Cours d’agriculture (Rozier)/EXOPHTHALMIE

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Hôtel Serpente (Tome quatrièmep. 418-419).


EXOPHTHALMIE. C’est la grosseur contre-nature du globe de l’œil, qui sort, pour ainsi dire, de l’orbite, & que les paupières ne peuvent recouvrir. Cette maladie est toujours accompagnée de violentes douleurs de l’œil & de la tête, de la fièvre, de l’insomnie, & quelquefois du délire. Elle dépend d’un grand nombre de causes ; des corps étrangers introduits dans l’œil, des coups portés sur cet organe, des chutes qui peuvent l’intéresser & y donner naissance. Elle est encore l’effet d’un amas de pus dans l’orbite d’un cancer établi dans cette partie, de l’augmentation de l’humeur vitrée, d’un squirre dans la glande lacrymale, d’une loupe située à la base de l’œil. On l’observe quelquefois à la suite des violens efforts qui ont précédé un accouchement ; l’âcreté des humeurs peut aussi la produire, en déterminant un prompt dépôt d’une humeur chaude, âcre & visqueuse, qui, abreuvant le corps vitré, l’humeur aqueuse, & toutes les parties intérieures du globe, les altère, & souvent les détruit.

La chaleur & l’acrimonie de cette humeur, se manifestent par l’inflammation intérieure de toutes les parties de l’œil, & la douleur qui en résulte. Son abondance & sa viscosité se font connoître par la grosseur, & l’éminence de l’œil, qui n’est rendu tel que par le séjour & le défaut de circulation de cette humeur.

Il paroît que le corps vitré est augmenté outre-mesure, par l’extrême dilatation de la prunelle. Il paroît aussi que l’humeur aqueuse est aussi augmentée par la profondeur & l’éloignement de l’uvée, & par l’éminence de la cornée transparente.

Les indications à remplir dans le traitement de cette maladie se réduisent, 1°. à diminuer le volume du sang & de la lymphe ; 2°. à faire révulsion de l’humeur qui intéresse l’œil ; 3°. à eh corriger l’âcreté.

1°. La saignée du bras doit être pratiquée & répétée suivant les forces du malade, & le degré de l’inflammation. Si elle est insuffisante, on en vient à celle de la jugulaire, à l’application des sangsues à côté de l’œil, ou aux tempes, à celle des vésicatoires derrière les oreilles, ou à la nuque.

L’emploi de ces moyens ne doit pas faire négliger celui des topiques les plus convenables, tels que les cataplasmes émolliens & anodins faits avec la mie de pain & le lait, ou avec la pulpe des pommes cuites & réduites en compote.

On doit laver la partie affectée avec quelque eau légère détersive, toutes les fois qu’on renouvellera les cataplasmes, & sur-tout ceux qui sont préparés avec le lait : la chaleur de l’œil enflammé feroit tourner le lait à l’acide, si on ne les changeoit souvent.

2°. Les saignées du pied, les pédiluves, aiguisés avec de la moutarde en poudre, ou préparés avec une dissolution de savon, rempliront la seconde indication, en détournant l’humeur de la partie malade.

3°. Le régime adoucissant & délayant aidera l’efficacité des remèdes qu’on a déjà prescrits : plus la fièvre sera forte, plus il faudra insister sur la diète & l’usage de rafraîchissans. Les crèmes de riz, nitrées, acidulées ; les bouillons d’herbes ou de mouton, aiguisés du jus d’oseille, la limonade, sont expressément recommandés ; mais on doit proscrire tout aliment salé, épicé, & de haut goût, qui, bien loin d’être utile, augmenteroit l’inflammation sur l’œil, & y détermineroit même la gangrène. M. AM.