Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CAGOT

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 153-154).
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CAGOT, OTE. adj. Souvent employé substantivement. Faux dévot, hypocrite, qui affecte de montrer des apparences de dévotion pour tromper, & pour parvenir à ses fins. Simulator, pietatis simulatæ falsæque religionis affectator, hypocrita.

Quoi ! je souffrirai, moi, qu’un cagot de critique
Vienne usurper céans un pouvoir tyrannique ? Mol.

Ce mot est injurieux, & vient de certaines personnes habituées en Bearn, & en quelque partie de la Gascogne, qu’on croit descendues des Visigots, qui sont tenus pour ladres. Voyez Capot. Ce nom leur a été donné, comme qui diroit caas Goths, ou chiens Goths, en haine de l’Arianisme, dont les Goths avoient fait profession, selon Ménage, M. de Marca, & plusieurs autres. Pasquier dit qu’il vient de Got, qui en langue Germanique signifioit Dieu ; d’où sont venus ces juremens déguisés morguoi, vertuguoi, sanguoi, &c. ☞ On les a aussi appelés Géziatins, comme descendans de Giézi, serviteur d’Elisée, qui fut frapé de la lèpre. Borel le dérive avec peu de vraisemblance de κἀγαθός, qui veut dire, & bonus, & bon, & homme de bien. On n’a jamais dit, κἀγαθός, mais καλοκἀγαθός.

Cagot & Bigot, synomymes. Dans l’usage ordinaire on confond ces mots, & nos Dictionnaires ne les distinguent pas assez. Ils prennent l’un & l’autre le masque de la vertu, & se montrent autres qu’ils ne sont ; mais la bigoterie paroît plus minutieuse : elle est scrupuleusement attachée aux petites pratiques de dévotion : elle convient particulièrement aux femmes. La cagoterie paroît dire quelque chose de plus ; elle s’étend aux actions, aux discours, à la conduite, à la manière de s’habiller, scrupuleusement attachée, comme la bigoterie, aux pratiques extérieures de la religion ; elle ne se fait aucun scrupule d’en violer secrétement les devoirs les plus essentiels. Le cagot est un homme détestable.