Cours d’agriculture (Rozier)/REVERDIR

La bibliothèque libre.
Hôtel Serpente (Tome huitièmep. 597-598).


REVERDIR (ou devenir vert une seconde fois). Dans certaines circonstances, des arbres poussent de nouvelles feuilles ou de nouvelles fleurs, c’est un signe de souffrance ; par exemple, si une sécheresse forte, soutenue, & encore augmentée par la chaleur, dissipe l’humidité & empêche en grande partie la sève de monter des racines aux branches, il est clair que ce peu de sève ne peut plus entretenir la sinovie des articulations formée à la réunion du pétiole & de la branche. (Consultez ce mot) Cette sinovie desséchée, les mamelons qui forment l’articulation se dessèchent à leur tour & occupent moins d’espace, dès-lors ils se déboîtent & la feuille tombe. Dans le cas supposé, il est clair que l’humidité que les feuilles absorbent de l’atmosphère, est en petite quantité, & n’est pas susceptible de les nourrir sans le concours de la sève ; il faut donc qu’elles tombent. Le bouton toujours placé à la base du pétiole, & dont la feuille étoit la nourrice, périt si la sécheresse a lieu au printemps ; il se développe au contraire après la première pluie, lorsque la sécheresse a été tardive. Ce bouton devoit naturellement ne feuiller & ne fleurir que l’année d’après, mais dans le cas présent, il s’épanouit parce que la pluie a redonné de l’activité à la sève, & cette sève agit, comme au premier printemps, sur des boutons qui se trouvent assez formés pour s’épanouir. Cette manière de reverdir est forcée & nuit beaucoup à l’arbre, puisqu’une partie de ses boutons destinés à pousser l’année suivante, dévance l’époque de leur développement & prive l’arbre de ses ressources futures. Les vieux arbres sont beaucoup plus sujets que les autres à ces développemens forcés ; leurs canaux séveux sont beaucoup plus oblitérés que dans les jeunes troncs ; la sève y monte donc avec moins d’impétuosité, moins d’abondance & est plus raffinée ; dès lors les boutons sont plutôt formés & propres à produire des feuilles & des fleurs… On voit souvent les arbres reverdir & fleurir après les grêles. On voit à Orléans, dans la cour d’une des principales auberges, un marronnier d’inde se dépouiller deux fois l’année & refleurir de nouveau. On m’a assuré sur les lieux que la seconde fleuraison étoit constante chaque année. Je l’ai vu chargé de fleurs dans le courant de septembre. À quoi tient ce phénomène annuel ?