Des hommes sauvages nus féroces et anthropophages/Relation/46

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Traduction par Henri Ternaux.
Arthus Bertrand (p. 199-200).


CHAPITRE XLVI.


Comment Dieu fit un miracle.


J’avais fait une croix de bois que j’avais plantée devant ma cabane, et j’allais souvent y faire ma prière. J’avais prévenu les sauvages de ne pas la renverser, ou qu’il leur en arriverait malheur : ils méprisèrent mes avertissements. Un jour que j’étais avec eux à la pêche, une femme l’arracha, et la donna à son mari pour polir des coquillages dont les sauvages font des colliers, ce qui me fit beaucoup de peine. Bientôt après il commença à pleuvoir, et cela dura plusieurs jours. Les sauvages vinrent alors me prier d’obtenir de mon Dieu que la pluie cessât, disant que sans cela leurs récoltes seraient perdues, car c’était l’époque des semailles. Je leur répondis qu’ils avaient irrité mon Dieu en arrachant la croix près de laquelle j’avais coutume de dire mes prières. Croyant donc que c’était la cause de la pluie, le fils de mon maître se hâta de m’aider à en fabriquer une autre. Il était alors environ une heure après midi. A peine la croix fut-elle placée, que le temps s’éclaircit, bien qu’il eût fait auparavant un violent orage, ce qui les étonna beaucoup ; et ils s’écrièrent que mon Dieu faisait tout ce que je voulais.