRANDE-BRETAGNE Chemin de fer entre Manchester et Liverpool. — Pendant l’automne de l’année 1826, on commença la construction d’un chemin de fer destiné à unir deux grandes villes commerçantes et manufacturières de l’Angleterre, Manchester et Liverpool, entre lesquelles circule tous les jours l’énorme quantité de 1,200,000 kilog. de marchandises.

La longueur de ce chemin, ou la distance de Liverpool à Manchester, est de 33 milles anglais, plus de 13 lieues de poste. Le terrain qu’il traverse opposait les plus grandes difficultés au succès de l’entreprise, ainsi qu’on va le voir.

On pratiqua d’abord sous la ville de Liverpool deux tunnels, l’un de 2,000 mètres, l’autre de 270 mètres de longueur, et en outre on perça six montagnes assez considérables. Ces excavations furent, pour la plupart, pratiquées dans un roc très-dur, et l’on eut à enlever plus de 2 millions de mètres cubes de pierres.

Tandis que, dans plusieurs endroits, on était obligé de creuser le terrain pour conserver le niveau, il fallait en d’autres points établir des chaussées et des ponts. L’une de ces chaussées s’élève à une hauteur de 70 pieds au-dessus du sol environnant. Une autre, qui a près d’une lieue et demie de longueur, traverse des landes et marécages où l’on pouvait à peine passer à pied il y a trois ans.

On construisit vingt-cinq ponts, dont l’un a neuf arches de 50 pieds d’ouverture chacune, et un autre quatre arches de 30 pieds ; en outre, trente-six ponts à une arche de grande dimension.

Ce travail, malgré son immensité et la hardiesse de sa conception, a été terminé dans l’espace de trois ans ; il ne reste plus guère qu’à poser le fer de la route à ornières.

On évalue la dépense à la somme de 650,000 l. sterl., ou environ 60,000 l. par lieue (1,500,000 fr.). Ce prix est le plus élevé qu’on ait jamais payé pour un chemin de fer ; mais cette augmentation est due aux travaux extraordinaires de galeries, de levées, etc., et au prix excessif auquel on a été obligé d’acheter les terrains. On estime que le revenu de cette route doit s’élever annuellement à 75,000 l. sterl. (près de 1,900,000. fr.).

B…


GRANDE-BRETAGNE Concours de voitures à vapeur. — La compagnie du chemin de fer, que l’on construit entre Manchester et Liverpool, avait proposé un prix de 500 liv. st. (environ 13,000 fr.) en faveur de la meilleure voiture à vapeur qui lui serait présentée. Les principales conditions du programme étaient : 1o que les machines admises au concours ne devraient pas avoir un poids au dessus de 6,000 kilogrammes ; 2o qu’elles devraient avoir la force de traîner après elles, pendant un trajet de onze lieues, outre la provision d’eau et de combustible qui leur serait nécessaire pour cette route, un train de voitures de transport, dont le poids serait égal à trois fois celui de la machine elle-même ; 3o qu’elles devraient marcher avec une vitesse de dix milles anglais (trois lieues et demie) au moins par heure ; 4o que la pression de la vapeur dans la chaudière ne pourrait pas excéder cinquante livres par pouce carré ; 5o que la hauteur de la voiture, depuis la terre jusqu’au sommet de la cheminée ne devrait pas être de plus de quinze pieds ; 6o enfin que la machine devrait brûler sa fumée. On choisit, sur le nouveau chemin de fer de Liverpool à Manchester, un espace d’environ une lieue de longueur, dans un endroit où la route est parfaitement plane ; on disposa cette partie de la route de manière que les voitures pussent, en retournant plusieurs fois sur leurs pas, faire le trajet de onze lieues exigé par le programme.

Le 6 octobre dernier, jour fixé pour l’ouverture du concours, une foule de savans, d’ingénieurs et de curieux, arrivés de tous les points de l’Angleterre, étaient rassemblés sur la route de Liverpool pour être témoins de ces expériences intéressantes qui durèrent douze jours.

Dix concurrens s’étaient fait inscrire ; mais, soit qu’il fût arrivé quelque dérangement dans les machines, soit qu’elles ne fussent pas entièrement achevées pour l’époque fixée, cinq seulement furent en état de concourir.

La Persévérance, machine présentée par M. Burstall, et qui avait éprouvé quelques avaries dans son transport depuis Liverpool, mais qui avait été réparée depuis, fit plusieurs courses avec une vitesse d’environ cinq milles (une lieue et trois quarts) par heure.

Le 13 octobre, une seconde machine, appelée le Sans-Pareil, fut mise à l’épreuve. On trouva d’abord que le poids de cette machine excédait un peu le maximum de six mille kilogrammes déterminé par le programme. On lui imposa néanmoins l’obligation de faire la route fixée, ou onze lieues, en traînant une charge égale à trois fois son poids, c’est à-dire de plus de dix-huit mille kilogrammes. Cette voiture marcha pendant deux heures avec une grande régularité ; et, durant cet intervalle, elle parcourut un espace de vingt-cinq milles (huit lieues et demie) ; lorsqu’elle marchait rapidement, elle pouvait faire une lieue en douze ou treize minutes. On s’aperçut, pendant l’expérience, qu’un tube laissait perdre la vapeur, et l’on discontinua.

Les jours suivans, on essaya une autre machine, nommée la Nouveauté, présentée par MM. Braithwaite et Ericsson. La légèreté de cette voiture, sa petite dimension, son élégance et le fini de son travail, excitèrent l’admiration générale des spectateurs. Son poids était d’environ trois mille kilogrammes. On alluma le feu, et en moins de quarante minutes, avec une dépense de quinze livres de coke, la vapeur s’éleva à une pression de cinquante livres par pouce carré. On fit d’abord marcher la voiture seule, c’est-à-dire avec sa provision de combustible et d’eau et avec les personnes qui devaient la diriger. La Nouveauté partit avec une vitesse de vingt-huit milles (neuf lieues et demie) à l’heure ; elle fit même une lieue dans le court espace de cinq minutes. Si la route de Liverpool à Manchester eût été terminée, cette machine eût fait ce trajet de onze lieues en moins d’une heure. Malgré cette vitesse surprenante, la marche de la voiture était uniforme, sûre et régulière : la machine consumait entièrement sa fumée, et l’on n’en vit pas sortir la moindre quantité par l’ouverture de la cheminée. On y attacha ensuite une charge de trois fois son poids, ou près de onze mille kilogrammes ; elle traîna ce fardeau avec facilité, en conservant une vitesse de sept lieues à l’heure. Comme la vapeur vint à fuir par un petit tube, on s’arrêta pour la réparer ; l’épreuve fut renvoyée à un autre jour. Lorsque les réparations furent terminées, la Nouveauté se remit en route et fit plusieurs tournées pour l’agrément des spectateurs. À la place du chariot de roulage, on substitua une grande diligence, dans laquelle montèrent plus de quarante amateurs. Sa machine courut avec une vitesse d’une lieue en six minutes, et, quoique les personnes qui étaient dans la voiture pussent à peine distinguer les objets extérieurs, tant ils fuyaient rapidement, son mouvement était si doux et si régulier, qu’on pouvait y lire et même y écrire. Lorsque l’on recommença l’épreuve décisive avec la charge, la Nouveauté avait déjà fait trois lieues avec une vitesse de cinq lieues à l’heure, quand le mastic, qui bouchait les jointures de la chaudière et qui n’était pas assez sec, vint à fondre ; cet incident força de suspendre l’expérience qui fut ajournée à une autre époque.

M. Robert Stephenson présenta une autre voiture, dite la Fusée : cette machine était grande et solidement construite. Son poids, la chaudière étant remplie d’eau, était de quatre mille kilogrammes. Traînant après elle une charge d’environ treize mille kilogrammes, elle parcourut un trajet de trente-cinq mille (près de douze lieues) en trois heures dix minutes, y compris les stations et les retards nécessaires pour chaque tournée. Dans une seconde épreuve, elle fit le même trajet en deux heures quarante-cinq minutes, ce qui fait plus de quatre lieues à l’heure, les stations comprises. Une autre fois, la Fusée, étant débarrassée du fardeau qu’elle avait traîné, parcourut un espace de plus de dix lieues en une heure ; on remarqua que cette machine laissait échapper un peu de fumée, et qu’elle avait quelques inégalités dans sa marche, qui a varié entre quatre lieues et demie et cinq lieues et demie par heure. Toutefois il paraît constant qu’elle peut facilement faire, avec sa charge de treize mille kilogrammes, un trajet de cinq lieues par heure. La consommation de coke, pendant une course de vingt-quatre lieues, a été d’environ cinq cents kilogrammes.

C’est à cette dernière voiture que les commissaires du concours adjugèrent le prix de 13,000 fr.

A. R.

DANEMARK. — Émancipation des nègres dans les colonies danoises. — Les mesures ordonnées par le roi ont mis les nègres des îles danoises des Indes occidentales sur le pied d’égalité avec les Européens, et l’on peut regarder leur émancipation comme à peu près effectuée. Les mariages entre les hommes de couleur et les Européens sont permis. Ils exercent, avec les mêmes droits que ceux-ci, différens métiers, et font le commerce. Les meilleurs artisans sont des hommes de couleur ; un grand nombre d’entre eux sont commis dans des comptoirs ; plusieurs même ont des emplois publics. On peut citer, entre autres, M. de Castro, un des plus riches négocians de Saint-Thomas, et qui est adjudant du gouverneur. Enfin, les propriétaires noirs de quelques plantations de sucre ont des régisseurs européens à leur service. On tâche aussi de faire disparaître peu à peu le droit de propriété sur les nègres non encore libérés. Lorsque, dans une vente de succession, un nègre offre une valeur pour sa liberté, on regarde, à Sainte-Croix, comme un acte déshonorant de renchérir sur lui, et plusieurs ont ainsi racheté leur liberté à très-bas prix.


PRUSSE. — Statistique religieuse. — Les états de la Prusse ne possèdent plus que des populations chrétiennes ou juives. Le peu de Bohémiens qu’on rencontre dans les arrondissemens d’Erfurt et d’Arnsberg, ont tous reçu le baptême, et il faut espérer qu’on parviendra à les détourner de leurs anciennes habitudes, pour les faire rentrer dans la société. Les juifs ne forment que la soixante-douzième partie de la population prussienne. Parmi les chrétiens, on comptait, à la fin de 1828, 15,655 Mennonites, qui désapprouvent le baptême des enfans, et veulent qu’on remette cet acte à l’âge de discernement. Ils regardent également le service militaire comme contraire à leurs devoirs de chrétiens ; par suite ils ne remplissent pas toutes les obligations de citoyens : aussi leurs droits sont-ils restreints en conséquence. Il leur est ainsi défendu d’acquérir d’autres biens fonciers dans les états prussiens, que ceux qu’ils possèdent déjà ; et s’ils sont tolérés, ce n’est encore que par égard pour leur petit nombre. Tout le reste de la nation, qui jouit de la plénitude des droits de citoyens, se divise en chrétiens de l’église évangélique et catholique. Les premiers forment à peu près les 11/18, et les derniers les 3/8 de la population entière, qui, à la fin de 1828, se trouvait distribuée de la manière suivante :

POP. TOTALE
Y compris le milit.
Évang. Cathol. Mennon. Juifs.
Prusse Orientale. 1,216,154 1,057,895 153,579 995 3,685
— Occidentale. 792,207 387,218 376,342 12,924 15,723
Posen. 1,064,506 309,495 687,421 67,590
Brandebourg. 1,539,592 1,508,471 20,535 245 10,341
Poméranie. 876,842 864,588 7,545 4.709
Silésie. 2,396,551 1,284,446 1,091,132 3 20,970
Saxe. 1,409,388 1,316,109 89,681 3,607
Westphalie. 1,228,548 504,611 711,833 173 11,931
Provinces Rhénânes 2,202,322 499,840 1,678,745 1,315 22,422
Pour tous les états prus. 12,726,110 7,732,664 4,816,813 15,655 160,978


A.


AUTRICHE. — Registres civils de la religion évangélique. — Par un décret impérial du 26 novembre dernier, il a été accordé au clergé de l’église réformée ou évangélique, dans les états autrichiens, de tenir des registres des naissances, décès, etc., comme les catholiques, mais avec l’obligation pour les prêtres réformés de fournir copie de chacun de ces actes au clergé catholique.

N.


POLOGNE. — Grande colonie manufacturière. — Une grande colonie manufacturière a été fondée dans le royaume de Pologne, Palatinat de Masovie, district de Rawa, dans les domaines de S. E. le comte Antoine Ostrowski, à Tomaszow. Cette ville est située au confluent de la Pilica, rivière navigable, et de la Wolborka, autre rivière considérable, sur la grande route de Varsovie, entre Piotrkow et Rawa, à 14 milles de Varsovie, 25 de Cracovie, et autres villes manufacturières, dont elle peut être regardée comme un des points les plus importans. Tomaszow est de plus en communication avec la Vistule et la Baltique par la Pilica. Un air sain, un terrain élevé, coupé par un vallon, des forêts immenses tout à l’entour, des mines de fer, des carrières inépuisables de chaux et de pierre à bâtir, des eaux abondantes, des chutes nombreuses, propres à faire mouvoir des mécaniques, tout s’y trouve réuni. Aussi cette colonie qui, il y a sept ans, comptait au plus quatre ou cinq maisons, présente aujourd’hui l’aspect d’une petite ville bien bâtie et habitée par une population aisée et industrielle, composée en grande partie d’étrangers, qui s’élève déjà à 5,000 ames, et s’accroît tous les jours. Tomaszow compte un grand nombre de manufactures de draps ; celles de coton commencent à s’y multiplier. Des négocians, des marchands, des entrepreneurs de toute espèce, y font valoir leurs capitaux avec beaucoup de succès ; une foule d’artisans et d’ouvriers, des familles laborieuses, ont recueilli en peu de temps les fruits de leur industrie et de leur activité. Un bien plus grand nombre de colons peut encore y jouir d’une existence assurée et y trouver sûreté et protection.

Les contrats entre le propriétaire de l’endroit et les intéressés se font à leur convenance mutuelle, soit à titre de bail temporaire, soit à perpétuité. Dans ce dernier cas, le colon prend possession d’une certaine étendue de terrain, à titre de ferme à perpétuité qui passe à ses enfans et héritiers. Il a le droit de céder son contrat, ses terres, les maisons qui peuvent s’y trouver, à qui bon lui semble, et c’est dans ce cas qu’une somme convenue sur le prix de la vente revient au propriétaire de l’endroit. Le colon est libre d’exercer tel métier qu’il lui plaît, de faire le commerce, d’établir des manufactures de tout genre, sans que personne puisse mettre des entraves à son industrie. Il faut en excepter toutefois le droit de fabriquer et de vendre les boissons, comme eau-de-vie, bière, etc., qui appartient, selon l’usage général du pays, au propriétaire, ainsi que le droit d’exploiter les minéraux.

Les cultivateurs peuvent avoir pour plusieurs années, ou pour toujours, des fermes de l’étendue de 7, 14, 28, 40 à 60 arpens. Quant aux terrains situés dans l’enceinte de Tomaszow même, ce n’est qu’au bout de six années, à compter de la date du bail à ferme, que le colon est tenu de payer au propriétaire une rente annuelle qui n’excède pas la somme de seize florins de Pologne (dix francs environ). Le seigneur de l’endroit accorde jusqu’à présent, à titre gratuit, à la plupart des colons, pour diminuer les frais de construction, une certaine quantité de bois, de pierres à bâtir et de pierres à chaux.

Tomaszow possède deux filatures de laine, plusieurs établissemens pour la teinture et l’apprêt des draps les plus fins, plusieurs fouleries, ainsi que tous les établissemens nécessaires pour donner le dernier fini aux draps. Les draps de Tomaszow ont acquis tant de vogue dans le commerce de la Russie, que plusieurs centaines de métiers, toujours en mouvement, ne peuvent suffire aux demandes des marchands russes. Quelques magasins de coton filé sont ouverts pour les fabricans qui commencent à s’installer dans la colonie. On va mettre en activité l’établissement d’une filature. En général, la fabrication des étoffes de coton, moins avancée jusqu’à présent à Tomaszow que celle des draps, offre les plus belles espérances, vu que le pays possède bien peu de manufactures en ce genre. Les établissemens pour la teinture, l’imprimerie, l’apprêt et les autres accessoires, commencent à se former. La branche des cotonnades est protégée dans ce pays d’une manière toute particulière, et les fabricans étrangers peuvent s’attendre à être encouragés.

Tomaszow renferme plusieurs fabriques de fer, un haut fourneau, une fonderie, une taillanderie, etc. On y trouve une maison de poste, des auberges, un médecin, plusieurs chirurgiens, une pharmacie, un bureau pour l’expédition des marchandises, des magasins bien fournis de toutes les choses nécessaires à la vie, une église catholique, une église protestante, une école polonaise et allemande, une synagogue, un grand marché une fois la semaine, etc.

Le chemin le plus court pour y arriver, si l’on vient de l’Autriche, est par Cracovie, Konskie, Opoczno ; si c’est de l’Allemagne, c’est par Kalisz, Warta, Fabianice, ou, ce qui est plus court encore, par la douane frontière de Wieruszow à Tomaszow.


SERVIE. — Grande assemblée nationale. — La nation servienne, quoique soumise à la Porte, a joui depuis la conquête de priviléges assez considérables. Depuis le traité d’Andrinople, le Sultan a envoyé au visir de Belgrade un firman où il annonce l’intention de les exécuter dans toute leur étendue. On y remarque les suivans :

Liberté complète du culte, faculté de choisir librement les chefs de l’administration, indépendance de l’administration intérieure, intégrité de l’ancien territoire de la Servie (par conséquent restitution des six districts qui en ont été séparés), fixation invariable de la somme que la Servie doit payer en tribut à la Porte, administration par des Serviens de toutes les propriétés turques qui sont en Servie ; liberté de faire le commerce dans tout l’empire turc avec des passeports serviens ; faculté d’établir des hôpitaux, des écoles et des imprimeries, interdiction à tous les Turcs de résider en Servie, à l’exception de ceux qui font partie des garnisons qui doivent occuper certaines places fortes.

Cependant les négociations entre la Servie et la Porte avaient traîné en longueur. Enfin, le 1er de février 1830, un commissaire turc est parti de Constantinople avec les députés serviens qui s’y trouvaient, pour fixer définitivement les limites des six districts qui doivent être restitués à la Servie, savoir : ceux de Krain, Timok, Parakin, Kruschevatsch, Strarovlaschka et Drina.

Le prince Milosch, qui dirige depuis 14 ans l’administration de ce pays, qui est le sien, a convoqué une assemblée nationale, qui s’est réunie à Kragujewaz, le 4 février, pour entendre les communications que le prince devait faire à la nation. Cette assemblée se composait d’environ 1,000 représentans ; 700 étaient des députés des communes, munis pour la première fois de pleins pouvoirs de la part de leurs commettans ; chaque commune de 100 maisons avait nommé un député ; les autres plus petites s’étaient réunies pour en nommer un ou deux. La ville de Belgrade était représentée par 6 députés. Les 300 autres membres appartenaient au clergé supérieur, aux tribunaux ou à la classe des agens de l’administration.

Les pouvoirs ayant été vérifiés le 5 et le 6, le prince Milosch se rendit à l’assemblée le 7. Après avoir donné connaissance du firman dont nous avons parlé, il développa toute l’importance des priviléges reconnus à la Servie, et félicita son pays d’être rentré dans la jouissance de ses droits, grâce à l’intervention de l’empereur de Russie. Il parla ensuite de son administration : il déclara qu’il était prêt à rendre compte de l’emploi des deniers publics ; il annonça qu’une commission nommée par lui pour rédiger un code de lois, en prenant pour base le code Napoléon, travaillait déjà depuis deux ans. Il s’étendit sur la nécessité d’établir des écoles, des imprimeries, des hôpitaux, de répandre de toutes manières l’instruction, et d’encourager les sciences. Enfin il dit à l’assemblée nationale qu’elle était convoquée surtout pour organiser un gouvernement. Il déclara qu’il relevait la nation du serment de fidélité qu’elle lui avait prêté, et qu’il remettait l’administration de l’état entre les mains de ses représentans.

Ce discours produisit le plus grand effet sur l’assemblée. Une foule immense accompagna le prince jusqu’à son palais en faisant retentir les airs de cris de joie et d’applaudissemens.

Les premières autorités, le clergé et tous les représentans se sont réunis aussitôt après au palais de justice, où un comité choisi par cette assemblée a dressé trois actes, dont il lui a été fait lecture, et qu’elle a unanimement adoptés. Chacun de ces actes a été écrit sur un rouleau de parchemin, scellé et muni de la signature de tous les assistans, dont le nombre se montait à près de 1,000.

Le premier de ces actes, adressé au prince Milosch Obrenowitsch, lui confère, au nom de la nation, le titre de Père de la Patrie, lui confirme, ainsi qu’à ses héritiers légitimes, la qualité de prince régnant de la Servie, et renouvelle envers lui et ses successeurs, de la part de la nation, le serment d’un dévouement et d’une fidélité inviolables.

Le second contient les remercîmens de la nation envers le Grand-Seigneur ; elle lui adresse de nouveau la prière de reconnaître le prince Milosch Obrenowitsch comme régnant légitimement en Servie, et de confirmer, conséquemment à la résolution invariable de la nation, l’hérédité de cette dignité dans sa famille.

Le troisième acte est également une adresse de remercîmens envers le monarque russe.

Le 9, l’assemblée invita le prince à se rendre à l’église, où les trois actes lui furent solennellement remis, et elle lui renouvela, au nom de la nation, la prestation de serment ; le prince prêta de son côté serment au peuple servien. Le clergé entonna le Te Deum, et M. Gerasimos, évêque de Schabatz, prononça un discours analogue aux circonstances.


SAINT-PÉTERSBOURG. — Établissement d’Omnibus. — Ces voitures qu’on vient d’organiser dans cette ville, partiront à la même heure des différens points assignés, et feront le trajet sans s’arrêter, de sorte que les numéros semblables se rencontreront à moitié chemin. Les heures du départ seront 9 et 10 heures du matin, et 2, 4, 6 et 9 heures du soir. Pendant l’été, ces voitures auront la forme de lignes (linaika), c’est-à-dire qu’elles seront ouvertes de tous les côtés, et n’auront qu’une impériale. Elles pourront transporter 20 à 22 personnes. Les prix sont assez élevés, car les premières places coûteront plus de 80 centimes et les secondes plus de 40.


ODESSA. — Puits artésiens. — La société rurale de la Russie méridionale à Odessa a recommencé ses travaux ; le 4 février dernier elle eut une séance où l’on examina, entre autres objets, le projet de M. de Châtillon, ingénieur français, pour pratiquer des puits artésiens à Odessa, et ensuite dans toute la Nouvelle-Russie. L’établissement de ces fontaines jaillissantes dans un pays privé d’eau peut avoir les résultats les plus vastes, et la société est déterminée à l’appuyer de la coopération la plus active. La souscription par actions a été reconnue comme le meilleur moyen pour atteindre le but désiré. La somme nécessaire pour la construction d’un seul puits artésien et pour la confection des instrumens, qui ensuite peuvent servir dans tout autre endroit, est évaluée à 16,200 fr., partagés en 300 actions. De ce nombre, la société rurale prend pour son compte 40 actions, les membres de la société, présens à la séance du 4 février, en ont pris 100. La souscription pour le restant de la somme en question est ouverte sous la direction d’une commission chargée par la société de pourvoir à l’accomplissement de cette utile entreprise.


BOSPHORE Description du Bosphore Cimmérien et de la mer Noire. Sur la proposition du gouverneur général, et appuyée par le ministre de l’instruction publique, l’empereur de Russie a ordonné que l’impression de l’ouvrage de M. de Blaremberg, conseiller d’état, serait faite aux frais du gouvernement. Cet ouvrage est le résultat des recherches topographiques que M. de Blaremberg a faites pendant long-temps sur les côtes européennes du Bosphore cimmérien et la mer Noire qui en sont le plus rapprochées. Une fort belle carte et six plans accompagnent l’ouvrage. On s’est surtout attaché dans les dessins à présenter les traces encore subsistantes des lieux dont Strabon et l’auteur anonyme de la description du Pont-Euxin avaient déterminé les positions. Les renseignemens des anciens géographes avaient été souvent fort mal interprétés par les auteurs modernes, faute d’avoir vu les lieux : aussi en était-il résulté les plus graves erreurs dans presque toutes les cartes de la Tauride. Les meilleures mêmes n’en étaient pas exemptes, notamment celle de Formaleoni. M. de Blaremberg s’est chargé de rectifier ces fautes ; il a cherché à coordonner partout ses propres observations avec celles des anciens, et il paraît qu’en général il n’a pas trouvé pour les lieux des différences fort notables. Il a aussi découvert des ruines de ces trois forteresses scythiques dont parle Strabon. Il se propose de publier bientôt le fruit de ses observations. Les inscriptions grecques aussi nombreuses qu’intéressantes qu’il y a rencontrées jetteront sans doute quelque nouvelle lumière sur l’histoire peu connue de ces régions.


TURQUIE. — Nuée d’insectes. — « En 1822, je traversai une vaste plaine dans le voisinage de Brousse (Asie Mineure) qui était couverte de ces insectes, à plusieurs pouces de profondeur. Leurs larves y avaient été déposées par une nuée de locustes qui s’y étaient abattues et étaient encore trop jeunes pour pouvoir se servir de leurs ailes. Deux mois après ils s’envolèrent dans la direction de l’E. N.-E., et s’étant arrêtées au-dessus de Constantinople, on eût dit un voile épais de gaze qui enveloppait cette ville. Le plus grand nombre continua sa route, mais une quantité considérable de traînards s’abattit sur le faubourg de Péra et en remplit les rues et les jardins. Le parc du palais de l’ambassade anglaise en était tellement couvert, qu’il était impossible de parcourir ses allées sans en écraser des milliers, et qu’en peu d’instans ils détruisirent toute la verdure. Un matin, cependant, ils prirent tout à coup leur essor vers la mer Noire, mais ayant éprouvé des vents contraires, ils allèrent tous périr à l’entrée du Bosphore. Une partie de ces insectes, emportée par les courans, fut jetée sur le rivage de Bojukdéré et de Terapia, mais la plupart furent entraînés jusque devant Pera, où, rencontrant le courant du port, ils formèrent une barrière de près d’un mille de long entre les deux courans, jusqu’à ce qu’entraînée dans la mer de Marmara leur masse se rompit et se dispersa. »

W…


GRÈCE. — État de l’instruction primaire en 1829. — « … Mon premier objet, en voyageant en Grèce, était d’y vérifier l’état des écoles. Ce que j’ai vu de l’ardeur des enfans à recevoir l’instruction, et l’étonnante rapidité de leur intelligence a dépassé tout ce qu’on m’avait dit.

» À Égine, où le séjour momentané du gouvernement fait affluer les nationaux, les bâtimens manquent aux écoles. J’ai vu des enfans étudier à l’ombre d’un mur, parce qu’ils ne pouvaient trouver place dans l’enceinte. Dans la pénurie de toutes choses, on voit à peine un volume entier dans une école ; les élèves se partagent les feuillets, et ceux qui ne peuvent en avoir copient leur leçon. Malgré ces difficultés matérielles, on ne saurait exprimer les progrès de ces pauvres enfans.

« Cette ville seule possède actuellement vingt écoles d’enseignement mutuel de 15 à 100 enfans chacune. L’asile des orphelins, bâti par souscription pour les enfans grecs dont les parens sont morts en servant la patrie, en renferme 500. Non loin s’élève un collége de 120 élèves, où l’on étudie les auteurs anciens, l’histoire, la géographie et la géométrie.

» … Je distribuai dans ces divers établissemens des exemplaires du Nouveau-Testament grec, qui furent reçus avec la joie la plus vive. Partout j’ai vu la même ardeur à obtenir les livres utiles, et particulièrement l’Évangile. Lorsque M. King, missionnaire américain, quitta le vaisseau qui l’avait conduit à Égine, il voulut payer son passage au capitaine Mamouni ; celui-ci refusa l’argent, et demanda trois ou quatre exemplaires du Nouveau-Testament pour sa famille et pour lui.

» Quand je visitais les écoles, tous les enfans m’accueillaient en criant : vivent les amis de la Grèce !

» À Argos, l’école primaire contient 250 enfans. Il existe en outre une école de 20 petites filles. À Napoli di Romani, l’école est composée de 220 garçons et de 130 filles. On bâtit une maison qui en contiendra un plus grand nombre. À Syra, on en construit une pour 300 enfans ; à Andros, l’école contient 127 garçons et 13 filles, à Tinos 100 garçons et 50 filles. Celle que viennent d’ouvrir dans cette île M. King et sa femme a reçu 13 filles le premier jour, et le troisième 27. À Miconi, l’école renferme 9 garçons et 60 filles. Il y a, en outre, un collége de 60 enfans. À Naxos, dont la population est de 600 ames, il y a un collége de 90 garçons, et l’école primaire contient 175 garçons et 25 filles.

» Lorsque j’eus fait une distribution dans cette dernière école, les enfans se mirent à chanter un hymne en l’honneur des Anglais, des Américains et des Français.

» Je ne puis partager l’opinion sévère de quelques voyageurs sur le caractère grec et sur l’influence funeste d’une si longue oppression. Je ne doute pas, au contraire, que si ce beau pays est conduit pendant quelques années par un gouvernement sage, il ne surprenne l’Europe par ses progrès dans tous les genres de civilisation.

» M. Capo-d’Istria, qui porte les soins les plus attentifs à tous les intérêts de la Grèce, n’a pas négligé de conserver ses anciens monumens. L’asile des orphelins est orné de vases antiques. Des fouilles ont été faites à Égine ; on les continue dans plusieurs parties de la Grèce. »

Barker.
ASIE.


ERZEROUM. — Bénédiction des eaux de l’Euphrate. — Le premier février, a eu lieu à Erzeroum une solennité mémorable dans les annales de l’Asie mineure, la bénédiction des eaux de l’Euphrate d’après le rite græco-russe, que la présence des troupes russes a permis de célébrer avec pompe et que les chrétiens de cette contrée n’avaient pas osé renouveler depuis neuf siècles. L’aumônier russe, accompagné du clergé et de l’évêque arménien, se rendit processionnellement à deux lieues de la ville, où des détachemens, avec les drapeaux de la garnison, entouraient le lieu préparé pour la cérémonie. La route et les rives du fleuve étaient couvertes d’une foule immense de spectateurs, parmi lesquels on comptait même beaucoup de Turcs. Au moment de la bénédiction des eaux, les troupes exécutèrent des salves de mousqueterie, et après avoir reçu elles-mêmes la bénédiction, elles se remirent en marche au son de la musique militaire.


PROVINCES DU CAUCASE. — Progrès des différentes cultures.M. Morénas a été envoyé en Géorgie, pour essayer d’acclimater, dans les provinces situées au-delà du Caucase, différentes plantes des contrées méridionales, ou d’améliorer celles qui existent déjà. Il est également chargé d’examiner les établissemens de filature de soie, établis par feu M. Castella, afin d’en retirer le plus d’avantages possible.

Le gouvernement russe, guidé par les conseils de M. Gamba, consul général de France à Tiflis, a fait venir de France, de Portugal, d’Espagne et de la Boukharie, des outres de première qualité, et les a envoyées dans les mêmes provinces pour y favoriser la fabrication des vins ; des tonneliers, engagés pour trois ans, doivent y introduire leur métier, qui y est presque entièrement inconnu. Par ces démarches, on espère parvenir bientôt à obtenir des vins excellens, qui dispenseront la Russie de consommer ceux de France et d’autres pays étrangers.


SIBÉRIE. — Foire d’Irbit. — D’après le rapport fait par le gouverneur de Perm, la foire de la ville d’Irbit en Sibérie a pris un tel développement depuis quelque temps que l’année dernière il s’y est fait des affaires pour la valeur de onze millions de roubles ; en 1803, il ne s’en était fait que pour trois millions et demi. Ces avantages sont dus aux mines de fer de la province et aux relations commerciales avec la Chine par Kiachta. Une grande route achevée en 1753 facilite la communication avec la Russie d’Europe.

B…


CHINE. — Démêlés de la compagnie des Indes anglaises avec le gouvernement de Canton. — Les affaires commerciales à Canton sont pour le moment dans un état peu favorable, principalement le trafic avec les Européens et les natifs de l’Inde.

Un célèbre négociant Hong (sorte d’association), nommé Chungua, vient de faire une faillite de plusieurs millions, et presque tous les autres marchands du Hong se trouvent également en banqueroute. Les étrangers des différentes nations ont présenté une adresse pour demander justice, et le commerce est en grande partie interrompu, jusqu’à ce que le gouvernement local fasse droit à leur demande. On se flatte que quelque avantage pourra résulter de cet état de choses, mais le caprice du vice-roi de Canton et de son conseil pourrait bien se départir de ce qu’exigent la sagesse et la politique. Voici un extrait du mémoire présenté par la factorerie anglaise.

Il est dit dans ce mémoire qu’à moins d’un changement de système, il deviendra impossible de continuer le commerce ; que les taxes et les extorsions sont devenues tellement pesantes et vexatoires qu’on ne peut plus se soumettre au système existant ; qu’on a perdu toute confiance dans les négocians Hongs, attendu qu’à l’exception de trois, ils sont tous en faillite. Les signataires demandent en conséquence que les étrangers faisant le commerce à Canton aient la faculté d’établir des magasins pour la réception de leurs propres marchandises, que les droits soient payés à l’empereur en espèces, et que le propriétaire des marchandises puisse les retenir en sa possession ; que les droits payés pour les négocians Hongs insolvables soient supprimés, et particulièrement le droit de 6 pour 100 imposé sur le coton brut ; que le nombre des négocians Hongs soit porté au moins à soixante, ou, si cette augmentation est impraticable, qu’on accorde des licences aux marchands ou autres en dehors de la barrière, pour commercer, comme par le passé, avec les étrangers ; que toutes les taxes désignées par le nom de cumshaw ou présens soient abolies, particulièrement celle de 1950 tales, ou 1600 dollars, qui est perçue par les mandarins de la douane ; et de plus les cumshaw aux fournisseurs de bâtimens. On a la certitude que les mandarins extorquent près de 700 dollars sur les fournitures qu’ils font à chaque bâtiment. On demande encore que les dettes de Chungua soient payées sans délai.

Voilà quelles sont les demandes principales. Il y en a d’autres d’une moindre importance, telles que d’arborer le pavillon sur le comptoir de la compagnie à Macao, d’avoir la disposition d’une route assez large pour les voitures, et un terrain pour la course des chevaux destinée à la récréation des employés de la compagnie pendant les mois d’été, et une extension des limites de leurs jardins devant le comptoir de Canton, etc.

Le Hoppo ou chef des douanes étant mort, et son successeur attendu de Pékin n’étant pas encore arrivé, les choses restaient dans un état d’incertitude quant aux résultats. Les opinions étaient partagées, plusieurs pensant que les Chinois ne voudraient point renoncer à un système qu’ils ont suivi pendant des siècles, tandis que d’autres supposaient que les Anglais obtiendraient ce qu’ils demandent en interceptant, pendant une saison seulement, les jonques chargées de sel destiné pour Canton.

P.
AFRIQUE.


ÉGYPTE.Travaux de M. Pariset. — D’après des lettres qu’on a reçues de M. Pariset, ce voyageur, quoique très-fatigué et mal portant, n’en continuait pas moins à parcourir les villages du Delta, rendus accessibles par la rentrée du Nil dans son lit, et observait partout avec soin les maladies auxquelles l’inondation donne naissance, et qui sont si préjudiciables à la population de cette partie de l’Égypte. La peste est-elle importée dans le Delta, ou y est-elle endémique ? Faut-il avoir recours à des lazarets ou bien à l’assainissement des villages du Delta, pour en éloigner cette cruelle maladie ? Telles sont les questions dont M. Pariset cherchait la solution à travers mille obstacles. Pour arriver à son but, il avait envoyé, à la date des lettres dont nous donnons l’extrait, M. Dumont à Smyrne et à Constantinople, afin d’y constater l’existence de la peste, et le départ pour l’Égypte de bâtimens ayant à bord ou des malades ou des marchandises infectées. M. Guilhou, envoyé à Alexandrie, et ayant à sa disposition tous les moyens de désinfection désirables, était chargé de constater l’arrivée dans ce port des navires suspects, et de procéder, de suite, à leur assainissement. M. Pariset allait à Rosette pour y exercer la même surveillance, et MM. Lagasquie et Bosc remplissaient le même objet au Caire et dans le Delta : quant à M. Félix d’Arcet, resté au Caire avec M. Lagasquie, il y préparait en grand les chlorures désinfectans nécessaires, et les fournissait de là aux différens membres de la commission. Il faut espérer qu’un plan aussi bien conçu, et exécuté avec autant de dévouement, amènera des résultats décisifs et de nature à résoudre enfin la grande question de l’origine de la peste, qui, depuis quelques siècles, ravage si souvent l’Égypte.

P. S. M. Pariset vient d’arriver à Toulon.


OCÉANIE.


NOUVELLE GALLES. — Situation des colonies anglaises. — Des lettres de Sydney, datées du 21 octobre 1829, nous donnent des nouvelles très-favorables sur l’état prospère des colonies anglaises dans cette contrée. Sydney a été fondée il n’y a que quarante ans, et déjà c’est une des plus grandes villes de celles qui sont situées au sud du tropique du capricorne. Quelques années de plus, et l’accroissement des capitaux en circulation, les entreprises des commerçans et la grande impulsion donnée à la pêche feront de Sydney la rivale de Lima et de Rio-Janeiro. Un nouvel article d’exportation commence à augmenter la richesse du pays, et il sera plus facile d’y recueillir 10,000 ballots de tabac que 1,000 de laine. Aussi une pétition pour l’admission du tabac de l’Australie dans les ports de l’Angleterre est dans ce moment devant la chambre du commerce, et on assure que le ministère est porté à admettre la demande des pétitionnaires.

Les indigènes de la terre de Van-Diemen ne cessent de troubler le repos des colons ; ils volent et pillent dans toutes les directions, et osent même attaquer les gens armés qu’ils rencontrent sur la grande route ; mais on prend des mesures sévères contre eux, et l’on espère parvenir à les tenir en respect. Une communication par bateaux à vapeur va être incessamment établie entre l’Inde et les colonies de l’Australie. Ces bateaux toucheront à la rivière des Cygnes.



TERRES AUSTRALES. — Température et climat. — « Rien n’est moins vrai que ce qu’on rapporte de l’intensité du froid des régions méridionales du globe. Au cap Horn, par lat. S. 56°, la végétation est en pleine activité au mois de mai (c’est le mois de novembre de ces contrées), et la neige y séjourne rarement dans les terrains bas. Nous avons été à même d’étudier le climat du midi, et de reconnaître que sa température est beaucoup plus douce que celle du nord : l’Amérique nous a fourni le moyen d’établir cette comparaison. Les étés ne sont point chauds, ni les hivers froids dans le midi ; mais, en revanche, on y est sans cesse exposé au vent et à la tempête, et il ne se passe guère vingt-quatre heures sans qu’il tombe de la pluie. L’île de Staten renferme des montagnes escarpées de 2000 pieds de haut, qui sont couvertes d’arbres jusqu’à leurs sommets ; le sol environnant est extrêmement marécageux. Le thermomètre s’y tient communément fort bas, et il est rare qu’il varie de plus de 4 ou 5 degrés de Fahrenheit dans les vingt-quatre heures. Le vent, qui y règne éternellement, souffle presque toujours de l’ouest. » (Extrait d’une lettre écrite par un officier du vaisseau anglais Le Chanticler).


ÎLE TRISTAN D’ACUNHA. — Colonie anglaise du caporal Glass. — Un individu, nommé Glass, qui est aujourd’hui le principal habitant de cette île, y fut envoyé, il y a environ quatorze ans, avec une compagnie d’artillerie, dont il était caporal, pour y tenir garnison durant la captivité de Napoléon à Sainte-Hélène. À la mort de ce prince, les Anglais ayant évacué l’île, Glass obtint la permission d’y rester pour garder les bestiaux et les magasins. Actif et fort entreprenant, il se mit à exécuter de grands défrichemens. Lorsque le navire anglais le Pyrame toucha à Tristan en janvier 1829, la population se composait de sept hommes, six femmes et quatorze enfans, dont huit ou neuf appartenaient à Glass. Ils possédaient 300 acres de terre labourable, de riches pâturages et de l’eau excellente. Leur troupeau se composait de 70 bêtes à cornes de la meilleure race, et de 100 moutons, dont la laine se vendait au Cap 2 schell. 6 pence la livre ; les parties montueuses de l’île étaient peuplées de milliers de chèvres sauvages.

Les plantations de froment et d’orge des colons promettaient une abondante récolte ; et quant aux pommes de terre[1], bien qu’ils en eussent déjà fourni à plusieurs navires, ils en avaient encore en magasin douze tonnes pesant, pour chaque habitant. Glass s’est construit une habitation commode, et a entouré les terres défrichées d’un mur de pierre de trois milles de circonférence, auquel il a travaillé pendant dix ans.

W…


CANADA. — Voyage de M. John Willis. — Ce professeur de géographie à Shrewbury écrit de Chippawa, dans le Haut-Canada, qu’il a été très-bien accueilli par un chef de six tribus indiennes ; il loue particulièrement l’hospitalité qu’il a trouvée pendant un séjour de trois mois chez une race indienne qui n’a aucune connaissance des langues et mœurs européennes. Il s’est informé, chez ces habitans, de la possibilité de se rendre, du côté occidental, aux établissemens russes sur la mer Pacifique. Deux d’entre eux se sont offerts pour l’accompagner jusqu’à la rivière de Colombie, et il se prépare à entreprendre ce voyage intéressant, mais pénible et dangereux, de 2000 milles anglais, à travers le continent américain, en parcourant des forêts immenses, habitées par des bêtes féroces et des sauvages, sans espérer de trouver un seul être civilisé qui puisse lui indiquer la route à suivre. Arrivé à la rivière de Colombie, il se rendra au Kamtschatka, et de là, par terre, à Saint-Pétersbourg.

S. M.


ÉTATS-UNIS. — Statistique religieuse. — On nous communique la classification suivante des différentes sectes religieuses des États-Unis.


Congrégationalistes de la Nouvelle-Angleterre. — Orthodoxes. Ministres 800 ; églises vacantes 250 ; membres 115,000. — Unitaires. Environ 150 congrégations.
Presbytériens. — Synodes 16 ; presbytères 90 ; ministres 1289 ; licenciés 193 ; églises 1946 ; membres 146,297.
Église hollandaise réformée. — Ministres 117 ; églises 155 ; églises vacantes 16.
Église allemande réformée. — Églises environ 400 ; membres 30,000.
Église épiscopale. — Évêques 13 ; ministres 507 ; églises 5,989.
Baptistes calvinistes associés. — Associations 206 ; églises 4,027 ; ministres 2,749
Moraves. — Congrégations 23 ; ministres 23 ; membres 6,000.
Méthodistes. — Évêques 3 ; prédicateurs en tournée 1,533 ; id., incapables d’exercer leur ministère à cause de leur grand âge, 109 ; membres de la société 421,105. Le nombre des prédicateurs à poste fixe est inconnu.
Luthériens évangéliques. — Environ 200 ministres et 800 congrégations.
Église de la nouvelle Jérusalem. — Ministres ordonnateurs 8 ; prêtres-ministres-instructeurs 6 ; licenciés 12.
Société chrétienne. — De 800 à 1000 églises.
Universalistes. — De 200 à 300 congrégations.
Catholiques. Le nombre en est inconnu. On l’estimait, il y a quelques années, à 600,000. Il s’est depuis beaucoup accru.
Baptistes de volonté libre. — Ministres 242 ; églises 335.
Amis ou quakers. Le nombre en est évalué à 750,000.
Trembleurs. — Sociétés 16 ; prédicateurs 40 ; membres 5,400.
Baptistes du septième jour. — Églises 18 ; ministres 29 ; membres 2,862.
Baptistes aux six principes. — Églises 15 ; ministres 20 ; membres 1,500.
Tunkers. — Églises 33 ; ministres 30 ; membres 3,000.
Mennonites. — Églises 225 ; ministres 200 ; membres 20,000.
Baptistes de communion libre. — Églises 32 ; ministres 23 ; membres 1284


ÉTATS-UNISSociété américaine des missions protestantes. — La société américaine des missions protestantes a fait imprimer, en 1829, 172,000 exemplaires des Écritures en langue chactas, un nombre égal dans la langue des Senecas, et 175,000 en chérokée. Cette dernière nation fait de grands progrès dans la civilisation. Le Phenix, journal chérokée, rédigé par un naturel qui a inventé les caractères de la langue, annonce, dans son dernier numéro, la formation d’une société pour la tempérance à New-Echota, capitale du pays. L’article troisième des statuts de cette société est ainsi conçu :

« Les membres de la société ayant l’ardent désir d’avancer la prospérité du pays et le bonheur de leurs concitoyens, et étant fermement convaincus que l’usage immodéré des liqueurs fortes est en opposition directe avec leurs plus chers intérêts, prennent la résolution de ne mettre en circulation, de ne distiller, de ne vendre, de ne donner aucune liqueur forte, de ne s’en servir eux-mêmes que comme remède dans le cas d’infirmités, et d’en faire cesser l’usage par tous les moyens convenables. »

On sait avec quelle persévérance les missionnaires américains ont entrepris la civilisation des peuples sauvages. Les écoles dans les îles Sandwich comptent aujourd’hui 45,000 élèves. À Ceylan, ils ont fondé un séminaire divisé en cinq classes, et destiné à former les jeunes indigènes qui veulent se vouer à l’instruction de leurs compatriotes. Le nombre des étudians s’élève à 93. Dans le dernier concours, qui a eu lieu en présence des chefs civils et militaires de l’île, les deux dernières classes ont été examinées sur les langues anglaise et tamoule ; la seconde et la troisième sur l’astronomie, le globe terrestre, les cubes, les racines carrées, et les progressions arithmétiques et géométriques. La première classe a subi l’examen sur la trigonométrie, la mesure des solides, des hauteurs et des distances, et sur la méthode pour calculer la distance du soleil, de la lune, des planètes, et le temps des éclipses. La mécanique, la pneumatique et l’hydraulique font aussi partie des études de cette classe.


ÉTATS-UNIS Mouvement de la presse périodique depuis 1775. — Le tableau ci-joint, plus exact que celui qui a déjà été publié par plusieurs feuilles quotidiennes, présente le nombre des journaux et écrits périodiques publiés dans les divers états de l’Union à l’époque de la révolution, en 1810 et en

1775. 1810. 1828.
Maine 
» » 29
Massachusetts 
7 32 78
New-Hampshire 
1 12 17
Vermont 
» 14 21
Rhode Island 
2 7 14
Connecticut 
4 11 33
New-York 
4 66 161
New-Jersey 
» 8 22
Pensylvanie 
9 71 185
Delaware 
» 2 4
Maryland 
2 21 37
District de Colombia 
» 6 9
Virginie 
2 23 34
Caroline du Nord 
2 10 20
Caroline du Sud 
3 10 16
Géorgie 
1 13 18
Floride 
» 1 2
Alabama 
» » 10
Mississipi 
» 4 6
Louisiane 
» 10 9
Tennessée 
» 6 8
Kentucky 
» 17 23
Ohio 
» 14 66
Indiana 
» » 17
Michigan 
» » 2
Illinois 
» » 4
Missouri 
» » 5
Arkansas 
» » 1
Nation chérokée 
» » 1
Totaux 
37 358 852


ÉTAT DE NEW-YORK Village éclairé par le gaz naturel. — Ce singulier phénomène existe au village de Frédonia, situé dans la partie occidentale de l’état de New-York, à environ deux milles du lac Érié. Une petite rivière très-rapide le traverse, et, après avoir fait plusieurs détours, se jette dans le lac. À son embouchure est un petit port. On s’aperçut, il y a trois ans, que des bulles qui s’élevaient fréquemment des eaux de cette rivière contenaient du gaz inflammable. Un trou d’un pouce et demi de diamètre, qu’on pratiqua à un rocher au bord de l’eau, donna issue au gaz que l’on recueille maintenant dans des vaisseaux, et qui étant devenu la propriété d’une société formée pour cet objet, est vendu dans le village à raison d’une piastre et demie par bec pendant un an. La flamme est brillante, mais moins cependant que celle du gaz obtenu par les ressources de l’industrie.

L…


MEXIQUE. — Population des 19 états. Nombre de leurs députés. — On peut regarder comme officiel l’exposé numérique que nous donnons ici. Il servira à rectifier plusieurs erreurs. Nous en devons la communication à l’obligeance d’un haut fonctionnaire, qui remplissait dernièrement au Mexique une des places les plus éminentes du gouvernement.

États. Députés. Population
Mexico 
15 1,200,000
Puebla 
9 720,000
Oaxaca 
6 480,000
Yucatan 
7 560,000
Talisco 
7 560,000
Valladolid 
5 400,000
Saint-Louis de Potosi 
5 400,000
Guanaxuato 
5 400,000
Tabasco 
2 160,000
Chiapas 
2 160,000
Zacatécas 
3 240,000
Queretaro 
2 160,000
Durango 
2 160,000

Coahuila et Texas 
1 80,000
Nouveau-Léon 
1 80,000
Tamaulipas 
1 30,000
Chihuahua 
1 80,000
Sonora et Sinaloa 
2 160,000
District fédéral 
2 180,000
4 territoires à un 1 député 
4 320,000
Totaux 
82 6,530,000


BRÉSIL. — Représentation nationale en 1830.

Noms des provinces. Chambre des sénateurs. Chambre des députés.
San Pedro do Rio Grande do Sol 
1 2
Sancta Catharina 
1 1
San Paulo 
4 8
Rio de Janeiro 
4 8
Espiritu Sancto 
1 1
Bahia 
4 12
Sergipe 
1 1
Alagoas 
2 5
Fernambuco 
6 11
Parahyba 
2 4
Rio grande do Norte 
1 1
Ceara 
2 8
Piauhy 
1 1
Maranhào 
2 4
Parà 
1 3
Minas Gerues 
10 19
Goyaz 
1 2
Matto-Grosso 
1 2
Totaux 
45 92


Adrien Balbi.


RIO-JANEIRO. — Dotation de jeunes orphelines. — Lors des fêtes qui ont eu lieu récemment à Rio-Janeiro, à l’occasion du mariage de l’empereur don Pedro avec la princesse Amélie de Leuchtenberg, tous les corps et tous les individus ont rivalisé de zèle et d’efforts pour témoigner leur joie de cet heureux événement. Les négocians et artistes suisses et allemands ne sont point demeurés étrangers à ce sentiment, et ils ont ouvert entre eux une souscription, qui a produit une somme de 20,000 francs ; mais, au lieu d’appliquer cette somme à des arcs de triomphe ou à des actes de réjouissance, qui ne laissent aucune trace durable, ils ont décidé qu’elle serait employée à doter quatre orphelines brésiliennes. Le comité de la souscription, à la tête duquel se trouvait placé M. Henri Terrisse, de Genève, ayant présenté requête à l’Empereur, pour obtenir son approbation, ce souverain lui a fait faire la réponse suivante :

« S. M. l’Empereur a accueilli avec empressement la demande que vous lui avez faite, messieurs, d’approuver votre offre au nom des négocians suisses et allemands, d’une somme de 3 contos 200,000 réis, produit de vos souscriptions, pour être appliquée, en commémoration de son heureux hyménée, à doter quatre orphelines de l’hospice de la Miséricorde, en âge de se marier.

» D’après les ordres de l’Empereur, j’ai la satisfaction de vous annoncer, messieurs, que S. M. a accepté et approuvé avec une vive reconnaissance votre offre généreuse. Son noble cœur y a été très-sensible, tant à cause du but bienfaisant auquel vous destinez cette somme, qu’à raison de la preuve incontestable que vous lui donnez par là de l’intérêt que vous portez à la prospérité de ce pays, qui se félicite, à son tour, de posséder des hommes aussi dignes de l’estime et de la considération dont ils jouissent.

» Par ordre de S. M. j’adresse au directeur de l’hospice de la Miséricorde, dans la lettre dont je vous donne ci-joint copie, les ordres nécessaires pour remplir vos intentions, en le chargeant de faire publier l’exécution que recevra votre généreux don, et de le faire inscrire dans les registres de cet établissement, afin de perpétuer la mémoire d’un acte aussi honorable.

» Dieu vous ait, messieurs, en sa sainte et digne garde.
Au palais de Rio de Janeiro, le 21 octobre 1829.


Signé : marquis d’Aracaty.


« À messieurs Terrisse, Biesterfeld et Ten-Brink. »

Les orphelines que le sort a désignées se nomment Anna-Francisca do Nascimento, Angelica-Maria do Amparo, Alexandrina Roza et Theodora do Bom Successo.


LA JAMAÏQUE. — Journal des hommes de couleur. — Un journal intitulé The Watchman and Jamaica Free Press se publie depuis peu à la Jamaïque. Il est rédigé par des hommes de couleur libres, et a pour but de soutenir publiquement les droits qu’ont les noirs de jouir de tous les priviléges civils et politiques des sujets anglais. Ce journal leur servira d’organe, et si l’on considère que la population de la Jamaïque comprend, outre 300,000 esclaves, 40,000 nègres libres, sachant la plupart lire et écrire, et dont les propriétés sont au moins aussi considérables que celles des 13,000 blancs qui résident dans l’île, on se fera une idée de l’importance que cette publication peut avoir.


LA JAMAÏQUE. Droits politiques accordés aux hommes de couleur. — Dans sa dernière session, l’assemblée législative de la Jamaïque a résolu d’assimiler les nègres et les mulâtres libres aux blancs, sous le rapport des droits électoraux et autres droits politiques ; seulement ils ne seront point admissibles au conseil privé et à l’assemblée législative, qui, dans le gouvernement de l’île, correspondent au parlement anglais. Le but de l’assemblée a sans doute été d’empêcher une révolution qui nous paraît devoir éclater tôt ou tard, surtout depuis la publication du journal dont nous venons de parler.


COLOMBIE. — Nivellement de l’isthme de Panama[2]. — M. Loyd, ingénieur anglais, fut chargé par le général Bolivar d’exécuter le nivellement de l’isthme de Panama, afin de découvrir l’élévation relative de l’Océan Pacifique à Panama et de l’Atlantique à l’embouchure de la Chagre, et d’aviser au meilleur moyen de communication entre les deux mers. M. Loyd se rendit à Panama au mois de mars 1828. et y ayant été joint par le capitaine Falmarc, officier de génie suédois, au service de la Colombie, le 5 mai suivant, ils commencèrent leurs opérations, résolus de ne point se laisser décourager par les obstacles que la saison pluvieuse, qui venait de commencer, semblait devoir y apporter, par les privations personnelles, et par le danger auquel leur santé allait être en butte. Ils relevèrent d’abord le pays entre Panama et Porto-Vèlo, en suivant l’ancienne route, jusqu’au lit de la Chagre, qui va se jeter dans le golfe du Mexique. La hauteur la plus élevée qu’ils eurent à franchir entre ces deux points fut de 633.32 pieds anglais au-dessus de la marée haute à Panama. Se sentant alors incommodés de la pluie, à laquelle ils n’avaient cessé d’être exposés depuis leur départ, ils se construisirent une habitation sur le bord de la Chagre, et discontinuèrent leurs travaux jusqu’au retour de la belle saison. Le 7 février 1829, ils reprirent leurs opérations, à partir d’un point de la rivière situé au-dessous de l’endroit où ils s’étaient arrêtés, à 152.55 pieds au-dessus de la marée haute à Panama, et longèrent le cours de la Chagre jusqu’à la Braja, à 12 milles environ de son embouchure. L’eau de la rivière y était très-saumâtre, et de là à la mer il n’y avait point de courant perceptible. Le résultat des calculs de ces ingénieurs fixe à 3.52 pieds la hauteur moyenne de l’Océan Pacifique à Panama, au-dessous de l’Atlantique à Chagre. La différence entre les plus hautes et les plus basses marées à Panama est de 27.44 pieds ; mais la différence moyenne, dans les grandes marées, est de 21.22 ; à Chagre, elle est de 1.16 pieds seulement, et ne varie à aucune saison de l’année. À l’heure de la marée haute, qui a lieu à peu près en même temps des deux côtés de l’isthme, l’élévation moyenne des eaux au-dessus de leur niveau respectif est donc de 10.61 pieds dans l’Océan Pacifique, et de 0.58 dans l’Atlantique, ce qui donne au premier une élévation de 13.55 pieds au-dessus de l’autre. À eau basse, les deux mers, se trouvant au-dessous de leurs niveaux moyens respectifs, dans la proportion déjà indiquée, l’Océan Pacifique est à 6.51 pieds au-dessous de l’Atlantique. Il en résulte que, dans l’intervalle d’une haute marée à la suivante, le niveau de la mer Pacifique est d’abord plus élevé, ensuite de même hauteur, et enfin plus bas que celui de l’Atlantique, et vice versa.

W…


BUÉNOS-AYRES. — Nouvelles de M. Bonpland. — Une lettre de Buénos-Ayres, sous la date du 14 novembre dernier, contient la nouvelle suivante :

« Le savant Bonpland est enfin libre ; Francia, lassé de le retenir, lui a donné un passeport ; il est maintenant au village de Saint-Borja, aux missions brésiliennes, sur l’Uraguay. Nous l’attendons sous peu à Buénos-Ayres. Il revient avec des collections. »


VALPARAISO. — Tremblement de terre. — Un tremblement de terre, presque aussi violent que celui qu’on a ressenti en 1822, a désolé la ville de Valparaiso, dans la journée du 26 octobre 1829. L’ondulation a duré 20 secondes et a détruit une grande quantité de maisons. Personne n’a perdu la vie ; mais à Saint-Yago, où la secousse a été très-violente, on a eu à déplorer la mort de plusieurs habitans. Le village de Casa-Blanca, qui se trouve à 30 milles de Saint-Yago, a été presque entièrement renversé.


  1. MM. Schiede et Deppe rapportent, dans la description qu’ils donnent à M. de Humboldt de leur ascension au grand volcan d’Orizaba, avoir vu croître la pomme de terre dans un état sauvage, à la hauteur de 10,000 pieds au-dessus du niveau de la mer. La tige avait 3 pouces et demi de long, et portait de grandes fleurs bleues. Les pommes de terre étaient de la grosseur de noisettes.
  2. Voyez le dernier cahier.