Cours d’agriculture (Rozier)/CRESSON

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Hôtel Serpente (Tome troisièmep. 543-546).


CRESSON DE FONTAINE. (Pl. 14, page 487.) M. Tournefort le place dans la quatrième section de la cinquième classe, qui comprend les herbes à fleur de plusieurs pièces régulières, disposées en croix, & dont le pistil devient une silique composée de deux loges, & il l’appèle sisymbrium palustre repens nasturtii folio. M. von Linné le nomme sisymbrium silvestre, & le classe dans le tetradynamie siliqueuse.

Fleur, composée de quatre pétales égaux C, de six étamines D, dont quatre plus longues & deux plus courtes. Le pistil est représenté dans le calice B, également à quatre feuilles égales & ovales. Il est aussi représenté en E.

Fruit F, succède à la fleur ; c’est une silique composée de deux valves partagées par une cloison membraneuse qui s’ouvre de bas en haut G, & renferme des semences H ovoïdes & lisses.

Feuilles, ailées avec une impaire, les folioles en forme de lance & dentées.

Racine A, fibreuse.

Port ; plusieurs tiges longues d’un pied, herbacées, creuses, cannelées, lisses, rameuses, rampantes ; les fleurs blanches au sommet des tiges.

Lieu, les fontaines, les fossés, les ruisseaux ; la plante est vivace & fleurit en juin & juillet ; on peut la cultiver dans les jardins, en la tenant dans un endroit humide.

Propriétés. Les feuilles ont une saveur âcre & une odeur piquante, lorsqu’on les froisse : toute la plante est diurétique, antiscorbutique ; intérieurement apéritive & détersive.

C’est une des meilleures plantes employés en médécine, parce que ses effets ne sont point douteux. Les feuilles font expectorer avec plus de facilité dans l’asthme pituiteux, la toux catarrhale, la phthisie pulmonaire essentielle & commençante ; quelquefois elles contribuent à la détersion de l’ulcère des poumons, lorsqu’il est récent avec peu de fièvre & de toux. Elles guérissent le scorbut & particulièrement le scorbut de mer. Elles sont souvent d’un grand avantage dans les fièvres avec abattement de forces vitales & assoupissement. Elles fortifient l’estomac affoibli par des alimens de mauvaise qualité ; elles échauffent peu ; elles sont rarement utiles aux personnes dont le genre nerveux est irritable. Extérieurement, les feuilles mâchées ou leur suc en gargarisme, raffermissent les gencives, le voile du palais, détergent les ulcères scorbutiques de la bouche & les aphtes.

Usages. L’eau distillée des feuilles est assez inutile ; le sirop de cresson a les mêmes vertus que le suc qu’on donne depuis demi-once jusqu’à quatre onces. Pour faire le sirop, prenez suc exprimé des feuilles, une livre & demie ; remplissez-en les trois quarts d’un matras, que vous boucherez exactement avec une vessie de cochon ; plongez le matras dans de l’eau échauffée graduellement, jusqu’à soixante degrés environ au-dessus de la glace du thermomètre de Réaumur ; laissez refroidir le matras, filtrez le suc à travers le papier gris ; faites fondre au bain-marie, dans une livre de suc ainsi dépuré, deux livres moins trois onces de sucre blanc, & vous aurez le sirop de cresson de fontaine, transparent, d’une couleur verdâtre, d’une odeur piquante, d’une saveur douce & âcre. Sa dose est depuis demi-once jusqu’à une once, seule ou en solution dans cinq onces d’eau.

On donne aux animaux le suc de cresson à la dose de six onces, & les infusions on macérations dans du vinaigre, à la dose d’une poignée sur une demi-livre de cette liqueur.


Cresson des Prés, (Planche 16) de la même classe que le précédent dans les systêmes de MM. Tournefort & von Linné. Le premier l’appelle cardamine pratensis, magno flore purpurascente, & le second, cardamine pratensis.

Fleur, composée de quatre pétales violets & en croix : on en voit un en B ; les étamines sont représentées en C, le pistil en D, & le calice en E.

Fruit. Le pistil devient une silique F, à deux loges remplies de semences presque rondes. Les lames de la silique, lors de sa maturité, se détachent de la membrane du milieu, se roulent en volute, & répandent les semences de part ce d l’autre.

Feuilles. Celles des racines, obrondes, quelquefois dentées, presqu’ailées ; celles des tiges, étroites, alongées.

Racine A, fibreuse.

Port. La tige s’élève du milieu des feuilles de la racine, à la hauteur d’un pied : les fleurs naissent au sommet.

Lieu, les prés, les terreins humides. Elle est vivace, & fleurit en juin & juillet.

Propriétés ; absolument les mêmes que celles du cresson de fontaine.


Cresson alenois ou Cresson des jardins ou Nasitort. M. Tournefort le place dans la seconde section de la cinquième classe, qui comprend les deux plantes précédentes, mais dont le pistil devient une silique courte, & il l’appelle nasturtium hortense vulgarius. M. von Linné le nomme lepidium sativum, & le classe dans la tetradynamie siliculeuse. (Voy. Planche 16, page 544)

Fleur B, composée de quatre pétales C, ovales, terminés par un onglet attaché au fond du calice D, composé de quatre folioles concaves. Le pistil E part du centre de ce calice, ainsi que les six étamines, dont quatre plus grandes, & deux plus courtes.

Fruit F. Le pistil E se change en une silicule obronde, aplatie, partagée en deux loges par une cloison G, à laquelle sont attachées les graines H, ovales & terminées en pointe.

Feuilles, oblongues, à plusieurs découpures, varient souvent dans leur forme, quelquefois ovales ou en forme de lance, dentées au sommet.

Racine A, simple, ligneuse, blanche, garnie de fibres menues.

Lieu, les jardins. On ignore son pays natal : la plante est annuelle, & fleurit en juin & juillet.

Propriétés. La racine est moins âcre que les feuilles ; la plante est détersive, diurétique, emménagogue, incisive, antiscorbutique, sternutatoire. Les feuilles échauffent & irritent plus que celles du cresson ; leur utilité, dans les espèces de maladies où les feuilles du cresson de fontaine sont indiquées, n’est pas aussi complètement démontrée. Le mot nasitort est synonyme avec ceux-ci, herbe qui fait tordre le nez, parce que le nasitort étant mis dans le nez, y excite un mouvement convulsif qui fait éternuer. On dit que ses semences & ses feuilles, mêlées avec du saindoux, sont utiles contre les ulcères sordides, la teigne, la gale, &c.

Aux animaux on donne le suc à la dose de quatre onces, & l’infusion, à la dose d’une poignée dans une livre d’eau.

Culture. Le cresson alenois, & non pas à la noix, comme disent les jardiniers, a produit par la culture plusieurs variétés. La première est à feuilles frisées ; la seconde à feuilles très-frisées, & la troisième à feuilles dorées : elles ne diffèrent que par le coup d’œil.

Dans les provinces méridionales, on le sème en février sur couche ; en mars, mai & octobre, en pleine terre ; dans celles du nord, également sur couche en février, & de quinze en quinze jours, pendant les trois autres saisons. En été, il faut le semer à l’ombre, & le mouiller fréquemment. Dans les provinces du midi, il monte trop facilement en graine, lorsqu’on le sème pendant les mois d’été, quelques précautions que l’on prenne. Il procure une agréable fourniture pour les salades.


Cresson d’Inde. (Voyez Capucine.