Cours d’agriculture (Rozier)/CHERVI

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Hôtel Serpente (Tome troisièmep. 234-235).


CHERVI. M. Tournefort le place dans la première section de la septième classe, qui comprend les herbes à fleur en rose & en ombelle, dont le calice devient un fruit composé de deux petites semences cannelées, & il l’appelle sisarum germanorum ; M. von Linné le nomme sium sisarum, & le classe dans la pentandrie digynie.

Fleur, en rose, en ombelle, composée de cinq pétales blancs égaux ; le nombre des rayons varie dans les ombelles ; la partielle est plane, étendue ; l’enveloppe générale a plusieurs folioles en forme de lance, plus courtes que l’ombelle.

Fruit, ovale, presque rond, petit, cannelé, se divisant en deux semences convexes d’un côté & cannelées & planes de l’autre ; elles sont d’un blanc grisâtre.

Feuilles. Elles embrassent la tige par leur base ; elles sont ailées, terminées par une impaire, souvent en forme de cœur ; les folioles simples sont entières.

Racine, tubéreuse, ridée, fibreuse, blanche en dedans, roussâtre en dehors ; les tubercules tiennent tous à un collet, en manière de tête.

Port. La tige s’élève communément à la hauteur de deux ou trois pieds dans la première année, & de quatre à six dans la seconde : cette tige est noueuse, cannelée ; l’ombelle naît au sommet, & les feuilles naissent alternativement sur la tige.

Lieu. Cultivée dans les jardins, où elle est vivace ; on la croit originaire de Chine, & elle croît naturellement dans les prés de la haute Provence.

De sa culture. La racine indique l’espèce de terre qui convient à la plante : cette racine pivote, il lui faut un sol bien défoncé & léger.

Dans les provinces méridionales, le chervi demande à être semé dans le mois de février ; en mars, dans celles de l’intérieur du royaume, & au commencement d’avril dans celles du nord.

On sème de deux manières, ou à la volée ou par rayons : je préfère cette dernière, parce qu’elle facilite le serfouage, qui, donné à propos, & assez souvent, fait singulièrement profiter la racine. Il faut souvent arroser ; cette plante aime l’eau, mais non pas le marécage. Je ne suis point de l’avis de certains auteurs, qui prétendent que les mauvaises herbes sont utiles aux plants, jusqu’à ce qu’ils aient acquis de la force ; parce que ces herbes servent de pâture aux insectes, & ils ne touchent pas à la plante : cette assertion est un peu hasardée ; j’ai vu les insectes choisir de préférence ce qu’ils aimoient le plus, & par conséquent les chervis.

Quoiqu’on puisse les replanter, il vaut mieux les laisser dans leurs sillons, & éclaircir suivant le besoin. Cependant la transplantation offre un grand avantage ; elle a lieu communément en avril ou en mai, suivant les provinces. Du collet de la plante, il sort plusieurs tubercules qu’on sépare, qu’on plante, & de chacun il pousse une tige nouvelle : ces filleules devancent les plants venus de semence. Ce que je dis ici paroît contradictoire avec ce que je viens d’avancer ; mais l’expérience m’a prouvé que les chervis non replantés produisoient des racines plus fortes & mieux nourries. On peut, sans inconvénient, replanter les chervis surnuméraires qu’on arrache de terre.

Cette plante, ainsi que je l’ai déjà dit, monte en tige dès la première année ; il convient de couper cette tige, afin de faire grossir les racines : ces tiges sont agréables aux chèvres, aux moutons, aux bœufs, &c.

Pendant les grandes chaleurs, arrosez souvent ; la plante graine dans le mois de septembre pour les pays méridionaux, & par conséquent plus tard en Flandre. La graine de la première année ne vaut pas celle de la seconde ; & autant qu’il est possible, on ne doit semer que celle-là. Après l’avoir cueillie, on l’expose pendant quelques jours au soleil, pour la renfermer ensuite dans un lieu sec, après l’avoir débarrassée de toute immondice : cette graine se conserve pendant trois ans.

Quelques auteurs conseillent de tirer de terre la quantité de chervis qu’on doit consommer dans l’hiver, & de les enterrer dans la serre : cette précaution me paroît superflue, à moins qu’on ne veuille absolument en manger lorsque la terre est couverte de neige, ou resserrée par la gelée.

Qualités. Les racines ont une douceur fade qui les fait dédaigner par plusieurs ; on les regarde comme apéritives & vulnéraires, & elles sont rarement employées en médecine.