Cours d’agriculture (Rozier)/SALICAIRE

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Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 63-64).


SALICAIRE. (Voyez Planche XL, page 689 du Tome VIII). Tournefort la place dans la troisième section de la sixième classe, qui comprend les herbes à fleur de plusieurs pièces, régulière & en rose, dont le pistil devient un fruit divisé en deux capsules ou à deux loges. Il l’appelle salicaria vulgaris purpura. Von-Linné la nomme lythrum salicaria, & la classe dans la dodécandrie monogynie.

Fleur ; en rose composée de quatre à six pétales B, & communément de cinq, alongés & arrondis à l’extrémité, attachés sur un rang à la même hauteur par l’onglet de leur base au haut du tube du calice, comme on le voit dans la figure C, où l’œil a laissé subsister un de ces pétales. La même figure qui représente le calice ouvert, offre les étamines alternatives avec les pétales. Le pistil est place au fond du calice. Toutes les parties de la fleur reposent dans le calice D ; c’est un tube presqu’égal dans sa longueur, divisé à son extrémité en huit à douze dents inégales & terminées en pointe.

Fruit ; le pistil se convertit dans sa maturité en une double capsule ovoïde E, qui se sépare par le sommet ; comme on le voit en F. La seconde capsule G est renfermée dans celle-ci, elle est partagée en deux loges, ainsi qu’on le voit en H, où elle est coupée transversalement, & renferme de nombreuses semences I.

Feuilles ; sans pétioles, très-entières, oblongues, en forme de cœur alongé.

Racine A ; de la grosseur du doigt, ligneuse, blanche.

Lieu ; les saussaies, les fossés. La plante est vivace, & fleurit en juillet, en août &c septembre, suivant les climats.

Port. Les tiges, quelquefois de la hauteur d’un homme, roides, anguleuses, rameuses, rougeâtres, noueuses. Les fleurs naissent en épis colorés en lilas. Les feuilles sont opposées.

Propriétés. Les feuilles & la tige ont une saveur médiocrement amère, & une saveur austère. Les fleurs sont sans odeur. Je réponds, d’après ma propre expérience, de ses bons effets dans les dyssenteries séreuses & épidémiques, & je m’en suis servi avec le plus grand succès dans cette cruelle dyssenterie qui causa tant de ravages en 1779 dans la partie occidentale du royaume. Il est reçu en médecine que le traitement dans ces maladies doit commencer par l’administration de l’ipécacuanha, & même donner cet émétique plusieurs reprises, & faire prendre les remèdes généraux avant de passer aux astringens. Ils furent largement administrés pendant cette épidémie, à laquelle succomba un très-grand nombre d’individus : j’ose assurer que je guéris complètement tous ceux qui se contentèrent de boire la décoction de la salicaire. On fait bouillir une poignée des sommités fleuries & des tiges feuillées dans une pinte d’eau. J’avois éprouvé le même succès 15 ans auparavant dans deux épidémies semblables, qui se firent sentir dans le Lyonnois & dans le bas-Dauphiné.. L’eau distillée de cette plante est estimée contre l’inflammation des yeux. L’eau du Rhône a autant d’efficacité, & produit tout autant d’effet qu’elle.