Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/AIN-CHAREM

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 191).
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AIN-CHAREM, & non pas AIN-CHARIN. Petit village de la Judée, à deux bonnes lieues de Jérusalem, & à une lieue de ce qu’on appelle le Désert de S. Jean. On le montre aux voyageurs comme la demeure de S. Zacharie & de Sainte Elisabeth ; quelques-uns ajoutent même que c’étoit une des six villes Sacerdotales de la Tribu de Juda ; mais tout cela est fort incertain. Bruyn met la ville de Sainte Elisabeth après le Bourg de S. Jean, sur le chemin de Jérusalem à Bethléem par le désert. Ce nom est composé de deux mots, Ain, & Charem. Le premier mot en hébreu & en arabe signifie Fontaine. Ceux qui l’écrivent par deux AA, aain, comme si dans les langues originales, d’où il est tiré, il commençoit par la même lettre doublée, ou répétée, l’écrivent mal. L’une est un ain consonne gutturale nasale, & l’une des radicales de ce nom, qui ne répond point à notre a, & ne peut s’exprimer par aucun caractère des langues d’Occident ; & l’autre n’est qu’un point voyelle, qui répond à notre a. L’autre mot, que le P. Nau, dans son Voyage de la Terre-Sainte, écrit Karem, mais qu’il vaut mieux écrire Charem, parce qu’en Arabe c’est Chef qu’il est bon de distinguer du Kaf, que nous exprimerons toujours par un K, & qu’il faut bien se donner de garde d’écrire Charin, comme M. Corneille, que des voyageurs mal habiles ont trompé ; ce mot, dis-je, vient de l’arabe Charama, & signifie Libéral, magnifique. De sorte que Ain-Charem signifie, la fontaine libérale ; c’est-à-dire, abondante, copieuse, qui jette beaucoup d’eau ; & en effet, à un bon jet de pierre de ce lieu, l’on rencontre une belle fontaine, abondante en eau, qui va se répandre dans la vallée voisine, qui n’en est séparée que par le chemin. Elle l’arrose, & donne moyen aux habitans du village voisin d’y faire des jardins, & d’y semer des légumes, des melons, des pastègues, des concombres, &c. comme on peut voir dans le Voyage du P. Nau, p. 474. Ce Pere, & les autres voyageurs prétendent que c’est la fontaine de Nephtoa, dont il est souvent parlé dans l’Ecriture. Je ne suis pas de ce sentiment ; je pourrai m’en expliquer au mot Nephtoa.