Des hommes sauvages nus féroces et anthropophages/Mœurs et coutumes/10

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Traduction par Henri Ternaux.
Arthus Bertrand (p. 251-253).


CHAPITRE X.


De leur pain, de leurs récoltes et de la manière dont ils préparent leur nourriture.


Quand les Indiens veulent défricher un endroit, ils commencent d’abord par abattre les arbres et par les laisser sécher pendant deux ou trois mois, puis ils y mettent le feu, les laissent brûler sur place, et plantent ensuite dans ce champ la racine qui leur sert de nourriture. Cette plante, nommée mandioka (manioc), a ordinairement une brasse de haut. Quand on veut s’en servir, on la coupe et on en arrache les racines : il suffit d’enfoncer une seule branche dans la terre pour qu’elle reprenne, et au bout de six mois on peut récolter de nouveau.

On emploie cette racine de trois manières différentes. Quelquefois on la coupe en petits morceaux, que l’on écrase sur une pierre. On presse ensuite cette pâte dans une espèce de sac fait d’écorce de palmier, nommé tippiti ; quand elle est sèche on passe la farine au tamis, et on en fait une espèce de gâteau très-mince.

Ils font sécher leur farine et la préparent dans de grands plats de terre. Quelquefois ils placent ces racines dans l’eau, les y laissent jusqu’à ce qu’elles soient macérées, et les font ensuite sécher à la fumée : de cette manière elles se conservent fort longtemps.Quand ils veulent s’en servir, ils les pulvérisent dans une espèce de mortier. La farine que l’on obtient par ce procédé est très-blanche, et se nomme byyer, et les racines ainsi préparées keinrima. Quelquefois ils mêlent à l’ancienne farine du manioc frais. Cette espèce se nomme vythan ; elle se conserve près d’un an : elle est très-bonne à manger.

Ils ont une espèce de farine de viande ou de poisson. Pour la préparer, ils les font sécher au feu ou à la fumée, les brisent en petits morceaux, et les remettent sur le feu dans des pots destinés à cet usage, et nommés ynnepaun ; ensuite ils les réduisent en poudre dans un mortier de bois, et passent cette poudre dans un tamis. Ils conservent ainsi fort longtemps le poisson et la viande, car ils ne savent pas les saler ; ils mêlent cette poudre avec de la farine de manioc, et cela n’a pas mauvais goût.