Délicieuses voluptés/04

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(pseudo non identifié)
Éditions de Minuit, 8 rue de Tracy (p. 35-47).
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IV

Ce matin-là, Jacqueline se leva de bonne heure. Elle procéda à sa toilette comme à l’accoutumée, avec seulement un peu plus de coquetterie. Aujourd’hui, lundi, elle ne va pas à la messe. Rien donc ne s’oppose à ce qu’elle mette sa robe claire et ses chaussures basses à talons légèrement élevés.

Elle va et vient dans sa chambre, la douce Jacqueline, nue comme Ève, notre mère sortant de la côte d’Adam. Et comme tous les matins, elle se plante pour s’admirer devant son miroir…

— Jolie, jolie ! Je suis jolie… Colette me l’a dit hier, et elle m’a embrassée dans la voiture.

Et Jacqueline caresse ses seins, ses hanches et son délicieux globe bien bombé.

Elle s’habille rapidement et revient s’asseoir devant la glace. Voilà, elle croise ses jambes l’une au-dessus de l’autre comme elle a vu sa cousine le faire dans la voiture.

Ah ! la robe est trop longue !… Il faut la raccourcir, comme cela…

Et Jacqueline ramène au-dessus de son genou le volant et l’ourlet.

Eh ! bien, ma foi, le spectacle est très bien ! Ses jambes ne sont pas mal du tout ! Pas plus mal que celles de Colette de Verneuse. Et Jacqueline pense que si une autre, ou un autre — pourquoi pas ? — voyait ses jolies jambes ainsi croisées, hardiment, elle — ou il — en serait aussi affolé qu’elle hier dans la vieille voiture devant sa cousine.

Et Jacqueline se sent rougir en même temps que le désir monte en elle, la parcourt toute et la fait frissonner.

Ah ! oui ; elle ne se trompait pas hier : C’est bien là une action contraire à la pureté… Mais, c’est tellement joli… et délicieux.

Un coup discret frappé à la porte. Bien vite, Jacqueline baisse sa robe. C’est Mariette, surprise de voir la petite déjà levée et habillée.

— Je vais vous monter votre petit déjeuner…

— Oh ! non, Mariette, je descend.

La cuisine est toute parfumée par le chocolat bouillant, et une bonne odeur de pain grillé s’y mêle.

— Je vais monter le chocolat de Mademoiselle de Verneuse.

— Oh ! non, Mariette, laisse ! je vais y aller, moi, pour faire une bonne surprise à Colette.

— Oh ! Mademoiselle Jacqueline, vous allez tout renverser dans l’escalier…

— Mais non, mais non, je t’assure !…

Et déjà, mutine et vive, Jacqueline a disparu, emportant le plateau sur lequel sont posés le chocolat onctueux, le pain grillé et le beurre.

Jacqueline est dans l’escalier, et elle se demande pourquoi soudain elle a pris cette décision. Est-il seulement convenable d’aller ainsi surprendre sa cousine, laquelle sûrement est encore au lit ? Elle est maintenant devant la porte, et s’arrête, hésitante.

— Bah ! allons-y… Que craindre ? Colette ne m’a-t-elle pas embrassé hier… Sur les lèvres ?… Et sans plus hésiter, Jacqueline frappe trois petits coups à la porte.

De l’autre côté, une voix langoureuse questionne :

— Qui ??

— C’est moi, Colette, je t’apporte ton chocolat ; tu es réveillée ?

— Mais oui, chérie ! entre.

Jacqueline tourne le bouton, la porte s’ouvre, et… elle pousse un cri de surprise et manque de lâcher le plateau et son contenu.

— Ah !…

Colette est couchée sur le côté, nue entièrement, splendide en ses formes sculpturales.

Elle s’amuse de la surprise de la petite cousine :

— Eh ! bien, Jacqueline chérie… Bonjour ! Pose ce plateau et viens m’embrasser !…

Un subtil parfum voluptueux emplit la chambre, et Jacqueline se sent déjà légèrement grisée ; des yeux, elle dévore la grande cousine, admirant le beau corps nu, les courbes harmonieuses du ventre et des hanches, la croupe hautaine et majestueuse.

— Oh ! Colette, comme tu es belle !…

— Et toi, chérie, comme tu es fraîche et jolie, ce matin !…

Et Colette de Verneuse ouvre ses beaux bras à Jacqueline qui vient s’y blottir. Les deux cousines s’embrassent longuement sur les joues et sur les lèvres…

Mais il semble à Jacqueline que Colette lui pousse la tête pour la faire glisser légèrement. La petite laisse faire, et de fait, voici que ses lèvres se trouvent juste sur les beaux seins de sa cousine. Quoi ? Colette désire-t-elle un baiser là ? Jacqueline n’ose pas tout d’abord, mais elle sent la main de Colette la presser, et les boutons rouges comme des fraises bien mûres se dressent tentateurs.

Jacqueline n’hésite plus, elle pose ses lèvres sur les jolies globes et en baise mignardement les extrémités.

— Oui, oui, chérie, comme cela, embrasse bien !

Longuement, Jacqueline attarde ses lèvres sur la poitrine de Colette, et celle-ci de sa main caresse la nuque de la petite cousine.

Très bien, ma chérie ! À moi, veux-tu ? Tiens, déboutonne ce corsage, montre-moi tes seins, toi aussi…

Et sans attendre la réponse de Jacqueline stupéfaite et affolée complètement, Colette de Verneuse dégrafe, écarte l’étoffe, baisse la chemise en brisant l’un des rubans roses qui la retiennent sur les épaules, et découvre les seins de la petite.

— Oh ! les mignons, donne !…

Alors doucement, Colette se met à son tour, à becqueter les jolis globes de sa cousine, lesquels se dressent sous cette première caresse des lèvres et de la langue. Habilement, la jeune femme les enveloppe de baisers serpentins, depuis la base jusqu’à la fine pointe dressée, qu’elle mordille légèrement.

Jacqueline gémit doucement et se pâme. De grands frissons parcourent tout son corps, et un vertige s’empare d’elle. Tout d’abord, elle ne se rend pas compte de ce qui lui arrive, jusqu’au moment où elle sent la main de la grande cousine qui ne reste nullement inactive et qui glisse en lui frôlant le ventre, les cuisses, la croupe…

Ah ! comme cela est bon ! Et quelle sensation délicieuse ressent-elle ?

— Colette… chérie…

— Eh ! bien, ma petite chatte… Quoi ? tu ne connaissais pas encore l’amour !…

La petite châtelaine est comme ivre de ces premières caresses. Mais c’est bien ce qu’elle désirait et cherchait, et ce que son instinct lui commandait secrètement en lui faisant monter le chocolat de sa cousine.

Elle regarde maintenant avec admiration la splendide nudité de Colette de Verneuse qui va et vient, mutine et gaie dans la chambre.

Et elle pense, la douce Jacqueline, à tant de choses inconnues et mystérieuses, qu’elle désire avec ardeur ! Tout cela, Colette en a certainement une parfaite connaissance. Oui, ce beau corps, ces jolis seins, cette bouche splendide, aux lèvres vermeilles, connaissent l’amour, ont reçu baisers et caresses, et ont tressailli sous des étreintes inconnues d’elle. La jolie cousine a soulevé depuis longtemps le voile transparent qui cache à demi le mystère…

— Colette chérie ?…

— Jacqueline ?…

— Dis-moi, qu’est-ce que la luxure dont parle le catéchisme ?

— Oh ! mon amour, la luxure ! C’est un merveilleux domaine que tu ne connais pas encore et dont tu es bien loin de te figurer les charmes et les folles jouissances. La luxure, vois-tu, chérie, tu as dû certainement passer bien souvent tout près d’elle sans t’en douter ! Mais je viens de t’en ouvrir ce matin, la porte…

— Mais, répondit Jacqueline en riant, c’est moi qui ai ouvert la porte en t’apportant ton petit déjeuner !…

— Oui, chérie, mais je t’appelais de toute ma pensée, de tout mon désir…

— C’est pourquoi je suis venue. Mais, ton chocolat est froid maintenant.

— Peu importe, ma chérie, car je vais le manger, et tu me réchaufferas de tes baisers, encore, tiens, là sur les lèvres, dans le cou, sur les seins, partout…

— Oh ! oui, partout… et plus bas aussi, dis, Colette…

— Non, pour cela, tu attendras ce soir, quand il fera nuit et que nous serons tranquilles nous deux dans ta chambre ou dans la mienne !

— Oh ! Colette…

— Allons, petite chérie, donne-moi mon chocolat… et tes baisers !