Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CYBÈLE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 72).
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CYBÈLE. s. f. Nom propre d’une Déesse Phrygienne. Cybèle. On l’appeloit encore la Grande Mere, Magna Mater, la Mere des Dieux, Mater Deorum ; Ops, Ops, Rhée, Rhea ; Vesta, Vesta ; la Mère Idéene, Idæa mater ; Dindymène, Dindimène, & Bérécynthe, Berecynthia. Cybèle étoit fille du Ciel & de la Terre, & femme de Saturne. On l’appela Cybèle, d’une montagne de Phrygie du même nom, Cybelus mons, au sentiment d’Hesychius ; & c’est, dit-on, parce qu’elle fut exposée sur cette montagne, & nourrie par des bêtes. Festus croit que ce mot vient de Κυϐιστεῖν τὴν κεφαλήν, ce qui signifie danser sur la tête ; en effet les Prêtres Gaulois de cette Déesse, faisoient de ces sortes de danses. D’autres disent que ce nom vient de Κύϐος, un cube, qu’il fut donné à Cybèle, parce que Cybèle étoit la Terre. Cependant elle étoit fille de la Terre ; mais il se pourroit faire que dans la fable on les eût souvent confondues ensemble, comme bien d’autres Divinités ; & certainement on les confondoit, puisqu’on l’appelle Ops ; car Ops étoit la Terre, dit Ciceron. On lui attribuoit l’invention du tambour, de la flûte & de la cymbale. Le Pin lui étoit consacré, parce que le jeune Athys qu’elle aimoit, fut métamorphosé sous cet arbre, ou qu’il se punit lui-même sous cet arbre de son infidélité à l’égard de cette déesse. C’est pour cela que dans les sacrifices qu’on lui faisoit tous les ans, & dont Prudence, dans l’hymne de S. Romain v. 196, & Firmicus, De errore prof. Relig. parlent, on coupoit un Pin, & on lioit au milieu la figure d’un jeune homme. Vers l’an 550. de Rome, sur un mot que l’on trouva dans les Sybilles, en y cherchant autre chose, & sur une réponse de l’Oracle de Delphe, les Romains demandoient au Roi Attalus la Mere Idéenne. Ce Prince leur fit donner une pierre que l’on conservoit à Pessinunte en Phrygie, & que les habitans disoient être la Mere des Dieux, on l’apporta a Rome avec beaucoup de cérémonie, & on la plaça dans le Temple de la Victoire qui étoit sur le mont Palatin. Tite Live raconte cet événement. L. XXIX. C. 10. 11. 14. Silius Italicus le décrit en vers dans son XVIIe. Livre. Strabon L. X. & Suétone dans Tibère, C. 2. en parlent aussi. Tous les ans les Préteurs lui faisoient un sacrifice d’une truie. Un Prêtre & une Prêtresse Phrygienne en étoient les Ministres. Habillés d’une robe de différentes couleurs à la manière de leur pays, ils portoient la statue de la Déesse en Procession dans les rues de Rome, frappant leur poitrine, jouant du tambour de basque, & demandant l’aumône à tous ceux qu’ils rencontroient. Voyez Rosin, Antiq. Rom. L. II. C. 4. & les augmentations de Dempster. Voss. De Idol. L. I. C. 20. L. II, C. 52. 53. 54. Les Prêtres de Cybèle s’appeloient Galles, Galli, leur Chef Archigalle, Archigallus. On lui consacroit le cœur des animaux, pour montrer qu’elle étoit la cause de leur génération, dit Phurnutus, ou parce que c’est le principe de la vie ou, comme dit Vossius, pour marquer qu’on se dévouoit à elle de tout son cœur.

Servius a cru que Cybèle avoir été appelée ainsi ἀπὸ Κυϐιστᾶν τὴν κεφαλήν, de ce que les Prêtres tournoient & agitoient violemment la tête dans ses sacrifices ; mais Strabon, dont Vossius préfère en cela l’autorité à celle de Servius, dit que ce nom lui fut donné de la montagne Cybelus en Phrygie. Etienne de Byzance, Festus, Suidas, & l’Etymologiste, sont du même sentiment.