Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BÆTYLE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 696).
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BÆTYLE. s. m. Terme de Mythologie. Batylus. Selon Priscien, c’est le nom que les Grecs donnoient à la pierre que les Latins nomment Abadis, & que Saturne dévora au lieu de Jupiter. Hésychius & l’Etymologiste Grec sont de même sentiment. L’Etymologiste, en un autre endroit qui est corrompu, & qu’il faut corriger par Phavorinus, dit que Bætyle étoit une pierre qui s’étoit formée proche du Liban, montagne de la ville d’Ilion, Ἰλίου, ou plutôt, comme les savans ont corrigé, Ἡλίου, c’est-à dire, de la ville du Soleil. Sanchoniaton, dans Eusèbe, Præp. L. I, dit que le Dieu Uranus inventa les bætyles, fabricant, dit-il, des pierres animées. Philon de Bibles dit la même chose. Photius rapporte, pag. 1062 & 1063, que Damascius, Auteur païen, fort superstitieux, qui vivoit sous Justinien, racontoit qu’il avoit vu la pierre bætyle qui se mouvoit en l’air ; & que le Philosophe Isidore disoit que c’étoit un Démon qui lui donnoit ce mouvement. Le même Damascius disoit qu’il y avoit des bætyles consacrés à plusieurs Dieux différens, à Saturne, à Jupiter, au Soleil, &c. Lampridius parle de pierres semblables, qui étoient dans le Temple de Diane, à Laodicée, in Anton. hel. cap. 7. Voilà à peu près tout ce que l’antiquité nous enseigne des bætyles. Sur cela quelques-uns jugent que ce n’étoient que les pierres informes, dont les Idolâtres représentoient leurs Dieux avant l’invention de l’art de la Sculpture. Bochart, Chanaan, Liv. II, chap. 2, croit que les Phéniciens imitèrent ce que Jacob avoit fait, lorsqu’après la vision de l’échelle mystérieuse, il éleva une pierre au même lieu ; qu’il nomma béthel, versant de l’huile dessus ; & que c’est de-là que vint cette coutume, & le nom bætyle, qui fut donné à ces pierres. Il croit, conformément à cette conjecture, que Sanchoniaton n’avoit point dit que ces pierres étoient animées, mais qu’elles étoient ointes ; que le texte de cet Auteur s’étoit ensuite altéré, ou qu’on avoit mal lu, & que de נשפים, Naschphim, on avoit fait נפשים, Napschim. Les Juifs ont une tradition qui confirme ceci, & qui dit que cette pierre de Jacob fut d’abord agréable à Dieu ; mais qu’ensuite il l’eut en horreur, parce que les Chananéens transporterent cet usage dans leur idolâtrie. Voyez Scaliger sur Eusèbe, p. 198. Saumaise sur Lampridius cité, Bochart à l’endroit cité ; le Chevalier Marsham, Can. Chron. Sect. IV. Voss. De idol. Lib. VI, c. 39, & ci-dessus le mot Abadir.