Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BLASON

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 924-925).
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BLASON. s. m. Devise & Armes qui sont dépeintes sur un Ecu, telles que les portoient les anciens Chevaliers ; ou, selon quelques autres, l’assemblage de tout ce qui compose l’écu armorial. Scutum Gentilitium. Voilà le blason d’une telle maison. On reconnut ce Chevalier à son blason.

☞ Les Vocabulistes n’ont pas cru devoir parler de cette acception du mot blason, & ne le considérent que comme l’art d’expliquer, en termes propres, toutes sortes d’armoiries. C’est voir la moitié des choses.

Ménage dérive ce mot de latio, à cause que le blason étoit porté par les Chevaliers sur leurs écus. D’autres le dérivent par métathèse de l’hébreu sobal, qui signifie tulit, portavit. Borel le fait venir du mot latin laus, qui signifie louange, & de celui de sonare, qui signifie sonner, en mettant un B devant le mot entier. Mais la plus commune opinion est que le mot blason est venu de l’allemand blasen, qui signifie sonner du cor, parce que ceux qui se présentoient aux lices des anciens Tournois, sonnoient du cor, pour faire savoir leur venue. Les Hérauts après sonnoient de leurs trompettes ; & puis blasonnoient les armoiries de ceux qui se présentoient, & les décrivoient à haute voix, & quelquefois s’étendoient sur les louanges & les exploits de leurs maîtres.

Blason. Ce mot a été pris aussi quelquefois pour l’écu même où sont les armoiries ; ce qui a fait dire à Perceval : Et se couvrent de leurs blasons.

Blason, se dit aussi de la science particulière qui apprend à déchiffrer les armes, ou armoiries des maisons nobles, & à en nommer toutes les parties dans leurs termes propres, & particuliers. Earum, quæ in scuto expressa sunt, figurarum interpretatio, ou interpretandi ars, scientia : ars, ou scientia heraldica. Le blason étoit la science des Hérauts d’armes. Les François sont les premiers qui ont réduit le blason en art, & ce sont eux qui ont les armes les plus régulières. Il y a cette différence entre armes ou armoiries, & blason, qu’armoiries se dit de la devise, ou des figures qu’on porte sur le bouclier, ou sur la cotte d’armes ; au lieu que le blason en est le déchiffrement, ou la description. Tous les termes & jargon du blason étoient de l’usage ordinaire de la langue dans l’onzième siècle où le blason commença à se mettre en vogue ; car alors les fautoirs, les fusées, les girons, les rustres, &c. étoient des pièces du harnois des Chevaliers.

Aussitôt maint esprit fécond en rêveries,
Inventa le blason, avec les armoiries.

Le blason représente en image la naissance, la noblesse, les alliances, les emplois, & les belles actions des hommes illustres. Barthole a écrit du blason & des armoiries en Jurisconsulte, & le Président Chasseneu, dans sont catalogue de la gloire du monde. Plusieurs en ont écrit en Curieux & en Historiens, comme André Favin, Spalman, la Colombière, Bara, Segoin, Geliot, les Peres de Varenne & Ménestrier Jésuites ; Philippe Moreau Avocat Bourdelois, & Scohier Chanoine de Berghes en Hainaut, qui dit que l’étude du blason est un abîme, & que celui qui s’y est appliqué 30 ou 40 ans y trouve toujours matière d’apprendre. Le Pere Ménestrier a fait une bibliothèque de tous les Auteurs qui ont écrit du blason, des armoiries, & des généalogies, & a fait un dénombrement de près de 300 Auteurs qui en ont écrit en diverses langues. On ne voit point avant l’an 1150 d’Auteur qui parle du blason, selon les gens qui ont remonté jusqu’aux sources de cet art ; il n’y a point eu avant ce temps de véritables armoiries. Le Gendre.

Blason, signifie aussi un grand nombre d’armoiries qu’on met en certaines cérémonies, particulièrement aux enterremens, sur les tentures, litres ou ceintures funèbres, ou aux cierges & aux torches. On a dépensé une grosse somme pour payer le blason d’une telle pompe funèbre. Insignia gentilitia.

On dit aussi, le blason des couleurs, pour expliquer ce qu’elles signifient, comme l’Or, qui est le jaune, signifie, richesse, force, foi, constance ; l’Argent, qui est le blanc, espérance, pureté, innocence, humilité : l’azur, justice, loyauté, beauté, réputation, &c. Le Pere Monet a traité au long du blason des couleurs dans son livre du blason qu’il a fait en françois & en latin.

Blason, signifioit autrefois tantôt les louanges, les éloges qu’on donnoit, landatio ; tantôt une censure qu’on fait de quelqu’un. Gloss. Sur Marot. Il y a eu des Poëtes qui ont fait le blason ou l’éloge de la rose. Amyot a aussi appelé une épitaphe, blason funéral.