Cours d’agriculture (Rozier)/NAIN

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Hôtel Serpente (Tome septièmep. 62-63).
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NAIN, individu qui est d’une taille plus petite que la taille ordinaire. Cette définition s’applique à l’homme, à l’animal & aux plantes. Sous la dénomination de plante, on comprend les arbres, les arbrisseaux, les arbustes, & les plantes ou annuelles ou vivaces, il ne s’agit ici que du règne végétal.

Il y a deux espèces d’arbres nains. La première doit son origine aux loix de la nature que l’on a violées en empêchant, par la taille, un arbre de s’élever suivant sa loi personnelle & individuelle ; tels sont le pommier, l’abricotier, &c. qui livrés à eux-mêmes, forment de grands arbres ; mais, contrariés par la serpette du jardinier, & par la direction forcée de leurs branches, ils ne forment plus que des espaliers, des buissonniers, des mi-tiges. (Voyez ces mots) De tels arbres tendroient sans cesse à reprendre leurs premiers droits, c’est-à-dire, à s’élancer en tiges perpendiculaires, si la main guidée par l’œil vigilant du jardinier ne travailloit sans cesse à les retenir dans la captivité. La forme de ces arbres est donc contre nature, & c’est la raison pour laquelle leur taille devient un art très-difficile, & dont une longue expérience, fondée sur l’observation, a dicté les principes ; de sorte qu’entre le jardinier & l’arbre, & entre l’espalier & le jardinier, il règne, pour ainsi dire, une guerre ouverte. Je te maîtriserai, dit le jardinier en taillant son arbre ; & l’arbre dit au jardinier : Multiplie savamment mes chaînes, sans quoi je reprendrai ma liberté, ou bien je périrai promptement dans la captivité, victime de ton ignorance & de tes faux principes.

La seconde espèce d’arbres nains, est un jeu de la nature, si toutefois on peut le qualifier ainsi. Nous rappelons jeu, ou heureux hasard, ou accident, parce que nous ignorons la marche que la nature a suivie dans ce prétendu écart ; mais je le crois tout aussi naturel dans les arbres nains que dans les arbres qui s’élèvent fort haut. On ne connoît encore que très-peu d’arbres de cette classe : tels sont l’amandier nain à fleur double, à fleur simple, & par conséquent à fruit ; le pêcher nain à fleur double ou simple ; le pommier paradis, &c. On les multiplie par la greffe. Le paradis est formé par les drageons du pied des paradis, mais les arbres nains à noyaux de cette classe, ne peuvent se multiplier ainsi ; ou du moins je n’ai jamais vu des tiges, sortant de leurs racines, bonnes à être replantées. Je ne dis donc pas que cela ne puisse pas être. Quant aux pêchers nains, je sais par expérience que les noyaux de leurs fruits, mis en terre, donnent des pêchers nains ; ou du moins j’ai sous les yeux un semblable pêcher de deux ans, qui n’a pas encore fleuri, mais jusqu’à présent il est en tout semblable à son père.

Ces petites espèces naturelles sont très-agréables dans des jardins de peu d’étendue, elles figurent très-bien dans des vases, dans les plates bandes, &c. à cause de leur très-petite élévation, & de la prodigieuse quantité de fleurs & de fruits dont ils se chargent, le pêcher nain par exemple.

Il est inutile d’entrer ici dans de plus grands détails : consultez les mots Cerisiers, Pêchers, Pommiers, &c. où il est question de ces agréables variétés.