Cours d’agriculture (Rozier)/STIMULANT

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Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 292-294).


STIMULANS. Médecine rurale. C’est le nom qu’on donne à certains médicamens qui rétablissent le ton des solides, lorsqu’il est diminué ; ils sont indiqués dans la lypotimie, qui arrive toujours lorsque les forces vitales commencent à diminuer, ce qu’on connoît par la foiblesse du poulx, & dans les autres maladies syncopales. Ils sont encore très utiles dans les affections soporeuses, telles que la léthargie, le carus, le coma, & dans l’apoplexie & la paralysie. Les stimulans conviennent encore très-bien dans toutes les maladies aiguës, dans les fièvres où les forces sont extrêmement abbatues, où les humeurs ont acquis un état de coagulation, & où il y a un abbatement universel des forces musculaires & vitales. Il faut encore y avoir recours dans l’ischurie qui reconnoît pour cause des humeurs épaisses qui engorgent les voyes urinaires, ou qui est produite par des glaires, par le relâchement ou la stupeur des reins ou de la vessie, ou par la paralysie de ces organes.

Ils sont donc contre-indiqués toutes les fois qu’il y a une augmentation dans le ton naturel des solides, comme dans les maladies inflammatoires, sur-tout lorsque le poulx est fort dur, serré, piquant & vibratil, & que les tempéramens sont vifs, ardens & bilieux. Mais ce ne sont pas là les seules maladies qui en proscrivent l’usage, il faut bien se garder d’y avoir recours dans les maladies de foiblesse, & sur-tout dans la syncope causée par des douleurs extrêmement vives. Je pense que les stimulans ne feroient qu’augmenter le resserrement universel des vaisseaux, la crispation & le mal. Il en seroit de même dans les maladies spasmodiques, & notament dans la passion hystérique ou hypocondriaque. Il faut au moins, dans ces circonstances, les combiner avec les relâchans, les narcotiques, & les antispasmodiques.

Les trois règnes de la nature nous fournissent ces remèdes.

Ceux qui nous sont donnés par le règne végétal, sont en très-grand nombre. Les plus usités sont les trois sortes de santaux, les racines d’angélique, d’impératrice, de scorsonère de bardane, de reine des prés, de serpentaire de Virginie, de zédoaire, de sneka, les feuilles de chardon béni, de scabieuse, la canelle, le cassia lignea, l’écorce de limon, de citron les clous de gérofle, le macis, la noix, la confection de Kermès, la thériaque, l’opiat de Salomon : le bon vin vieux, le vin d’Alicante, celui de Tinto, &c.

Le règne animal n’est pas aussi abondant ; on ne peut y comprendre que la corne de cerf, la vipère, l’écrevisse, les cloportes, & la chair de tortue. Le bezoard, le lilium de Paracelse, la confection d’Hiacynthe, l’huile de pétrole appartiennent au règne minéral.

Tous ces différens remèdes ne doivent pas être ordonnés ou appliqués indistinctement, il faut connoître & leurs doses, & les différens cas, où ceux tirés des trois règnes doivent être employés de préférence.

On les administre encore sous différentes formes : on en fait flairer certains, on prescrit les autres sous forme de bol, ou d’opiat, ou bien en poudre, délayée dans une suffisante quantité d’une eau analogue, telle que celle de fleurs d’orange ou de mélisse, ou dans du bon vin.

Tandis que l’on fait usage de ces remèdes, il faut avoir égard au genre de maladie qui règne alors, à la nature de la contagion dominante, & aux forces des malades.

D’après toutes ces considérations, il est aise de sentir qu’on ne doit avoir recours aux stimulans, qu’avec beaucoup de circonspection, & que c’est agir contre la raison & l’expérience, comme l’observe très-bien Lieutaud, que d’avoir la témérité d’en faire prendre à toutes sortes de sujets indifféremment, pour se conformer aux désirs des femmes ; & au sentiment du peuple ignorant. M. AMI.