Cours d’agriculture (Rozier)/ACANTHE

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Hôtel Serpente (Tome premierp. 209-210).


ACANTHE, ou Brancursine. (Voyez Planche 5, p. 202) On l’appelle Brancursine, à cause de la ressemblance de ses feuilles avec la patte d’un ours. Acanthus sativus : C. Bauhin. Acanthus mollis. Lin. M. Tournefort la place dans la troisième classe de sa méthode, qui comprend les fleurs personnées ou en masque, terminées dans le bas par un anneau ; & le chevalier Von Linné la classe dans la didynamie angiospermie.

Fleur, monopétale B, personnée en forme de gueule, terminée postérieurement par un anneau ; tubulée, le tube très-court ; point de lèvres supérieures, les étamines en occupent la place ; les quatre étamines sont réunies par leur sommet, & forment par leur réunion la ressemblance exacte d’une vergette D. Le pistil E est placé au fond du tube de la corolle ; il est composé de l’ovaire & du style, qui est terminé par deux stigmates fourchus. Toutes les parties de la fleur sont rassemblées dans un calice C, à six folioles, & d’une structure particulière ; il a deux lèvres adhérentes par leur base : la supérieure est grande & de couleur purpurine ; l’inférieure, étroite à sa base, élargie à son extrémité, & terminée en trois parties aiguës.

Fruit. Capsule en forme de gland F, ovale, pointue, divisée en deux loges G, dont chacune contient une seule graine H, roussâtre, aplatie.

Feuilles. Les radicales sont sinuées, sans épines, embrassent la tige par leur base, & sont luisantes. Les feuilles florales sont découpées de la même manière que les radicales ; elles en diffèrent par leur petitesse & par celle de leur stipule : il semble qu’elles font partie du calice de la fleur.

Racine A, épaisse, charnue, chevelue, noirâtre en dehors, blanchâtre en dedans.

Port. La tige s’élève presque à la hauteur de deux pieds, droite, ferme, cylindrique, terminée par des fleurs en épi ; les feuilles radicales sont couchées par terre.

Lieu : commune en Italie, en Provence, & se cultive dans les jardins ; elle est vivace. Juin, Juillet & Août sont les mois de sa fleuraison, suivant les climats. Elle se plaît à l’ombre & dans les terres sablonneuses.

Propriétés. Toute la plante est remplie d’un suc gluant & mucilagineux ; elle a un goût fade & visqueux : elle est émolliente.

Usages. Les feuilles diminuent médiocrement la sécheresse de la bouche, calment peu la soif fébrile, se digèrent lentement ; & quoi qu’on dise, elles sont très-peu apéritives. Leur usage extérieur est plus utile. En cataplasme, elles calment la douleur & la dureté des tumeurs phlegmoneuses, & les disposent à se changer en abcès. En lavement, elles aident à l’évacuation des matières fécales, ainsi que toutes les plantes relâchantes & mucilagineuses : la racine a à-peu-près les mêmes vertus que les feuilles. Dodonée dit que sa racine peut être employée comme celle de la grande consoude dans le crachement de sang, dans les blessures internes occasionnées par des coups violens ; ce qui demande confirmation. On place l’acanthe parmi les cinq plantes émollientes, qui sont la mauve, la mercuriale, la pariétaire, la bette & l’acanthe.

L’acanthe se multiplie de semences, & par drageons. La semence exige une terre légère, & pousse après six semaines. Dans le mois de Mars, on enlève les drageons aux vieux pieds, & on les replante : ils n’aiment pas la terre trop humide. Cette plante demande à être châtrée de tems en tems, parce qu’elle pousse beaucoup de drageons.

Les anciens se servoient de cette plante pour teindre en jaune.

Tout le monde connoît l’emploi que les architectes ont fait des feuilles d’acanthe dans les chapiteaux de leurs colonnes de l’ordre Corinthien. Les Gaulois ont ensuite représenté l’acanthe épineuse, dont on va parler.