Dictionnaire d’architecture civile et hydraulique/Base

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BASE, ſ. f. On entend par ce mot (tiré du grec Baſis, appui ou ſoutien) en général tout corps qui en porte un autre avec empattement ; mais particulierement la partie inférieure de la colonne & du piédeſtal. On nomme auſſi la Baſe de la colonne ſpire, du latin ſpira, qui ſignifie une ligne qui ſerpente ; & c’eſt la figure de cette Baſe. Comme les colonnes, elle a ſes dimenſions & ſes ornemens particuliers.

Baſe de l’Ordre Toſcan. Dans la colonne, cette Baſe, qui n’a qu’un tore, comprend le filet du bas du fuſt de la colonne elle a la hauteur d’un demi-diametre ou d’un petit module & demi, & elle ſe diviſe en deux parties, dont une eſt pour le plinthe. L’autre partie étant diviſée en cinq parties, on en donne quatre au tore & une au filet. A l’égard de la Baſe du piédeſtal, elle eſt formée du ſocle & des moulures de la Baſe de la colonne.

Baſe Dorique. Suivant les Architectes modernes, la Baſe de la colonne de cet Ordre ne doit avoir qu’un aſtragale de plus que la Baſe Toſcane. Mais Vitruve ne donne point de Baſe à cette colonne, & il établit la différence entre l’Ordre Ionique & l’Ordre Dorique, en ce que celui ci n’a point de Baſe. C’eſt ainſi qu’on l’a pratiqué au théâtre de Marcellus. Cependant au Coliſée l’Ordre Dorique a une Baſe. Ainſi il y a trois ſentimens ſur la Baſe de la colonne de l’Ordre Dorique. Le premier, qui eſt de Vitruve, eſt que cette colonne n’a point de Baſe proprement dite, mais une ſorte de Baſe qu’il nomme Attique, & qui a un plinthe, un grand tore en bas, un petit en haut, & une ſcotie entre deux. Le ſecond ſentiment, fondé ſur l’autorité du Coliſée, eſt que l’Ordre Dorique doit avoir une Baſe ſans tore ni ſcotie, & faite ſeulement en maniere de doucine raccourcie & peu ſalliante entre l’orle du bas de la tige de la colonne & le grand tore. Le troiſiéme ſentiment eſt celui des modernes, qui admet à la colonne Dorique la Baſe que nous avons définie.

La Baſe du piédeſtal de cet Ordre a la quatriéme partie de tout le piédeſtal. On la diviſe en trois parties, & une de ces parties en ſept, dont on donne quatre a un tore qui eſt ſur le ſocle, trois à un cavet y compris ſon filet en-deſſous ; ce qui fait les trois moulures dont cette Baſe eſt compoſée, ſelon preſque tous les Architectes qui ſuivent aujourd’hui Vignole. Car Palladio lui donne un quatriéme membre, qui eſt un filet mis entre le tore & le filet du cavet ; & Scamozzi y met une doucine.

Baſe Ionique. Nous diſtinguerons ici, comme nous l’avons fait dans les autres articles, la Baſe de la colonne & celle du piédeſtal. La premiere eſt compoſée d’un gros tore ſur deux foibles ſcoties ſéparées par deux aſtragales qui ſe proportionnent ainſi : on diviſe toute la hauteur de la Baſe en trois, dont on en donne une au plinthe. Le reſte étant partagé en ſept parties, on en donne trois au tore qui eſt au haut de la Baſe. On partage encore en deux ce qui reſte de la Baſe, & on diviſe chacune de ces deux parties en dix autres, dont on donne deux à un filet qui eſt ſous le tore, cinq à une ſcotie, une à l’autre filet de la ſcotie, deux à un aſtragale qui eſt accompagné d’un autre aſtragale pareil, & d’une autre ſcotie auſſi pareille a la première, avec les mêmes filets, le grand filet étant ſur le plinthe. Ces proportions ſont de Vitruve, & elles ſont adoptées par les Architectes. (Voyez l’Ordonnance des cinq eſpéces de colonnes, ſeconde part. pag. 57.)

La Baſe du piédeſtal de l’Ordre Ionique eſt formée de quatre moulures : une doucine avec ſon filet, & un cavet avec ſon filet en-deſſous. Pour avoir les hauteurs de ces moulures, on diviſe le tiers de la Baſe en huit parties qu’on diſtribue ainſi : quatre à la doucine & une à ſon filet, deux au cavet & une à ſon filet.

Baſe Corinthienne. La Baſe de la colonne dans cet Ordre, a deux tores, deux aſtragales, & deux ſcoties. Quoique rien ne ſoit plus varié que les proportions que les anciens & les modernes Architectes donnent à cette Baſe, il ſemble que la proportion la plus approuvée eſt celle-ci. On donne au plinthe le quart du demi-diametre de la colonne qui fait la hauteur de toute la Baſe. La quatriéme partie de ce qui reſte eſt pour la hauteur du tore d’en-bas ; la quatriéme du reſtant eſt pour la hauteur du tore d’en-haut ; ce qui reſte encore eſt pour les aſtragales du milieu qui ont chacun la moitié de cette quatriéme partie ; le quart de ce qui reſte entre chaque tore & chaque aſtragale, eſt pour le gros filet de la ſcotie, lequel doit toucher à chaque tore ; enfin le quart de ce qui reſte eſt pour le petit filet qui doit toucher à l’aſtragale, & le dernier reſte eſt pour la ſcotie.

Un tore, une doucine avec ſon filet, & un talon avec ſon filet en-deſſous, forment la Baſe du piédeſtal dont ils ſont la quatriéme partie. Après avoir donné au ſocle de la Baſe les deux tiers de cette même baſe, on partage l’autre tiers en neuf parties, dont on donne deux & demie au tore, trois & demie à la doucine (la demie eſt pour le filet), deux & demie au talon, & une demie à ſon filet.

Baſe Compoſite. La Baſe de la colonne de cet Ordre ne diffère de la Baſe de la colonne Corinthienne, qu’en ce qu’elle a un aſtragale de moins. (Voyez ci-deſſus la Base Corinthienne.) A l’égard de la Baſe du piédeſtal, elle a d’abord le quart de la hauteur du piédeſtal, y compris le ſocle, & le tiers ſans le ſocle. Ses membres ſont un tore, un petit aſtragale, une doucine accompagnée de ſon filet, un gros aſtragale & un filet, faiſant un congé avec le nud du dé. On proportionne ainſi ces membres de la Baſe : on diviſe le congé, ſans le ſocle, en dix parties, dont on donne trois au tore, une au petit aſtragale, une demie au filet de la doucine, trois & demie à la doucine, une & demie au gros aſtragale, & une demie au filet qui fait le congé.

Baſe Attique ou Atticurge. C’eſt une Baſe qui a deux tores & une ſcotie, & qui convient aux colonnes Ionique & Compoſite. Cette Baſe eſt appellée Attique, parce que les Athéniens font les premiers qui l’ont miſe en uſage.

Baſe compoſée. Cette Baſe n’eſt point déterminée. La ſeule choſe qui peut la caractériſer eſt ſon profil qui eſt extraordinaire & fort différent de ceux des Ordres. Telle eſt la Baſe du grand Ordre compoſé de l’Egliſe de Saint-Jean de Latran à Rome, qui a été reſtaurée par le Cavalier Boromini.

Baſe continuée. Eſpéce de retraite ornée de quelque moulure, comme d’un tore ſupérieur avec ſon filet & adouciſſement, d’une Baſe de pilaſtre ou de colonne qui ſert de ceinture au pied d’un bâtiment ou d’un étage, ainſi qu’on en voit au dehors de l’Egliſe du Collège Romain.

Baſe mutilée. C’eſt une Baſe qui n’eſt profilée que par les côtés d’un pilaſtre, & qui n’a qu’une face par devant, comme on en voit à l’Hôtel de Longueville à Paris, rue Saint Thomas du Louvre, bâti par Clément Metezeau.

Baſe rudentée. Baſe dont les tores ſont taillés en maniere de cables. On voit quelques-unes de ces Baſes aux bâtimens antiques.