Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BRONZE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 86-87).
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☞ BRONZE. s. m. Autrefois on faisoit ce mot féminin. Voiture disoit encore comparer la bronze à l’or. Aujourd’hui, l’usage général le fait masculin. Le bronze est un alliage de métaux, dont le principal est le cuivre fondu avec quelque partie d’étain ou de laiton. Quelques-uns, par épargne, y mettent du plomb, parce qu’on ne sauroit fondre du cuivre fin dans un fourneau de réverbère, qu’on ne le trouve percé & plein de trous comme une éponge. Il y a encore un autre cuivre composé qu’on appelle métal, qui n’est pourtant en effet que du bronze ; & on lui donne ce nom selon la plus grande ou plus petite quantité qu’on y mêle d’étain, qui est de 12 jusqu’à 25 pour cent. La lie ou le marc de bronze s’appelle diphrygies, & est en usage en médecine. La fleur de bronze se fait quand on jette de l’eau pure sur du bronze fondu, lorsqu’il s’écoule par les canaux. On met une platine de fer au-dessus de la fumée, & il s’y forme de petits grains en forme de millet, qui sont luisans & rougeâtres ; c’est ce qu’on appelle fleur de bronze. Ecaille de bronze, est ce qui tombe de l’airain, lorsqu’on le bat, & qu’on le met en œuvre. On dit, jeter des figures en bronze, animer le bronze, graver sur le bronze, &c. Le cheval de bronze qu’on voit dans la place Royale à Paris est u ouvrage de Daniel Volterre, fameux sculpteur.

Bronze, s. m. se dit en général des ouvrages, des figures en bronze, soit que ces pièces soient des antiques, des copies de l’antique, ou des sujets nouvellement inventés. Voilà un beau bronze.

Les Médaillistes distinguent le grand, le moyen, & le petit bronze, pour dire les grandes, les moyennes & les petites médailles de bronze. Tout le cuivre, dans la distinction des suites de médaille, a l’honneur de porter le nom de bronze. Le P. Job.

Quelques-uns dérivent ce mot à Brontibus, quasi brontium à Vulcani famulis fabrefactum. D’autres croient qu’il vient de l’italien abbronzare, qui signifie enduire d’une couleur brune. Le mot bronze vient de l’italien bronzo, qui signifie la même chose, & bronzo vient d’abbronzare. Le P. Thomassin remonte plus haut, & il fait venir le nom de bronze du mot saxon bræsens, æneus, qui est de cuivre ou d’airain. Icquez le dérive de brunt, mot saxon, & de la langue des Francs.

Bronze. C’est aussi une couleur préparée par les marchands épiciers, vendeurs de couleurs, pour imitier le bronze.

☞ On se sert de ce mot au figuré, en l’appliquant au cœur, à l’ame, pour désigner un cœur insensible, extrêmement dur. Cet homme a le cœur de bronze. Horace donne un cœur de bronze à cet homme audacieux qui s’abandonna le premier à la merci des flots. Bouh. Le cœur de l’homme, qui est de cire pour toutes les choses qui vont à le pervertir & à le corrompre, est de bronze pour celles qui peuvent contribuer à son salut. Ab. de la Tr. Il faut l’avouer, on trouve par-tout, mais spécialement dans les conditions riches & opulentes du siécle, de ces ames de bronze que rien n’amollit. Bourdal. Exh. T. I, p. 49.

On appelle proverbialement, les courtisans du cheval de bronze, plusieurs fainéans, filous & gens de mauvaise vie, qui sont ordinairement sur le Pont-neuf à Paris.

Quand on dit absolument le cheval de bronze, on entend celui du Pont-neuf à Paris, c’est-à-dire, la statue équestre d’Henri IV, placée au milieu du Pont-neuf, vis-à-vis la place Dauphine. C’est un présent que la République de Venise fit à Henri IV.