Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ARGONAUTES

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 494).
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ARGONAUTES. s. m. Nom des 52 ou 54 Héros qui s’embarquèrent dans le navire Argo avec Jason, pour aller à Colchos y conquérir la Toison d’or. Hercule, Thésée, Castor, Orphée, &c. étoient du nombre des Argonautes. Rudbecks, au ch. 26 de son Atlantica, dit, que les Argonautes retournèrent de Colchide en Grèce par l’Océan, & qu’ils rentrèrent par le détroit de Gibraltar dans la Méditerranée, & firent ainsi tout le tour de l’Europe ; car il suppose qu’après avoir remonté le Tanaïs autant qu’il leur fut possible, ils traînèrent par terre leur vaisseau dans une rivière voisine qui les porta dans l’Océan septentrional. Il fonde cette supposition sur le témoignage de Diodore de Sicile, & sur celui d’Orphée. D’autres ont dit qu’ils remontèrent le Danube, & qu’ils portèrent leur vaisseau jusqu’à la mer Adriatique. D’autres enfin, sans aucune apparence, cherchent en Afrique le chemin qu’ils firent par terre.

☞ L’histoire de la Toison d’or, dit Voltaire, est bien moins fabuleuse, & moins frivole qu’on ne le pense. C’est de toutes les époques de l’ancienne Grèce, la plus brillante & la plus constatée. Il s’agissoit d’ouvrir un commerce de la Grèce aux extrémités de la mer noire. Ce commerce consistoit principalement en fourrures, & c’est de-là qu’est venue la fable de la toison. Le voyage des Argonautes servit à faire connoitre aux Grecs le ciel & la terre.

☞ C’étoit la coutume de tous les Grecs, & presque de tous les peuples, de tourner toute l’histoire en fables ; la poësie seule célébroit les grands événemens ; on vouloit les orner, & on les défiguroit. L’expédition des Argonautes fut chantée en vers ; & quoiqu’elle méritât d’être célébrée par le fond qui étoit très-vrai & très-utile, elle ne fut connue que par des mensonges poëtiques.

Argonautes de S. Nicolas. Ordre militaire institué par Charles III, Roi de Naples, vers la fin du XVe siècle, sous le pontificat d’Urbain VI, & dont S. Nicolas est le patron. On ne sait pas précisement l’année où il fut établi. Le collier des chevaliers étoit formé de coquilles enfermées dans des croissans d’argent ; de ce collier pendoit la figure d’un navire avec cette devise, Non credo tempori ; c’est-à-dire, Je ne me fie point au temps. C’est à cause de ce collier, qu’on appelle ces chevaliers les Argonautes de S. Nicolas & des Coquilles. On les appelle aussi les Argonautes de Naples. ils reçurent la règle de S. Basile de l’Archevêque de Naples, & prirent l’église de S. Nicolas leur patron pour tenir leurs assemblées. Joseph de Michiéli met aussi des Argonautes en France, mais qu’il appelle néamoins Argonautes de Naples, & dont l’origine n’est point différente de celle que nous venons d’expliquer. C’est que les Princes François dépouillés du royaume de Naples se porterent néanmoins toujours pour Rois & pour Grands Maîtres des Odres de Naples, & continuerent à faire des chevaliers. L’habit de cérémonie de l’Ordre étoit de soie blanche en forme de grande cape, sur laquelle se mettoit le collier. Voyez Pandulphe Colonducio dans son Histoire de Naples, Joseph Michiéli dans son Tesoro militar, le P. André Mendo, de Ordin. militar. Caramuel, Théolog. Regolare. P. IX. Bernardo Justiniani, Histori dell’ origine de Cavallieri, C. 50.