Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CIMETIÈRE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 593-594).
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CIMETIÈRE, s. m. & non pas CIMÉTIÈRE. Lieu sacré destiné à enterrer les corps des défunts. ☞ Lieu béni & consacré avec les solemnités ordinaires, pour la sépulture des Fideles. Cœmeterium, sepulcretum, sepulcrorum frequentia, commune sepulcrum, sepulcralis area. Autrefois on n’enterroit personne dans les Eglises : mais dans les cimetières. Les cimetières ont toujours été en grande vénération parmi les Chrétiens. Le Concile d’Elvire, Can. 34 & 36. défend d’allumer des cierges pendant le jour dans les cimetières, & ch. 35. Il défend aux femmes de passer la nuit à veiller dans les cimetières. L’usage de bénir les cimetières est très-ancien. L’Evêque en faisoit le tour avec sa crosse, ou bâton pastoral, l’eau bénite étant portée devant lui. Hist. de Bret. par D. Lobineau, T. II, p. 208. Les Calvinistes, les Mahométans, ont aussi des cimetières à leur mode.

Dans les premiers siècles les Chrétiens faisoient leurs assemblées dans les cimetières, comme nous l’apprenons d’Eusèbe, Liv. VII de son Histoire Ecclésiastique, ch. 11. & de Tertullien qui appelle les cimetières où l’on s’assembloit pour faire les prières, areas. Tert. ad. Scap. C. 3. Valérien ayant apparemment confisqué les cimetières, & les lieux destinés au culte de Dieu, Gallien les rendit aux Chrétiens par un rescript public, qui est rapporté par Eusèbe, L. VII, C. 3. Il semble que les cimetières, & les lieux de Religion, y soient pris pour une même chose. Comme les Martyrs étoient enterrés dans les cimetières, ce fut là particulièrement que les Chrétiens bâtirent des Eglises, lorsque Constantin leur eut donné une entière liberté ; & on croit que c’est de cette coutume qu’est venue la règle qu’on observe aujourd’hui, de ne consacrer aucun Autel sans y mettre des Reliques des Martyrs. De Tillem. Hist. des Emp. T. III, p. 282, 283.

On a entendu autrefois par cimetière, non-seulement l’endroit où l’on enterroit les morts, mais aussi toutes les terres qui environnoient les Eglises paroissiales, & qui étoient contiguës aux vrais cimetières. Chorier, Hist. de Dauph. T. II, p. 47.

Ce mot vient du Lain cœmeterium, qui a été fait du Grec κοιμητήριον, qui veut dire, un dortoir, du verbe κοιμάω (koimaô), dormio, je dors ; parce qu’il semble que les défunts y dorment en attendant le jugement universel.

On dit figurément, que l’Italie est le cimetière des François, parce qu’il en meurt un grand nombre pendant les guerres qu’on a en ce pays-là. On le dit généralement d’un pays dont l’air est mortel pour les étrangers.