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Derniers vers (Anna de Noailles)/Que crains-tu de quitter

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QUE CRAINS-TU DE QUITTER…


Que crains-tu de quitter, moribonde enfantine ?
Le temps n’aurait pas su changer ton pas dansant,
Et l’étrange vigueur incluse dans ton sang
Eût fait sonner en toi d’éternelles matines.

Se peut-il que tu sois fidèle à l’univers ?
D’où te viendrait cette humble et coupable constance ?
Ton souffle est emmêlé aux fastes bleus et verts
D’un monde qu’étonnait ta sage turbulence.


Ferme tes larges yeux naïfs et renseignés ;
Sois solitaire enfin comme les nobles îles,
Étends paisiblement tes mains d’aspect fragile,
Mais par qui le destin se sentait empoigné
Et renversait vers toi son front aux fortes franges ;
Et laisse à ce dur sol où souffrent quelques anges
Qui maintiendront le feu dont s’embrasait ton cœur,
Son trop peu de désir et son trop peu d’honneur !