Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BRANLE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 42-43).
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BRANLE. s. m. Agitation de ce qui est remué tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Motus. On sonne les cloches en branle. Les estomacs foibles ne sauroient souffrir le branle du navire.

Branle, se dit figurément du commencement d’une affaire, lorsqu’on la met en train d’aller, qu’on lui donne le premier mouvement. Ce Ministre est celui qui donne le branle aux affaires, & à tout l’Etat. Auctor, impulsor ad rem faciendam. C’est cet homme de bonne humeur qui méne le branle, qui met les autres en train pour se divertir. Ce sont eux qui donnent le branle à la réputation. Mol. Dieu, après avoir créé les causes secondes, & avoir donné le branle à toute la machine du monde, les laisse agir selon le mouvement & le branle qu’il leur a imprimé. Ju.

Branle, signifie aussi, incertitude, délibération. Fluctuatio, jactatio. Cet homme est en branle s’il s’engagera dans une telle entreprise. Sa fortune est en branle, & fort incertaine.

Branle, en termes de Musique & de danse, est un air ou une danse par où on commence tous les bals, où plusieurs personnes dansent en rond, & non pas en avant, en se tenant par la main, & se donnant un branle continuel & concerté avec des pas convenables, selon la différence des airs qu’on joue alors. Saltatorius orbis. Se branles consistent en trois pas & un pied joint, qui se font en quatre mesures, ou coups d’archet, qu’on disoit autrefois battement de tabourin. Quand ils sont répétés deux fois, ce sont des branles doubles, ou communs. On danse d’abord le branle simple & pui le branle gai, par deux mesures ternaires : & il est ainsi appelé parce qu’on a toujours un pied en l’air. Voyez Thoinot Arbeau dans son Orchésographie, où il donne les noms, les mesures, & la tablature d’un grand nombre de branles qu’on dansoit il n’y a pas long-tems, comme les branles de Bourgogne, qui se dansent à droit & à gauche par une mesure binaire, prompte & légère, les branles du haut Barrois, du Monstier en Der, de Hainault, d’Avignon, &c. Les branles du Poitou, qui se dansent par mesure ternaire en allant toujours à gauche. Les branles d’Ecosse & de Bretagne. On appelle ceux-ci le Tryori. Il parle aussi du branle des Lavandieres, où les danseurs font du bruit par le tapement de leurs mains : du branle des sabots, où on bat du pied, qu’on a appelé aussi le branle des chevaux, à cause de ce tapement de pieds ; du branle des pois & des Hermites ; du branle de la torche, dans lequel le danseur tient un chandelier, une torche, ou un flambeau allumé. Il y a eu aussi des branles morgués & gesticulés, qu’on a appelé de la moutarde, que les Dames appellent branles de la haie, qui ont gégénéré enfin en ceux qu’on appelle branle à mener, qui sont ceux par qui se terminent maintenant tous les branles. En ceux-ci chacun méne le branle à son tour, & puis se met à la queue. Les danses aux chansons sont des espèces de branles. Le branle de sortie est ce qu’on danse à la fin du bal.

Il y a aussi une espèce de petit jeu qu’on appelle Branlemoine.

Branle de S. Elme. (le) Réjouissance ou Fête qui se donnoit autrefois à Marseille, la veille de S. Lazare, pour divertir les étrangers qui venoient en foule à cette fête : on faisoit un branle de tous les plus beaux garçons & des filles les mieux faites qu’on pouvoit trouver : on les habilloit le plus superbement qu’il étoit possible ; les uns représentoient les Dieux de la fable, & les autres toutes les nations du monde. En cet état ils passoient par la ville au son des violons & des tambours. Ce branle, qu’on appeloit communément le branle de S. Elme, a été interrompu depuis long-tems. De Ruffi. Hist. de Marseil, c. 11, p. 400.

On dit proverbialement, qu’on va danser un branle de sortie, lorsqu’on est prêt de s’en aller, ou qu’on est chassé de quelque lieu.

On dit aussi d’un homme ou d’une femme de gaieté excessive, qu’il est fou, ou qu’elle est folle comme le branle gai.

Branle, en termes de Marine, ou hamac, est un lit dont on se sert sur les vaisseaux, qui est suspendu sous le pont par des cordes qui tiennent aux quatre côtés. Il est fait de grosse toile, & renforcé d’un cordage qui lui sert d’ourlet nommé ralingue. Il sert à coucher le soldat. On appelle branle matelasse, une sorte de matelats qui est fait en branle. Quand on veut faire détendre tous les branles d’entre les ponts, afin de se préparer au combat, ou pour faire quelqu’autre chose, on dit Branlebas, ou For-branle.

Branle, en Fauconnerie, Voyez Branler.

Branle, en Horlogerie, s’entend de l’espace parcouru par le régulateur dans une vibration.