Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CONTE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 851).
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☞ CONTE. s. m. C’est en général le récit d’une avanture vraie ou fabuleuse, sérieuse ou plaisante, soit en vers, soit en prose. On le dit plus communément d’une histoire fausse & courte, qui n’a rien d’impossible. Ficta, commentitia narratio, fabula. Les Contes d’Ouville, d’Eutraper, de Bonaventure des Périers, de la Reine de Navarre. La brièveté est l’aune du conte. La Font. Esope a su envelopper la vérité dans la fable ; il faut beaucoup d’art pour déguiser ainsi en petits contes les instructions les plus importantes de la Morale. Fonten. C’est le propre d’un grand esprit lorsqu’il commence à vieillir & à décliner, de se plaire aux contes & aux fables. Boil. Il faut toujours quelque chose de piquant dans les contes. S. Evr. Il y a bien de l’adresse à faire un conte de bonne grâce. Il entend bien à broder un conte.

Une morale nue apporte de l’ennui ;
Le conte fait passer le précepte avec lui. La Font.

Conte, (Un) dit M. l’Abbé Girard, est une aventure feinte & narrée par un Auteur connu. Une fable est une aventure fausse divulguée dans le public, & dont on ignore l’origine. Un Roman est un composé & une suite de plusieurs aventures supposées.

Le mot de conte est plus propre lorsqu’il n’est question que d’une aventure de la vie privée.

☞ Les contes doivent être bien narrés ; les fables bien inventées ; & les Romans bien suivis. Voyez Fable et Roman.

Conte se dit aussi des histoires plaisantes, vraies ou fausses, que l’on fait dans la conversation pour amuser, railler, médire, &c. C’est un conte fait à plaisir : on fait d’étranges contes de cette femme-là,

Conte se dit encore de tous les discours inutiles, qui n’ont aucun fondement ni apparence de vérité. Tout ce que vous me dites-là n’est qu’un conte, sont des contes en l’air. Fabulæ. Voltaire, dans ses remarques sur ce vers de la Tragédie d’Héraclius,

Tu fais après cela des contes superflus,


observe que cette expression, contes superflus, est ignoble ; quoique les expressions les plus simples deviennent quelquefois les plus tragiques par la place où elles sont, ce n’est pas en cet endroit, c’est quand elles expriment un grand sentiment.

Conte se dit proverbialement, en ces phrases. Ce sont des contes de vieilles, dont on amuse les enfans ; des contes à dormir debout, de peau d’âne, de la cicogne, de ma mere l’Oie. Un conte violent, un conte jaune, un conte bleu, &c.