De la fréquente Communion.../Partie 1, Chapitre 25

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Chez Antoine Vitté (p. 337-340).

Chapitre 25


la doctrine du concile de Trente touchant la frequente communion.

vous nous avez renvoyez à deux conciles pour apprendre l’intention de l’eglise : mais si je vous ay monstré, que le premier ne contient rien qui vous favorise ; il est encore plus aisé de faire voir, que le dernier vous condemne manifestement. (...). C’est un souhait digne de cette sainte assemblée, animée par le Saint Esprit, que tous les gens de bien font avec elle ; et que vous seul par un aveuglement prodigieux ne faites point en tout vostre escrit, et que vous jugez mesme superflu de faire. Car ce souhait monstre, que la bonne vie est une preparation necessaire pour participer souvent à l’eucharistie, et qu’il faut estre dans la pieté pour aspirer legitimement à ce bon-heur. Mais pour vous, je vous supplie de me faire voir, qu’ayant entrepris de déduire les regles de la frequente communion, et en ayant proposé jusques à dix, vous ayez dit un seul mot de la bonne vie, et de la pieté chrestienne, comme d’une condition necessaire pour communier souvent : ce qui monstre que selon vos maximes, pour desirer que les chrestiens s’approchent souvent de l’autel, il n’est pas besoin de desirer qu’ils vivent en sorte qu’ils meritent cette faveur : mais seulement au plus, que quelque vie qu’ils menent, ils se confessent souvent.

L’autre endroict, que vous rapportez du concile de Trente, ne contient qu’un desir semblable à celuy qu’il avoit fait auparavant ; et que la reconnoissance du peu de disposition de la plus-part des fidelles luy a fait laisser dans les termes d’un simple souhait ; sans passer mesmes jusques à conseiller ce qu’il sçavoit ne se pouvoir bien accomplir que par fort peu de personnes.

Mais il est estrange, avec quelle hardiesse vous avez osé corrompre les paroles sacrées du concile : car il ne dit autre chose en cét endroit, sinon (...). Mais ce que le concile a desiré de restablir autant qu’il se pourroit, est qu’il y eust tousjours des communians à chaque messe, comme Monsieur De Geneve l’a parfaittement bien entendu, en ayant pris sujet de faire cette ordonnance sainte dans ses constitutions. (...). Et c’est ce que des personnes, qu’on accuse par une imposture noire, de condemner la frequente communion, observent religieusement, par un esprit aussi attaché à celuy de l’eglise catholique et universelle qui a parlé dans ce concile, qu’ennemy de division et de partialité. Adjoustons de plus, que les paroles que vous avez retranchées du passage du concile, si on les considere bien, donnent sujet d’en tirer tout le contraire de ce que vous luy faites dire. Car lors que le concile dit, (...) ; il tesmoigne clairement, qu’il ne porte à la communion sacramentale et reelle, que ceux qu’il suppose estre en estat de communier spirituellement : or ceux-là seuls sont en cét estat, selon le concile mesme, (...). Et en effet qu’est-ce autre chose communier en esprit, que d’attirer par l’esprit de Dieu residant en soy la vertu de ce corps divin ; et en un mot, s’unir à Jesus-Christ par l’esprit.

Voyons maintenant si ceux que vous poussez à communier reellement, sont capables seulement de cette communion spirituelle. Demandons à S Paul, qui est celuy qui est uny avec Jesus-Christ et devenu un mesme esprit avec luy ? Et il nous respondra, (...), demeure-t’il attaché à Dieu ? C’est à dire, celuy qui est attaché par un amour extraordinaire au plus grand ennemy de Dieu, demeure-t’il attaché à Dieu par amour ? Ainsi nous voyons, que ceux que vous jugez dignes de participer au sacrifice, ne sont pas seulement dignes d’y assister, et d’ouïr la sainte messe, selon la doctrine du concile ; puis qu’ils ne sont pas en estat de communier spirituellement, et que le concile suppose, que les fidelles qui entendent la messe sont en cét estat.