Cours d’agriculture (Rozier)/COTON, COTONNIER

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Hôtel Serpente (Tome troisièmep. 499-500).


COTON, COTONNIER. M. Tournefort le place dans la sixième section de la première classe des herbes à fleur d’une seule pièce, & en forme de cloche, dont les étamines sont réunies, & dont le pistil devient un fruit à plusieurs loges ; il l’appelle xilum sive gossipium herbaceum. M. von Linné le nomme gossipium herbaceum, & le classe dans la monaldelphie polyandrie. Comme je n’ai pas cultivé les autres espèces de coton, je me contente de les indiquer.

1°. Coton de la Barbade, à feuilles très-entières, & a trois lobes très-entiers ; sous la côte des feuilles on trouve trois glandes : gossipium barbadense. Lin.

2°. Le coton en arbre a ses feuilles palmées ; les lobes, en fer de lance, la fleur rouge.

3°. Le coton velu a ses feuilles découpées à trois ou à cinq lobes aigus ; sa tige est rameuse & velue, la plante est annuelle.

4°. Coton herbacé. Fleur, en forme de cloche, d’une seule pièce, ouverte, divisée en cinq lobes ; son calice est double, l’extérieur est composé de trois feuilles, comme dans les mauves.

Fruit, pointu dans le haut, formé par une capsule, obronde à quatre loges, à quatre battans, renfermant plusieurs semences ovales, enveloppées d’un duvet qu’on nomme coton ; il est si serré dans chaque loge, qu’après l’en avoir retiré, il seroit impossible de le remettre tout entier dans la même place : le fruit s’ouvre de lui-même par le haut.

Feuilles, découpées en cinq lobes, soutenues par de longs pétioles.

Racine, rameuse.

Port. La tige est herbacée, cylindrique, rameuse ; la fleur naît des aisselles, & les feuilles sont placées alternativement sur les tiges.

Lieu. L’Orient, l’Amérique ; il est annuel.

J’ai semé cette espèce sur couche, à la fin de mars ; elle fut transplantée dès qu’elle eut six feuilles, & le vase placé contre un bon abri ; à la fin du mois d’août, j’ai eu le plaisir de cueillir des fruits bien mûrs, remplis de coton. Je suis convaincu que cette plante, mise en culture réglée, réussiroit très-bien dans la partie de la basse Provence bien abritée ; par exemple, depuis Marseille jusqu’à Nice, ainsi que dans plusieurs endroits du bas Languedoc, & vers Perpignan. Depuis nombre d’années, elle a été naturalisée dans l’île de Malthe, en Sicile, & on la naturaliseroit de même en Corse, sur-tout dans la partie qui avoisine la Sardaigne.

Je ne sais pas, & même je doute que nous puissions, même dans nos provinces, & nos positions les plus méridionales, élever le cotonnier arbre ; cependant on lit dans le Journal éconnomique, année 1765, p. 301, qu’un particulier de Marseille y a semé les graines du cotonnier des Antilles, qu’elles ont produit des arbrisseaux, dont il n’avoit point encore pu en recueillir le fruit. S’il y a un moyen de réussir pour la naturalisation de cet arbre, c’est par les semences ; peut-être réussira-t-on, à la longue, à force de répéter les semis, à l’accoutumer à nos climats.

On lit, dans le supplément du Dictionnaire encyclopédique, au mot cotonnier, que tout terrein convient à ce dernier, dès qu’il est une fois hors de terre ; quand il est parvenu à la hauteur de huit pieds, on lui casse le sommet, & il s’arrondit. On coupe aussi la branche qui a porté son fruit à maturité, afin qu’il renaisse, des principaux troncs, de nouveaux rejetons, sans quoi l’arbrisseau périt en peu de temps : c’est pour la même raison qu’on coupe le tronc tous les trois ans, afin que les nouveaux jets portent un coton plus beau & plus abondant. On choisit pour cela un temps de pluie, afin que les racines donnent plus de pousse. L’arbre donne du coton au bout de six mois : il y a deux récoltes, une d’été, une d’hiver ; la première, qui est la plus abondante & la plus belle, se fait en septembre & en octobre ; l’autre, qui se fait communément en mars, est moins avantageuse, par rapport aux pluies qui salissent le coton, & aux vents qui fatiguent l’arbre.

Pour bien cueillir le coton, un nègre ne doit se servir que de trois doigts ; & pour ce travail, il n’a point besoin que d’un papier, dans lequel il met le coton, qu’on expose ensuite au soleil pendant deux ou trois jours ; après quoi on le met en magasin, prenant garde que les rats ne l’endommagent, car ils en sont fort friands ; on se sert ensuite de moulins à une, deux, quatre passes pour l’éplucher, & pour en séparer la graine, puis on les emballe.

Le cotonnier herbacé se sème dans un champ labouré, & il est bon à couper environ quatre mois après ; on dit qu’il faut arroser la graine avec de l’eau & de la cendre, pour l’empêcher d’être rongée des vers.