Cours d’agriculture (Rozier)/GLANDE

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Hôtel Serpente (Tome cinquièmep. 309-311).
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GLANDE, Botanique. Plus on étudie la nature dans le règne végétal, & plus on trouve à chaque pas de phénomènes intéressans à admirer. La physiologie des plantes nous offre sans cesse de nouvelles observations : c’est un riche fonds d’instruction, en même temps que d’intérêt. La feuille (voyez ce mot) est pour ainsi dire, un individu jouissant en particulier de tout ce qui est nécessaire à la vie : attachée à la plante, elle est nourrie par elle, en même temps qu’elle pompe dans l’atmosphère les sucs propres à former la sève descendante ; elle élabore ceux qu’elle lui fournit, & forme la sécrétion de ceux qu’elle en reçoit. Non-seulement, par le moyen des pores, elle rejette une certaine quantité de sève aqueuse, mais elle est encore chargée de la sécrétion de quelques sucs propres ; elle est garnie d’organes destinés à cet emploi, & ces organes sont les glandes.

Les glandes sont de petites vessies plus ou moins élevées communément sur la surface des feuilles, & quelquefois d’autres parties de la plante. Avant MM. Malpighi & Grew, on les connoissoit peu, & après eux M. Guettard est celui qui les a mieux examinées : nous allons donner un précis de sas observations.

Il distingue sept espèces de glandes ; les milliaires, les vésiculaires, les écailleuses, les globulaires, les lenticulaires, les glandes à godet & les utriculaires.

1°. Les glandes milliaires sont de petits points ramassés & serrés les uns contre les autres, que l’on remarque sur les feuilles de pins & de sapins, & sur les arbres & les plantes de cette classe ; elles forment des lignes longitudinales plus ou moins longues & étroites. Assez ordinairement on voit des glandes lenticulaires avec des milliaires, & dans les feuilles où ces dernières sont rares, les premières sont plus abondantes ; & vice versâ, elles semblent se compenser mutuellement. Le cyprès mâle & femelle, le cyprès de Portugal à petit fruit, le thuya de Théophraste, le cèdre à feuilles de cyprès & à fruit jaunâtre, la sabine ordinaire & la seconde espèce de cyprès, offrent sur leurs feuilles différentes bandes de glandes milliaires, sur-tout le cyprès & le thuya. Elles forment dans les genévriers communs de Virginie, & celui dont les feuilles sont ramassées en bouquet, des bandes de chaque côté de la gouttière de la feuille, composées de six ou sept rangs de ces glandes. Celles de l’if ne sont bien reconnaissables qu’après qu’on a enlevé la matière résineuse qui en suinte. Quoique les feuilles du buis soient fort larges en comparaison de celles des arbres cités plus haut, l’on peut dire qu’elles en ont moins en proportion des autres. Les prêles ou queue de cheval, & les éphedra ont aussi leurs feuilles chargées de glandes milliaires.

Les glandes milliaires jettent une matière très-fine, & ordinairement d’un beau blanc : on en voit la forme, Fig. 11 B & Fig. 12 b. Pour bien entendre ces deux Figures, dans la première on a représenté une feuille chargée de différentes espèces de glandes, & dans la seconde, ces mêmes glandes vues & grossies à la loupe.

1°. Les glandes vésiculaires ont été observées depuis très-long-tems dans les plantes, & on avoit d’abord cru que c’étoit des petits trous dent étoient perforées les feuilles de millepertuis ; car cette plante a pris son nom de ces prétendus trous : mieux examinés, ils n’ont paru que comme de petites vésicules transparentes, qui traversent à la vérité les deux côtés de la feuille. Elles paroissent rougeâtres, en les regardant au transparent ou contre le jour ; mais, dans quelques espèces de millepertuis, elles sont plutôt jaunâtres. Les unes sont chargées de glandes vésiculaires, non-seulement sur les feuilles, mais encore sur les pétioles des feuilles, sur les tiges, les fleurs & leurs pédicules, les calices, le fruit & le bourlet où il est situé. C’est sur ce bourlet où elles sont plus apparentes, & il y en a dans son pourtour dix ou douze logées chacune dans une cavité dont les bords paroissent distincts de ceux de la glande, quoique continus. Ces glandes sont très-visibles à la vue simple, & il n’est pas besoin de loupe pour les distinguer. Les orangers offrent beaucoup de glandes vésiculaires, & il est peu de parties qui n’en contiennent. M. Guettard est porté à croire que c’est par cet organe que s’exhale la douce odeur que répand l’oranger. Les feuilles du myrte, du guajavier, des lysimachies, du mouron, du samolus, des orties, des pariétaires, des figuiers & des mûriers, &c. &c. sont garnies des glandes vésiculaires. Les lettres C de la Fig. 11 & c de la Fig. 12 représentent des glandes vésiculaires, & K, k, les grains qui suintent de ces glandes. L & l représentent quelques vessies qui sortent de certaines glandes vésiculaires : i est une vessie qui a une espèce de pédicule plus long que celle de la Fig. 2 ; celles de la Fig. 3 n’en ont point.

3°. Les glandes écailleuses sont des espèces de petites lames circulaires ou oblongues, que l’on prendroit pour autant de petites écailles, sur-tout lorsqu’on observe les feuilles à la vue simple. Elles diffèrent des glandes vésiculaires en ce que celles-ci ne s’élèvent point au-dessus de la surface des feuilles, des globulaires par leur figure, & parce qu’elles ne sont point renfermées dans une cavité ; des lenticulaires, par leur figure, & parce que les bords des lenticulaires sont continus avec ceux des surfaces où elles se trouvent, & que ceux des écailleuses en sont comme séparés & distincts. On peut voir de ces glandes sur les feuilles de fougères. (Lettres D & d, Fig. 11 & 12).

4°. Les glandes globulaires ressemblent à de petits corps sphériques plus ou moins gros ; on les trouve ordinairement sur les feuilles à fleurs labiées. (Lettres E & e, Fig. 11 & 12).

5°. Les glandes lenticulaires ont, la forme d’une petite lentille ronde ou plutôt oblongue : on les remarque facilement sur les jeunes pousses d’un grand nombre d’arbres ; elles répandent une liqueur visqueuse, une matière blanche, de la térébenthine ; (F & f, Fig. 11 & 12). En G & g, on voit ces mêmes glandes ouvertes.

6°. Les glandes à godet ont été ainsi nommées par M. Guettard, parce que, lorsqu’elles s’ouvrent, elles forment une espèce de petite tasse ou de godet. Elles sont de différentes formes ; il y en a de rondes, d’oblongues, de naviculaires, quelquefois même d’un peu pointues ; d’autres se courbent en portion de cercle ; elles se trouvent ordinairement à la base des feuilles, entre les stipules & l’origine des feuilles, sur le dessus & de chaque côté de la rainure du pédicule de ces feuilles. Les pêchers, les abricotiers, les acacias, les grenadilles, & quantité d’autres plantes en ont de ce genre. On doit même regarder les dentelures & les crénelures d’une infinité de feuilles, comme une espèce de ces glandes ; elles rendent une liqueur claire & sans couleur déterminée. (Lettres III de la Fig. 11).

7°. Les glandes utriculaires. M. Guettard a cru devoir donner ce nom à des espèces d’utricules ou de vessies, dont les feuilles & les tiges de quelques plantes, comme les joubarbes, les réséda, les gaudes, les sicoïdes, les aloès, paroissent abondamment pourvues. Les Lettres H & h, Fig. 11 & 12, représentent ces glandes. On voit en M & m comment quelques grains, qui suintent de certaines glandes, s’arrangent en chaînons ou en chapelets, & en N, du duvet formé par des fils qui suintent pareillement des glandes de plusieurs genres de plantes.

L’usage auquel la nature a destiné ces organes, est la sécrétion de certains sucs qui paroissent ou gommeux ou résineux. Cette sécrétion s’opère par la transpiration, & à ce mot nous examinerons le mécanisme par lequel elle s’opère, & la nature des sucs dont la plante se délivre par cet acte de la végétation. M. M.