Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BRÈCHE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 50-51).
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BRÈCHE. s. f. Ouverture faite à quelque partie d’une clôture, soit qu’elle se fasse par violence, soit par caducité. Muri ruina, pars dejecta. Il faut réparer les brèches de ce parc pour conserver le gibier.

Ce mot vient de l’allemand brechen, qui signifie rompre, dont on a fait ébrécher. Le tout est venu de brix, ancien mot gaulois qui s’est dit dans le même sens.

Brèche, en termes de guerre, se dit de cette ouverture qu’on fait aux murailles d’une ville assiégée, par mine, sappe, ou coups de canon, pour ensuite monter à l’assaut. On dit qu’une batterie voit en brèche, quand elle la découvre de telle sorte qu’on puisse tirer dessus pour la défendre ou l’attaquer ; que le canon bat en brèche.

☞ Battre en brèche ; monter à la brèche. Voyez Battre, Batterie, & Monter.

Brèche, s’est dit poëtiquement des larges blessures.

Il mourut tout couvert & de sang & de flèches,
Et son ame sortit par plus de mille brèches.

Scuder
.

Brèche, se dit des diminutions ou ruptures qui se font à plusieurs choses. Ce goinfre a fait une grande brèche à ce pâté. Dans une traduction de la Batrachomyomachie, le rat dit qu’il sait

Faire brèche au fromage, & d’une adresse extrême,
Sans tomber dans le lait, en enlever la crême.

Il a fait deux ou trois brèches à mon couteau.

Brèche, se dit figurément, du tort, du dommage qui est fait à quelque chose, de la diminution d’un bien qui doit être conservé tout entier. Labes, macula, detrimentum. Il n’y a rien de si délicat que la réputation, il est aisé d’y faire brèche. Cette déclaration a fait brèche, a donné atteinte aux privilèges de cette Compagnie. Les plus belles passions s’affoiblissent avec le temps ; chaque jour y fait une brèche. S. Evr. La crainte est la brèche par laquelle Dieu entre par une heureuse violence dans les cœurs les plus endurcis. Flech. Les passions sont les brèches de l’ame : c’est par-là que tous les vices y peuvent entrer. S. Evr. Par le renouvellement de vos vœux, vous réparerez avec avantage jusques aux moindres brèches que l’ennemi peut avoir faites dans vos cœurs. Bourdal. Exhort. T. I, p. 248. Le relâchement s’introduit, les fautes demeurent impunies, chaque jour ce sont de nouvelles brèches qu’on fait à la règle. Id. II, p. 337.

☞ Voltaire dans ses remarques sur le Nicoméde de Corneille, à propos de cette expression faire brèche au pouvoir souverain, observe que faire brèche n’est plus d’usage. Ce n’est pas que l’idée ne soit noble, mais en françois toutes les fois que le mot faire n’est pas suivi d’un article, il forme une façon de parler proverbiale, trop familière. Faire assaut, faire force de voiles, faire de nécessité vertu, faire ferme, faire alte, &c. toutes expressions bannies du vers héroïque.

Brèche. s. f. Sorte de marbre fort dur qu’on tire particulièrement des Pyrénées. Le fond en est noir avec des tâches & des veines blanches. Il est aussi mêlé de veines jaunes, & ressemble à différens cailloux congelés, & joints ensemble. Ce marbre, dont on a tiré des pièces de plus de vingt pieds de long, prend un poli merveilleux. De la brèche violette.

Brèche (la), ou la Bresche, rivière de France qui a son cours dans le Beauvoisis, & tombe dans l’Oise.