Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/AMPOULE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 312-313).
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☞ AMPOULE. s. f. Fiole, petite bouteille. Ampulla. Dans ce sens il ne se dit que de la Sainte Ampoule.

On appelle la Sainte Ampoule, certaine petite bouteille venue du ciel, où il y a de l’huile qui sert à sacrer les Rois de France, laquelle on garde bien soigneusement dans l’Abbaye de saint Remi de Reims, Sacra Ampulla. Hincmar, Archevêque de Reims, qui vivoit du temps de Charles le Chauve, rapporte, en la vie de S. Remi, qu’une colombe blanche l’apporta du ciel en son bec, lorsque les saintes huiles lui manquoient, à cause de la foule qu’il y avoit auprès des fonts baptismaux ; qu’elle disparut aussi-tôt ; que cette huile parfuma toute l’église, & que le Roi Clovis en fut baptisé. Il y a eu un beau Traité Apologétique de la Sainte Ampoule, fait par Alexandre le Tanneur contre Jacques Chiftlet, imprimé en 1652. Voyez Du Cange au mot Ampoule, Aimoin, L. I, chap. XVI. Flodoard, Hist. Remens. Liv. I, c. XIII. Annales Bertinienses au Ch. 868. Gaguin, du Haillan, Liv. III, Rerum Gallicar. Le P. Sirmond sur la Lettre d’Avitus, Conc. Gall. T. I, ad an. 446, p. 1268. Morus, de sacris unctionibus : le Sueur Calviniste, Hist. de l’Emp. & de l’Eglise, à l’an de Jésus-Christ 496, les notes du P. Ruinard sur Grégoire de Tours, Hist. Franc. Liv. II, ch. 21. Le P. Dorigni, Jésuite, qui a composé la Vie de saint Remi, imprimée en 1714, à Châlons sur Marne, a fait une Dissertation sur le miracle de la Sainte Ampoule, qu’il prétend être véritable. Il n’y entre point dans le détail des mêmes objections que les Critiques modernes ont faites contre ce miracle. Marlot, Le Tanneur, & Du Saussay y ont suffisamment répondu. Il s’attache à la plus forte, tirée du silence d’Avitus, & de Grégoire de Tours. Il dit sur cela que la lettre d’Avitus est fort suspecte de supposition ; que Henri Derford a écrit qu’il avoit vu des manuscrits de Grégoire de Tours, où le miracle de la Sainte Ampoule étoit raconté ; que les argumens tirés du silence des Auteurs, sont bien foibles ; que le silence de Fortunat ne fait douter personne du baptême de Clovis par S. Remi. Il oppose à Avitus & à Grégoire de Tours l’autorité de Hincmar & la tradition. Gaguin, Hincmar, & Aimoin, disent aussi que Clovis institua un Ordre de Chevaliers de la Sainte Ampoule. Joseph de Michiéli, dans son Tesoro Militar. fol. 77. Le P. Andréa Mendo, Jésuite, De ordinib. militar. fol. 16. & Bernardo Giustiani, Hist. dell’ origine de Cavallieri, Ch. VI en parlent aussi. Ce dernier dit, que les Auteurs ne disent point l’année que cet Ordre fut institué ; mais qu’il est aisé de juger que ce fut dans la solennité de son baptême que Clovis l’institua, & par conséquent l’an 485 de Jésus-Christ ; qu’il voulut que les Chevaliers s’appelassent Chevaliers de S. Remi ; qu’ils ne pussent être plus de quatre ; que leur fonction fût d’assister l’Evêque, lorsqu’il porte la Sainte Ampoule, & qu’ils n’ont point de bannière particulière, parce que la dignité de leur fonction suffit pour les distinguer parmi tous les autres Chevaliers. Ces quatre Chevaliers sont les barons de Terriers, de Belestre, de Senestre, & de Louversy. Ce même Auteur remarque dans la seconde édition, que ces Chevaliers n’étant que quatre, ils ne peuvent passer pour un Ordre militaire. Une description des ordres militaires imprimée à Paris en 1671, dit, qu’ils ont une croix dont le tronc & les branches sont triangulaires, avec quatre fleurs-de-lis dans les angles, & sur le tronc de laquelle on voit au centre la Sainte Ampoule soutenue d’une main par-dessous, & dessus un S. Esprit en forme de colombe. Tout cela certainement n’est pas plus du temps de Clovis, que le nom de Chevaliers de S. Remi.

Ce mot Ampoule vient du latin Ampulla, qui signifie une bouteille qui a un cou long & étroit. C’étoit autrefois un vaisseau où on gardoit le vin servant à l’autel. C’étoit aussi celui où on gardoit l’huile, & le saint chrême pour les catéchumènes & les malades.

Ampoule, se dit aussi en physique de certaines petites bouteilles, ou enflures pleines de vent qui se font sur l’eau quand il pleut. Bulla. Il s’en fait aussi dans toutes les autres liqueurs agitées ; & c’est ainsi que se forme l’écume, quand l’ébullition est bien petite.

Ampoule, se dit aussi de ces petites vessies, ou élévations qui se font sur la peau, & qui sont pleines d’eau, ou de pus. Tumor. Il lui est venu des ampoules par tout le corps.