Cours d’agriculture (Rozier)/ASPERULE

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Marchant (Tome onzièmep. 182-183).


ASPERULE, genre de plantes, rangé par Linnæus dans la tétrandrie monogynie, et dans la famille des rubiacées. L’on en connoît environ une douzaine d’espèces toutes herbacées, et presque toutes vivaces.

Caractères du genre. Calice très-petit, supérieur, et à quatre dents ; corolle monopétale, à tube cylindrique, et à limbe divisé en quatre parties recourbées en dehors ; quatre étamines ; ovaire inférieur didyme, style fendu à son sommet.

Fruit. Deux capsules globuleuses et réunies, dans chacune desquelles se trouve une graine presque sphérique.

Feuilles et fleurs. Les premières verticillées, et les secondes en corymbes terminaux ou capillaires.

Racines, traçantes et de couleur de garance.

Lieu. Les terrains légers et sablonneux de l’Europe, soit dans les plaines, soit sur la croupe des montagnes.

Les spérules ne flattant point la vue, ni par leur port, ni par l’agrément de leurs fleurs, n’offrant pas d’ailleurs des propriétés dont l’utilité soit généralement connue, sont presque toujours abandonnées à la nature qui se charge seule du soin de les reproduire, et leur culture ne se rencontre guères que dans les jardins destinés à l’enseignement de la botanique, ou à la réunion des plantes médicinales.

Il est cependant une espèce de ce genre qui peut servir aux arts, et dont l’économie domestique peut tirer des avantages, soit qu’on la recueille dans les endroits où elle croît d’elle-même, soit qu’on la multiplie dans des terrains maigres et ingrats, où d’autres plantes auroient peine à prospérer ; c’est l’aspérule rubéole, que Linnœus a distinguée par la dénomination d’asperula tinctoria. On la nomme vulgairement herbe à l’esquinancie, parce que ses feuilles passent pour un bon remède dans cette maladie.

Les prés secs, les terrains maigres et pierreux, les collines arides, sont les lieux où cette aspérule se plaît. Si elle n’embellit pas un sol peu fertile ou presque nu, du moins elle en adoucit l’âpreté par le tapis serré et d’un beau vert, que forment ses tiges couchées sur la terre, et que des fleurs très-petites, mais très-nombreuses, disposées en faisceaux pédonculés, à quatre divisions, et couleur de rose, émaillent pendant l’été. Ses graines sont mûres en automne, et l’on a remarqué que, conservées au delà de trois ou quatre ans, elles perdent la faculté de germer.

Mais c’est dans les racines de cette plante que réside une propriété utile aux arts, comme aux habitans des campagnes, qui ont souvent besoin d’avoir recours à des moyens simples et peu coûteux pour teindre les différens produits de leur industrie. Il est certain que les racines de l’aspérule rubéole donnent à la laine une aussi belle couleur rouge que la garance. Des expériences faites en Suède ont constaté cette propriété, et voici le procédé qu’indiquent les Mémoires de l’Académie de Stockholm, pour obtenir cette teinture.

Amassez les racines de l’aspérule, avant que les tiges s’allongent ; faites-les bouillir dans de la bière ; la plus aigre est la meilleure, parce qu’elle donne plus de vivacité à la couleur. Après une forte ébullition, trempez le fil de laine dans la liqueur encore chaude, et, en le retirant, refroidissez-le subitement dans une lessive que vous aurez eu soin de tenir toute prête. (S.)