Dictionnaire apologétique de la foi catholique/Amulette

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Dictionnaire apologétique de la foi catholique
Texte établi par Adhémar d’AlèsG. Beauchesne (Tome 1 – de « Agnosticisme » à « Fin du monde »p. 70).
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AMULETTE. — En latin amidetum. Morborinn lemedid, 'eneficiurum amaletn, lit-on dans Pline (H, N., XXIX, 4, 19.) Et encore : lieligiosum id gestamen amoliendis periculis arbilrantur, ils pensent que c’est une amulette excellente pour écarter les périls (H. N., XXXII, 2, II.)

L’amulette est un petit objet que l’on porte sur soi et auquel on attribue la vertu secrète, immanente et inconsciente, de préserver des maladies, des accidents, des maléfices, ou de procurer chance et bonheur en ménage, au jeu, en affaires, en voyage, à la guerre, à la chasse, etc. Il y en a de toutes les formes et pour tous les cas. Le mot gri-gri, emprunté aux langues de la Côte occidentale d’Afrique, a le même sens.

— Le talisman (de l’ar. telsam, figure magique) est plutôt un objet marqué de signes cabalistiques et destiné à exercer une action déterminée sur les choses ou les événements pour en changer la nature ou le cours : on ne le porte pas nécessairement siu- soi. — Le fétiche est autre chose : il est conscient, et tire sa force de lui-même par suite de l’esprit qui est censé l’habiter ou y exei-cer son action. — L’usage de l’amulette paraît avoir été général dans l’humanité. On en trouve des traces dans les tombeaux préhistoriques, dans les civilisations antiques de la Chaldée, de la Phénicie, de l’Egypte, de la Grèce, de Rome, parmi les populations dites fétichistes de l’Afrique, de l’Océanie, de l’Amérique, etc., même chez les peuples modernes les plus civilisés et dans les milieux les plus dégagés de toute influence religieuse, non seulement en Arabie et dans le inonde musulman, dans l’Inde, en Chine et au Japon, mais à Paris, à >faples, à Berlin, à Londres, à New-York, etc., où l’on fabrique de véritables amulettes ou « porte-bonheur ». En ce moment, par exemple, le trèfle à quatre feuilles, le fer à cheval et la statuette « Argine » sont particulièrement en faveur… Une pratique aussi générale paraît venir du désir qu’on a d'éviter le mal et d'être heureux, et s’appuyer sur l’idée, juste au fond mais erronée dans son application, qu’il y a dans la nature des vertus secrètes inhérentes à certains produits et à certains objets, et qu’on peut les faire servir à ses intérêts.

L’Eglise catholique a toujours défendu aux fidèles, comme superstitieux, l’usage des amulettes et des talismans. Le concile d’Elvire (305) s'élève même contre la trop grande extension des représentations et des images religieuses : Ae qiiod colitiir et adoratur in parletibiis depingatur. Un décret de Laodicée (iv* s.) menace de destitution tout clerc qui fabrique des phylactères. Un concile de Rome, sous Grégoire IL les condamne solennellement. Malgré cette réprobation constante, on n’a pas manqué de faire à l’Eglise et aux catholiques le reproche de rétablir les amulettes dans l’usage des médailles, des croix, des Agnus Dei, des divers objets bénits. C’est une pure confusion. La vertu de l’objet bénit, en effet, ne vient ni de lui-même ni d’une autorité mystérieuse et impuissante, comme dans l’amulette, mais de Dieu seul. Dieu seul a le pouvoir d’attacher telle grâce qu’il lui plaît à tel signe sensible qui lui est présenté. En lui demandant de le faire, par l’invocation du nom de Jésus, par le signe de la croix, par diverses prières, l’Eglise, agissant par l’autorité qu’elle tient de son Fondateur, place d’abord cet objet dans la catégorie des choses sacrées, et montre que la vertu ou l’effet qu’on en peut espérer doit être uniquement attendu de la puissance divine. Le signe sensible n’est ici, pour l’homme, qu’un moyen de se reporter à Dieu. En nous le proposant, l’Eglise catholique satisfait au besoin instinctif de notre nature, tout en respectant l’ordi’e et la vérité.

A. Le Roy, évêque d’Alinda.