Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHACUN

La bibliothèque libre.
Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 391).
◄  CHACRIL

CHACUN, CHACUNE. Pronom distributif. ☞ sans pluriel, qui sert à déterminer les personnes ou les choses. Chaque personne, chaque chose. Quisquis, quæque. Chacun juge comme il lui plaît. La justice est une volonté ferme & constante de rendre à chacun ce qui lui appartient. Par la loi de la nature, chacun est indépendant, & maître absolu de soi-même. On ne se pousse, & on ne s’agrandit dans le monde que pour augmenter l’idée que chacun se forme de soi-même dans son propre esprit. Nic. Il y avoit plusieurs Dames, & chacune avoit sa parure.

☞ On le dit quelquefois collectivement. Chacun en raisonne, en cause. Chacun vous blâme, pour dire tout le monde.

Chacun est suivi de son, sa, ses, quand il n’y a point de pluriel dont il doive faire la distribution. Dieu récompensera chacun selon ses œuvres. Maintenir chacun dans ses droits.

☞ Quand il y a un pluriel, dont chacun doit faire la distribution, on met leur, ou son, sa, ses, suivant la place qu’occupe chacun avant ou après le régime du verbe. Dans le premier cas où chacun précède le régime du verbe, on dit, ils payèrent chacun leur écot. Dans le second, où il est placé après le régime on dit, les hommes ont des passions différentes, & ils voient les objets chacun selon sa passion.

☞ Quand le verbe n’a point de régime on emploie indifféremment leur ou son, sa, ses. Ils vinrent chacun avec leurs gens, ou avec ses gens.

☞ Les Vocabulistes avertissent qu’on ne dit point un chacun, & ils ont raison : mais ils ajoutent que cette locution est autorisée par le Dict. de Trévoux, & cela n’est pas vrai. Il y avoit dans la dernière édition un chacun, tout chacun, cette expression est basse. On apportoit ces deux vers de Marot.

Sous ce tombeau gît Françoise de Foix,
De qui tout bien tout chacun souloit dire.

☞ De bonne foi, dire qu’une locution est basse, est-ce l’autoriser ? il faudroit être censeur plus équitable.

Ménage dérive ce mot de quisque unus, & écrit chasqu’un.

On dit proverbialement, à chacun le sien n’est pas trop ; pour dire, qu’il est juste qu’on rende à chacun ce qui lui appartient.

Chacun (un) Pronom. Unusquisque. voyez Chacun.