Dharmasindhu, ou Océan des rites religieux/Chapitre XVII

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Dharmasindhu, ou Océan des rites religieux
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux (Tome 7p. 212-223).

CHAPITRE XVII
DESCRIPTION DE LA ONZIÈME TITHI

Il y a deux sortes de jeûnes qui s’appliquent à la onzième Tithi, soit : s’abstenir simplement de toute nourriture prohibée ; et jeûner en rapport avec les vœux sacrificatoires. Le premier jeûne est pratiqué pendant le demi-mois obscur par les personnes telles que maîtres de maison qui ont un fils, etc. ; le jeûne lié à un vœu ne peut pas être observé dans le demi-mois obscur par les maîtres de maison qui ont un fils, encore qu’ils n’aient pas pris la résolution de ce vœu avec des incantations sacrées, néanmoins ils doivent s’abstenir de nourriture suivant en cela la règle du jeûne selon ses forces (voir la règle donnée plus loin dans ce chapitre). Il faut observer la même règle pour la onzième Tithi du demi-mois brillant lorsque la Tithi est nulle (c’est-à-dire, lorsque la Tithi n’a pas de lever de soleil). Mais à la onzième Tithi du demi-mois obscur de tous les mois, depuis la onzième brillante d’Ashâdha jusqu’à la onzième brillante de Kârttika, en commençant par les maîtres de maison qui ont un fils, tout le monde peut accomplir le vœu sacrificatoire de la onzième Tithi. Ceux qui ambitionnent d’être absorbé en Vishnu, ou d’obtenir une longue vie ou une nombreuse postérité peuvent célébrer leur rite de désir dans les deux demi-mois, car il n’y a pas de prohibition à leur égard. Pour les maîtres de maison Vishnuvites, le jeûne de la onzième Tithi du demi-mois obscur est obligatoire. Ce rite de la onzième Tithi est obligatoire pour tous, Shivaites, Vishnuvites, adorateurs du soleil et autres, car il est dit que manquer à l’observer est un péché. Cependant comme en l’accomplissant on gagne la richesse (des fils), etc., ce rite de la onzième Tithi est aussi un rite de désir (c’est-à-dire, un rite qu’on célèbre avec le désir d’obtenir une certaine grâce).

Quelques auteurs disent que, si la onzième Tithi est empiétée par deux ghatikas de la dixième, on doit manger pendant la dixième, et que si la douzième commence avant le lever du soleil suivant, et ainsi se trouve être une Tithi pure, on doit jeûner deux fois sans interruption (c’est-à-dire, une fois pendant la onzième Tithi et une fois) pendant la douzième Tithi. C’est ainsi qu’ils agissent pour la onzième Tithi, mais ce n’est pas légal.

Tout individu âgé de huit à quatre-vingts ans, doit accomplir le vœu de jeûne de la onzième Tithi. Ceux qui ont plus de quatre-vingts ans doivent également jeûner s’ils sont assez robustes.

Si des femmes mariées pratiquent des jeûnes, font des vœux, etc., sans la permission de leur mari, ou de leur père, leurs vœux sont sans résultats, la vie de leur époux est de ce fait racourcie, et elles iront en enfer.

Les personnes délicates peuvent choisir suivant leurs forces une des manières suivantes de jeûner, parmi lesquelles chacune est meilleure que celle qui précède : Manger une fois seulement, de nuit, ne manger que des mets frits dans le beurre, ou du grain non bouilli (c’est-à-dire, préparé sans sel et cuit au four, rôti, etc.), ou des fruits, ou des graines de sésame, ou du lait, ou de l’eau, ou du ghee, ou les cinq produits de la vache[1] ou de l’air ; mais le jeûne de la onzième Tithi ne peut en aucun cas être absolument supprimé.

Si on a oublié le jeûne de la onzième Tithi, il faut faire un vœu sacrificatoire pendant la douzième. Si on manque d’agir ainsi pendant la douzième Tithi, il faut accomplir le rite propitiatoire des bouchées d’après la forme de l’orge[2]. Mais si on a omis le jeûne par infidélité, il faudra accomplir le rite des bouchées d’après la forme d’une fourmi[3]. Une épouse, un fils, un frère, une sœur, etc., peuvent accomplir le jeûne sacrificatoire de la onzième Tithi à la place d’un époux, d’un père, etc., trop faibles, et gagner ainsi le mérite de cent sacrifices.


DESCRIPTION DU JOUR DU VŒU DE JEÛNE DE LA ONZIÈME TITHI

Deux sortes de personnes accomplissent ce rite, les Vishnuvites et les Shivaites.

Règle spéciale aux Vishnuvites

Quoique des auteurs sérieux prétendent que ceux qui portent le signe de consécration à Vishnu (voir note 178) sont Vishnuvites, et que ceux qui ne sont pas sont Shivaites, cependant le Nirnayasindhu dit que les anciens sages enseignent qu’on est Vishnuvite ou Shivaite suivant que les ancêtres l’ont été pendant de nombreuses générations. Cette opinion a été admise et suivie par les savants de tous les pays.

L’empiétement de cette Tithi est aussi de deux sortes, savoir : 1° quand la dixième empiète sur la onzième au moment de l’aurore ; 2° quand elle empiète sur elle au moment du lever du soleil. L’aurore se compose des quatre ghatikas qui précèdent le lever du soleil. Le lever du soleil n’a pas besoin d’explication. Si la dixième Tithi est un peu plus longue que 50 ghatikas et par conséquent empiète sur l’aurore de la onzième, fût-ce seulement d’une minute, c’est un empiétement d’aurore et les Vishnuvites doivent l’observer ; si elle a plus de 60 ghatikas et ainsi empiète sur le lever du soleil de la onzième Tithi, ne fût-ce que d’une seule minute, c’est un empiétement de lever de soleil et les Shivaites doivent l’observer.

Lorsqu’il y a quelque doute sur ces empiétements, soit parce que les astrologues ne s’entendent pas, soit à cause des disputes entre les brâhmanes au sujet de règles contradictoires, il faut négliger la onzième et choisir la douzième pour le jeûne.

La onzième Tithi est de deux sortes, savoir : La Tithi empiétée et la Tithi pure.

Les Vishnuvites doivent rejeter la onzième Tithi quand elle est empiétée à l’aurore par la dixième et jeûner pendant la douzième.

La onzième Tithi pure, dont l’aurore n’est pas empiétée, est elle-même de quatre espèces, savoir : 1° quand la onzième seulement est dépassante, 2° quand la douzième seulement est dépassante ; 3° quand toutes deux (la onzième et la douzième) sont dépassantes ; 4° quand aucune des deux n’est dépassante. L’expression « dépassante » s’applique à la Tithi qui s’étend sur une partie du lever du soleil du jour suivant[4].

Voici des exemples de ces quatre cas : 1° la dixième Tithi dure 55 ghaṭikas (après le lever du soleil), la onzième 60 ghaṭikas et ua pala, et la douzième, moins, soit 58 ghaṭikas ; c’est la onzième Tithi pure qui seule est dépassante, et dans ce cas les Vishnuvites doivent jeûner pendant son second jour et les Shivaites pendant son premier jour ;

2° La dixième Tithi a 55 ghaṭikas, la onzième 58, et la douzième 60 ghaṭikas et 1 pala : ceci est la onzième Tithi pure avec un dépassement de la douzième seule, et dans ce cas les Vishnuvites doivent jeûner pendant la douzième, et les Shivaites pendant le jour précédent ;

3° La dixième a 55 ghaṭikas, la onzième 60 ghaṭikas et i pala, la douzième a (un jour tout entier moins le susdit jjala, plus) 5 ghaṭikas : ceci est la onzième Tithi pure avec un dépassement de la onzième et de la douzième Tithi, et dans ce cas, Vishnuvites et Shivaites doivent jeûner pendant le second jour ;

4° La dixième Tithi a 55 ghaṭikas, la onzième 57, la douzième 58 ; ceci est la onzième Tithi pure sans aucun dépassement ; et dans ce cas les Vishnuvites aussi bien que les Shivaites doivent jeûner pendant son premier jour.


Ainsi est, en abrégé, la règle spéciale pour les Vishnuvites.

Règles pour les Shivaites

Ici, il faut prendre garde que la onzième Tithi est de deux sortes, savoir : lorsque son lever de soleil est empiété et c’est alors une Tithi empiétée, ou lorsqu’elle n’est pas empiétée et c’est alors une Tithi pure.

Chacune de ces deux Tithis a encore quatre subdivisions, savoir : quand la onzième Tithi seulement est dépassante ; quand il y a un double dépassement ; quand la douzième seulement est dépassante ; quand il n’y a aucun dépassement ni un jour ni l’autre. Il y a donc en tout huit espèces de la onzième Tithi, que les exemples suivants serviront à définir :

1° La dixième Tithi a 58 ghatikas, la onzième 60 et 1 pala, la douzième est une Tithi soustractive de 58 ghatikas : ceci est la onzième Tithi pure qui seule est dépassante ;

2° La dixième Tithi a 4 ghatikas, la onzième 2 ghatikas et la douzième est une Tithi soustractive de 58 ghatikas[5] : ceci est la onzième Tithi empiétée qui est seule dépassante.

Lorsque ces deux Tithis se présentent, les Shivaites maîtres de maison, doivent jeûner pendant le jour précédent ; mais les ascètes errants, les maîtres de maison sans désirs[6], les ermites des forêts, les veuves et les Vishnuvites doivent jeûner pendant le jour suivant. Quelques auteurs prétendent que les Shivaites qui désirent plaire à Vishnu doivent jeûner les deux jours ;

3° Cet exemple nous montre la onzième Tithi pure avec un double dépassement : la dixième a 58 ghatikas, la onzième 60 ghatikas et 1 pala, et la douzième a (le reste de ce jour entier, moins le pala ci-dessus compté plus) 4 ghatikas ;

4° Voici une onzième Tithi empiétée avec un double dépassement : la dixième a 2 ghatikas, la onzième a (le reste de ce jour plus) 3 ghatikas du jour suivant, la douzième (le reste de ce jour de la onzième plus) 4 ghatikas ;

Dans chacun de ces deux cas les Vishnuvites aussi bien que les Shivaites doivent jeûner le jour qui renferme la dernière partie de la onzième Tithi ;

5° Voici maintenant une onzième Tithi pure avec un dépassement de la douzième Tithi : la dixième a 58 ghatikas, la onzième a 50, et la douzième 60 ghatikas plus 1 pala. Dans ce cas Mâdhava dit que, parce que c’est une Tithi pure, les Shivaites doivent jeûner la onzième Tithi et non la douzième ; d’un autre côté Hémâdri dit que tous doivent jeûner la douzième, tandis que d’autres auteurs prétendent que ceux-là parmi les Shivaites doivent jeûner la douzième qui souhaitent ardemment l’émancipation finale de la personnalité ;

6° Dans l’exemple suivant nous avons une onzième Tithi empiétée avec dépassement de la douzième : la dixième a 1 ghatika après le lever du soleil, la onzième a 58 ghatikas et est soustractive ; la douzième est une Tithi additive et a 60 ghatikas et 1 pala. Ici la onzième Tithi étant empiétée, les Shivaites doivent jeûner la douzième.

Ainsi les Shivaites doivent négliger la onzième Tithi empiétée quand elle a un double dépassement ou quand la douzième qui suit est dépassante. Dans ces six exemples de onzièmes Tithis avec dépassements, les Vishnuvites doivent négliger la onzième et jeûner la douzième.

7° Exemple d’une onzième Tithi pure sans dépassement ni un jour ni l’autre : la dixième a 57 ghatikas, la onzième 58, la douzième 50. Ici les Shivaites doivent jeûner la onzième Tithi et pas la douzième ; mais les Vishnuvites qui la considèrent comme une Tithi empiétée doivent jeûner la douzième ;

8° Ceci est une onzième Tithi empiétée sans dépassement à aucun jour ; La dixième a 2 ghatikas, la onzième 56 ghatikas, et par conséquent est une Tithi soustractive, la douzième a 55 ghatikas. Ici aussi les Shivaites doivent jeûner la onzième Tithi et les Vishnuvites la douzième. Pour ce dernier cas de la onzième Tithi sans dépassement, il faut agir comme dans les deux premiers de ces huit cas, c’est-à-dire que les ascètes, les veuves, et ceux qui souhaitent l’émancipation de la personnalité doivent jeûner pendant son second jour. Quant aux Shivaites qui désirent aussi plaire à Vishnu, il semble que, d’après les cas analogues, ils doivent jeûner les deux jours[7]. Les savants de notre temps méprisent les règles de l’Hémôdri et ce qu’il enseigne au sujet de la onzième Tithi comme étant une Tithi de non-désir, c’est-à-dire une Tithi pendant laquelle les rites de désir (voir note 168) ne peuvent pas être célébrés, et suivent Mâdhava pour établir les règles générales pour les Shivaites. Nulle part ils ne disent qu’il faille observer deux jeûnes ou qu’en cas d’une onzième Tithi pure avec un dépassement de la douzième tous doivent jeûner le second jour. Qu’il soit donc bien su que dans tous les pavs les règles de Mâdhava l’emportent généralement.

Ainsi ont été décrites et soigneusement expliquées huit formes de la onzième Tithi pour les Vishnuvites et huit sortes pour les Shivaites. De grands ouvrages donnent plus de détails. Si je donnais ici une description plus détaillée et plus d’explications sur chacun des temps ou des règles de la onzième Tithi, cela ne ferait que troubler l’ignorant. J’en ai donc écrit une liste séparée (à la fin de ce livre) qui peut être consultée.

Quand la dixième Tithi s’étend au delà de minuit, c’est ce qu’on appelle l’empiètement du crâne[8] quand elle a 52 ghatikas, c’est l’empiétement de l’ombre ; quand elle a 53 ghatikas, c’est ce qu’on appelle l’empiétement avalant ; quand elle a 54 ghatikas, c’est l’empiétement complet ; quand elle a 55 ghatikas, on dit que c’est le sur-empiétement ; quand elle a 56 ghatikas, c’est le grand empiétement ; quand elle a 57 ghatikas, c’est l’empiétement destructeur ; quand elle en a 58 l’empiétement grandement destructeur ; quand elle en a 59 l’empiétement terrrible et quand elle en a 60 l’empiétement monstre. Ces distinctions de l’empiétement ont été faites par Nârada et quelques-unes d’entre elles sont observées par beaucoup de disciples du système de Madhu et d’autres. Mâdhavâchârya, aussi bien que tous les autres auteurs, reconnaît que quand la dixième Tithi a cinquante-six ghatikas c’est un empiètement. Lorsque la dixième Tithi empiète sur la onzième de quinze ghatikas, le vœu sacrificatoire doit être accompli sans jeûne. Cependant il faut remarquer qu’on ne doit pas négliger absolument les rites qui accompagnent le jeûne sacrificatoire, tels que la résolution[9] et l’adoration, lors même que la onzième Tithi est empiétée, mais il faut les accomplir au milieu du jour au lieu du matin.

MANIÈRE DE FAIRE LE JEUNE SACRIFICATOIRE

Au matin du jour qui précède le jeûne, après avoir célébré les rites obligatoires, il faut prononcer la résolution suivante ; « Commençant avec la dixième Tithi, j’accomplirai un jeune sacrificatoire de trois jours. Ô Dieu ! Ô Maître des dieux ! Ô Krishna ! Ecarte tous les obstacles ». Alors on doit manger au temps du milieu du jour le repas d’un repas par jour. Quand il s’agit de ce repas on doit éviter de manger dans des vases de bronze, de manger de la viande, des lentilles Cicer, de dormir pendant le jour, de manger beaucoup, de boire beaucoup d’eau, de manger plus d’une fois dans le jour, les rapports sexuels, le miel, de dire des mensonges ; les pois, le grain Paspalun, les légumes, la nourriture d’un autre homme, de jouer avec enjeux, les gâteaux à l’huile de sésame, le pan-supāri, etc. Pendant le temps de ce rite (de la dixième) on doit nettoyer ses dents avec une brindille (voir note 86), et pendant la nuit dormir sur le sol ; mais au matin de la onzième Tithi, on doit se laver les dents avec des feuilles et pas avec une brindille. Puis après s’être baigné et avoir célébré les rites obligatoires habituels, on doit prendre dans sa main de l’herbe de Darbha, tourner son visage vers le nord, tenir un vase de cuivre rempli d’eau et exprimer la résolution suivante : « Ayant jeûné la dixième, je mangerai demain, ô Vishnu aux yeux de Lotus ! Protège-moi, ô Immortel ! » et répandre deux poignées de fleurs sur l’image de Vishnu.

Les personnes qui ne sont pas fortes peuvent, suivant leur force, prononcer la résolution suivante : « Pendant la onzième je ne prendrai que de l’eau », ou, « pendant la onzième je ne prendrai que des fruits », ou, « pendant la onzième je ne mangerai qu’une fois », etc. Les Shivaites doivent prononcer avec la résolution l’incantation de Rudra[10], les adorateurs du soleil l’incantation Gāyatri habituelles[11].

Quand la dixième Tithi s’étend au delà du lever du soleil, les Shivaites doivent prononcer la résolution dans la nuit de la onzième Tithi. Si la dixième dépasse minuit, toutes les sectes doivent prononcer la résolution après le temps du midi de la onzième Tithi. Après avoir prononcé la résolution, il faut consacrer un peu d’eau en répétant trois lois l’incantation appelée la « Gâyatri de huit syllabes »[12] et boire cette eau. Ensuite, avant fait une tente de fleurs (pour l’idole) on doit adorer Vishnu avec des fleurs, des épices odorantes, du ghee, des lampions allumés, des offrandes de comestibles de première qualité, des chants agréables, des hymnes divins et une belle musique, en se prosternant à plat ventre avec de grandes exclamations, et en demeurant éveillé pendant toute la nuit ordonnée par la loi.


RÈGLES À OBSERVER LORSQU’IL S’AGIT DE LA ONZIÈME TITHI

On ne doit ni parler, ni regarder, ni toucher un hérétique ; il faut s’abstenir de relations sexuelles, dire la vérité, ne pas dormir pendant le jour ot observer les règles données dans les explications précédentes. Si par hasard quelqu’un voit un hérétique, qu’il regarde le soleil et qu’il soit pur ! Si un homme mur a sciemment touché un hérétique, qu’il se baigne, qu ’il regarde le soleil et qu’il soit pur ! S’il lui a parlé, qu’il médite sur Vishnu purificateur, ou qu’il accomplisse d’autres rites et qu’il soit pur !

Si les rites sacrificatoires pour les mânes des ancêtres tombent en un jour de jeûne, la nourriture qui reste après que le rite est accompli, doit être recueillie dans un vase, puis on doit la sentir et la donner aux vaches ou à quelque autre (bétail). Si quelqu’un, par voie de substitution, observe nominalement le jeûne en ne mangeant que des oignons, des racines, des fruits, etc., qu’il distribue d’abord ces oignons, racines, fruits, etc., sur les assiettes des Brahmanes qui tiennent la place de ses ancêtres et qu’il mange ensuite ce qui reste. Le texte suivant s’applique aux Vishnuvites et s’accorde avec leurs coutumes : « roi, quand les rites sacrificatoires pour les mânes des ancêtres tombent à la onzième Tithi, il faut passer ce jour et accomplir le rite à la douzième Tithi. » Au temps du demi-mois auquel doivent être célébrés les 16 rites Mahalaya[13] pour les ancêtres décédés les Vishnuvites doivent prononcer la résolution suivante : « Je célébrerai le Mahalaya de la onzième et celui de la douzième (en un seul joui) au moyen d’un expédient, » et alors les accomplir tous deux à la douzième.

Quand le rite de purification pour l’impureté d’un accouchement ou d’une mort se présente pendant le temps d’un jeûne de désir, il faut accomplir soi-même les rites corporels (tel que le jeûne par exemple) et à la fin du rite de purification accomplir l’adoration, le rite de donation à un Brahmane et lui donner un repas.

Quand le rite de purification de l’impureté d’accouchement ou de mort se présente pendant le temps d’un jeûne obligatoire usuel, on doit se baigner, adorer Vishnu et jeûner soi-même, mais le culte sacrificatoire, etc., peut être célébré par un brahmane remplaçant. Le rite de donation peut être supprimé et peut ne pas être accompli à la fia du rite de purification.

La même règle s’applique pour le rite de purification de la menstruation.

Au matin de la douzième, après avoir accompli l’adoration obligatoire habituelle, on doit célébrer le rite sacrificatoire à Vishnu en prononçant l’incantation suivante : « Par le mérite de ce rite sacrificatoire, ô Vishnu ! sois compatissant pour celui qui est aveuglé par les ténèbres de l’ignorance ; donne-lui la vue de la connaissance^ ô toi qui as un beau visage ! »

Si les règles qui s’appliquent à la dixième et aux deux Tithis suivantes ont été négligées, si on a dormi pendant le jour, ou bu beaucoup d’eau, ou menti, on doit avouer (et confesser) la règle transgressée et répéter 108 fois l’incantation de Huit Lettres (voir note 141) à Vishnu. Si la transgression est de peu d’importance, on doit répéter 300 fois le nom d’un dieu.

Si, pendant le temps de la célébration d’un rite sacrificatoire, on entend la voix d’une personne impure par menstruation, ou celle d’un homme de basse caste, ou d’un laveur, ou d’une personne impure par le fait d’un accouchement ou de mort, il faut répéter 1008 incantations Gāyatri (voir note 98), après quoi il faut manger un repas complémentaire composé de comestibles offerts, mêlés des feuilles de l’arbuste Tulasi. Manger des myrobolans pendant le Rite du repas complémentaire détruit le péché qui vient de parler (à des gens à qui on ne doit pas parler, ou à des moments où l’on ne devrait pas parler). Ce jeûne du Rite du repas complémentaire doit être accompli à la douzième, parce que c’est un grand péché de négliger de faire ainsi au moment de cette Tithi.

Quand la douzième Tithi commence seulement un peu après le lever du soleil (et qu’ainsi il n’y a plus assez de temps) pour les rites de cette Tithi qui devraient être accomplis avant midi, alors il faut anticiper et célébrer ces rites pendant la dernière partie de la nuit. Cependant, certains auteurs disent que l’offrande du matin au Feu ne devrait pas être avancée. Les rites sacrificatoires pour les mânes des ancêtres étant interdits pendant la nuit, ils ne peuvent donc pas être avancés. Dans un moment de grande tribulation ou à l’époque des rites des ancêtres décédés, ou du rite Pradosha (voir note 114) le Rite du repas complémentaire (de la douzième) doit s’accomplir en buvant seulement de l’eau. Lorsqu’il reste une grande partie de la douzième Tithi après le lever du soleil, il faut alors laisser écouler la première partie du jour qui est appelée Harivasara, et remettre à plus tard le Rite du repas complémentaire.

Quand la douzième n’empiète pas — même d’un seul Pala — sur le lever du soleil, le Rite du repas complémentaire doit être accompli à la treizième.

Plusieurs auteurs disent que lorsque la douzième s’étend au-delà du temps de midi, le Rite du repas complémentaire doit avoir lieu pendant les premières six ghatikas du matin, et non au temps de midi ni dans l’après-midi ; mais d’autres disent que lorsqu’il y a une difficulté de temps pour le grand nombre des rites, il peut être célébré dans l’après-midi.

Quand la lune est en conjonction avec la constellation Shravana (voir note 25) au moment de la douzième Tithi du demi-mois brillant ou obscur, celui qui est assez robuste doit jeûner pendant la onzième et la douzième Tithi ; celui qui n’est pas assez fort peut observer nominalement le jeûne de la onzième en ne mangeant que des fruits (oignons), etc., et jeûner pendant la douzième, qui est en conjonction avec Shravana.

Lorsque la conjonction appelée Shrinkhala de Vishnu[14] arrive pendant la onzième Tithi, il faut observer pendant la onzième le jeûne ordonné pour la douzième quand elle est en conjonction avec Shravrana, et le Rite du repas complémentaire doit avoir lieu en ce jour de la douzième durant lequel la lune n'est plus en conjonction avec Shravana. Mais si la conjonction avec Shravana ne dure seulement qu'un temps très court (du premier jour) de la douzième, le Rite du repas complémentaire peut être célébré ce jour-là parce que c'est péché que de manquer à accomplir ce rite pendant la douzième Tithi.

Voici la règle relative à la conjonction appelée Shrinkhala de Visbnu, dans le mois de Bliâdrapada à la douzième Tithi : Il faut s'abstenir pendant la douzième Tithi des huit choses suivantes : Dormir pendant le jour, manger la nourriture d'un autre homme, manger plus d'une fois, relations sexuelles, miel, manger dans des vases de bronze, viande et choses huileuses. En ce temps il faut aussi s'abstenir de : Jeu avec enjeux, colère, pois, graines de Paspalum, la plante légumineuse Phraseolus, graines de Sésame, farine, lentilles Ervum, Collyrium, mentir, convoitise, fatigue, voyage, fardeau, études, Pan-Supâri, etc.

Toutes ces règles doivent être observées relativement aux Rites de désir.

En ce qui concerne les rites obligatoires usuels ces règles spéciales doivent être observées par ceux qui sont assez robustes pour le faire. Si on n'est pas assez fort pour pratiquer ces règles spéciales, qu'on jeûne un jour et une nuit seulement, car il n'y a pas de doute que celui qui maîtrise ses sens, qui croit et se confie en Vishnu, se purifie de ses péchés par le seul fait de jeûner pendant la douzième Tithi.

Celui qui dit à un autre « mange ! » et celui qui lui-même mange pendant un jour de jeûne iront tous deux en enfer ; mais par l'accomplissement du jeûne sacrificatoire de la onzième Tithi ou est assimilé à Vishnu et on gagne l'opulence.

Ceci est la description du jeûne sacrificatoire de la onzième.

Pour les autres rites de la onzième Tithi, il faut prendre le jour où la onzième et la douzième se rencontrent.

Tel est le dix-septième chapitre, description de la onzième Tithi.


  1. C’est-à-dire, le lait pur, le lait caillé, le beurre, l’urine et la bouse de vache.
  2. En ce qui concerne ces bouchées voir la note 110 ; i< d’après la forme de l’orge » signifie qu’on doit très peu manger au commencement et à la fin du jeune, tandis qu’au milieu il est permis de prendre une plus grande quantité de nourriture, parce que le grain d’orge est épais au milieu et mince à ses extrémités. Ce jeune, qui dure un mois, commence en ne mangeant qu’une seule boule de riz le premier jour, puis le nombre des boules augmentant chaque jour, on arrive à quinze boules au milieu du mois ; alors le jeûne se complète en supprimant une boule par jour jusqu’à ce qu’on arrive à une seule à son dernier jour.
  3. Dans ce cas-ci, il est permis de prendre une plus grande quantité d’aliments au commencement et à la fin du jeune, tandis qu’on n’en doit prendre que très peu au milieu ; c’est la forme d’une fourmi qui est grosse à ses deux extrémités et mince au milieu du corps. Au sujet du nombre quotidien des bouchées et de leur diminution ou augmentation pendant ce jeûne, qui dure un mois, voir note 110.
  4. Et qui a ainsi plus de soixante ghaṭikas, nombre de ghaṭikas qui constitue une Tithi complète.
  5. La Tithi soustractive est celle qui a moins de soixante ghatikas, ne renferme aucun lever de soleil et par conséquent, n’est pas comptée pour une date dans le calendrier. Ses ghatikas s’ajoutent à celles de la Tithi précédente.
  6. C’est-à-dire, les maîtres de maison qui, ayant des fils, possédant des richesses, etc., ne célèbrent pas de sacrifices de désir.
  7. Un jeûne pour Shiva et l’autre pour Vishnu.
  8. Minuit est considéré comme la partie la plus élevée de la nuit de même que le crâne est la partie la plus élevée du corps humain. Tous les noms qui suivent, donnés aux empiétements sont figuratifs de l’importance du nombre des ghatikas de la Tithi.
  9. Au sujet de cette résolution se reporter aux notes 27 et 87.
  10. Voici les termes de l’incantation de Rudra :

    Om tatpitrvshiiya vidmahe, mahudevāya dhîmahi.
    Tan no Rudrah pracodayāt.

    Connaissons cet Être suprême, méditons sur ce grand dieu.
    Que Rudra nous illumine !

  11. Voir note 98.
  12. Voici les termes de l’incantation de huit syllabes :

    Om namo Vasudevāya !
    Gloire à Vasudeva !

  13. Ces seize rites se célèbrent dans la seconde moitié du mois de Bhādrapada, et commencent le jour de la pleine lune.
  14. Voici en quoi consiste cette conjonction : la onzième Tithi est empiétée par la douzième qui elle-même se prolonge de quelques ghatikas après le lever de soleil du jour suivant, et ces deux jours se trouvent en conjonction avec Shravana.