Cours d’agriculture (Rozier)/CABANE

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Hôtel Serpente (Tome secondp. 503-504).
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CABANE. Chétive maison, bâtie ordinairement avec de la bauge, (voyez ce mot) couverte de chaume, & dans laquelle habitent les pauvres gens de la campagne. Si on desire de connoître le tableau de la misère & de l’infortune, que l’on parcoure sur-tout les pays d’élection, ou le malheureux habitant n’ose réparer son logement qui écroule de toutes parts, dans la crainte de voir augmenter ses impositions, & qui, le plus souvent, manque du plus strict nécessaire. Un grabat, ou quelque peu de paille jetée dans un coin, sert de lit au père, à la mère, aux filles & aux garçons : souvent sans draps, ils n’ont, pour se couvrir, que leurs vêtemens ou plutôt leurs haillons. « Qu’ils travaillent, » dit l’homme riche ; & cet homme au cœur d’airain auroit raison, si ces malheureux n’étoient pas éloignés de toutes les ressources. Il n’en est pas des pays de montagnes, des endroits reculés, comme des villes ou des campagnes qui les avoisinent. Une femme, en s’occupant à filer depuis le lever du soleil jusqu’à la nuit close, gagne trois ou quatre sols, & son mari huit à douze ; trop heureux encore, si ce salaire modique étoit assuré ! sur quoi il faut payer les impositions, le prix de la ferme, vivre, nourrir, élever & habiller sa famille, &c. &c. Ô vous ! hommes opulens qui, dans le sein des grandes villes, courez après le plaisir qui vous fuit, & qui achetez son apparence au poids de l’or, vous ne connoissez pas la loi impérieuse du besoin ; mais venez dans ces cabanes, vous y trouverez des hommes pâles, décharnés ; & ils sont presque tous plus officieux, plus charitables que vous, même malgré leur extrême misère, parce que l’indigence est assise à leur porte, & par conséquent ils sentent plus vivement les besoins de leurs semblables, tandis que vous ne soupçonnez pas s’il existe des malheureux ! Actuellement que je vous apprends qu’il en existe, rentrez en vous-mêmes, & demandez-vous : En quoi ai-je mérité de jouir d’un sort plus doux ? Vous consommez plus dans un jour, & souvent dans une heure, que cette famille entière dans une année. Si vous êtes hommes, rougissez de son état. Presque toujours c’est vous qui la réduisez à la misère, en pressurant vos vassaux, en vexant vos fermiers, en attirant à vous & dans la ville tout le produit de la terre. Ces malheureux ont travaillé & moissonné pour vous, & à peine leur laissez-vous de quoi glaner ! On auroit tort de penser que ce tableau est chargé ; je le peins d’après nature, & je dirois à celui qui le jugeroit ainsi : Venez & voyez ; parcourez ces antres, ces espèces de sépulcres où la misère s’est réfugiée ; voyez les malheureux qui les habitent : ils sont plus à plaindre que les animaux confiés à leur soin ; l’animal pâture dans les champs, & son conducteur est sans pain.

Cabane de berger. Il y en a de deux sortes ; l’une portative, & l’autre fixe.

La première est une espèce de très-petite chambre, faite avec des planches, portée sur un charriot à quatre roues, & plus communément à deux, dans laquelle le berger couche à côté du parc où le troupeau est renfermé. Cette demeure mobile change de place, & suit le parc. On la maintient parallèlement, au moyen de deux piquets, l’un placé sur le devant & l’autre sur le derrière : ils tiennent au charriot à l’aide d’une cheville & d’une boucle de fer. Celui de devant sert à tirer & faire rouler la cabane, & l’autre la suit.

La cabane fixe est également en planches, & le plus souvent en pierres. On peut la considérer plutôt comme un abri pour garantir les bergers des pluies & des vents froids. Elles sont assez communes sur les montagnes où les troupeaux sont stationnaires pendant la belle saison.

Cabane de vers à soie. Logement dans lequel ils fixent leur cocon. Elles sont faites avec de la bruyère, ou de la fougère, ou avec le gramen, enfin avec toute espèce de plante rameuse dont on peut plier les petites branches en forme de voûte. (Voyez le mot Ver à soie)