Dictionnaire de l’administration française/AFFAIRE

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AFFAIRE. 1. On appelle affaire tout acte ou fait qui exige l’intervention de l’autorité judiciaire ou de l’autorité administrative. Toute action devant un tribunal est une affaire (synonyme : procès, cause). Toute lettre adressée à une administration et qui exige une réponse est une affaire. Il y a des affaires importantes et il y en a qui ne le sont pas.

2. Les affaires à chaque degré de la hiérarchie administrative sont généralement l’objet d’un nouvel examen et d’une nouvelle étude ; ces avis successivement donnés et qui viennent s’ajouter jour par jour au dossier primitif, forment ce qu’on appelle l’instruction de l’affaire : le tout est transmis au fonctionnaire chargé de décider, — le ministre, le préfet, le maire même, suivant les cas. La loi ou le règlement ont souvent déterminé, pour chaque genre d’affaire, la forme de la demande, le nombre et la nature des pièces dont elle doit être appuyée, le fonctionnaire à qui elle est adressée en premier lieu, et la filière par laquelle il faut nécessairement qu’elle passe ; en un mot, toutes les formalités à remplir.

3. Quand une affaire arrive au fonctionnaire à qui appartient la décision, les bureaux s’assurent : 1o si elle a suivi la voie régulière ; 2o si le dossier est complet.

En cas d’insuffisance des pièces ou d’erreur dans la marche adoptée, l’affaire est renvoyée à qui de droit et l’instruction recommence : il en résulte forcément un retard, et bien souvent ce retard est dû au désir de hâter la solution en passant par-dessus les intermédiaires.

4. Certaines affaires dont l’instruction est cependant régulière et complète, donnent lieu à des demandes d’explications, et alors la solution se trouve ajournée jusqu’à réponse satisfaisante. Le ministère de l’intérieur a senti le besoin d’empêcher que cet ajournement ne devint, par négligence ou parti pris, une sorte de déni de justice, et il a prescrit, par diverses circulaires de 1824, 1834, 1835, 1841 et d’autres, l’envoi mensuel d’un état de rappel des affaires en retard, c’est-à-dire des affaires restées sans solution ou sans réponse après un intervalle de deux mois, à partir de la date de leur transmission au ministère.

Une circulaire de 1838 a étendu l’application de cette mesure aux relations des sous-préfectures et des mairies avec les préfectures.

5. Les chefs d’administration enlèvent quelquefois à l’examen de leurs bureaux et traitent par eux-mêmes certaines affaires qui exigent plus d’habileté ou plus de secret que les autres : ce sont les affaires réservées.

6. Quand le concours de plusieurs administrations distinctes est nécessaire à la solution d’une seule affaire, ou quand la décision à prendre revient pour certaine partie au ministre et pour l’autre au préfet, on dit que l’affaire est mixte ou connexe. Celles de ces affaires qui concernent plusieurs services sont les plus difficiles et les plus longues à instruire, parce que l’instruction primitivement faite doit être recommencée deux ou trois fois par des fonctionnaires indépendants les uns des autres, et agissant à des points de vue différents, et aussi parce que sur ces études dont les conclusions sont souvent divergentes, il faut amener toutes les administrations intéressées dans la question à une opinion commune.

7. Les premières instructions données pour l’application du décret du 25 mars 1852, sur la décentralisation administrative, avaient, dans les affaires mixtes, laissé aux préfets le droit de statuer sur les questions de leur compétence, et retenu seulement pour le ministre celles qui exigent leur intervention. Mais cette double décision dans une même affaire ayant présenté des inconvénients, il a été résolu que désormais l’autorité supérieure prononcerait seule.

8. Divers ministères ont fait connaître le nombre des affaires qu’ils ont traitées, et ces chiffres sont très-élevés ; mais ici les chiffres sont peu instructifs, car les affaires ne sont pas des unités comparables ; puis, la manière de les compter diffère souvent. Ainsi, l’un aura compté une circulaire pour une affaire, l’autre pour autant d’affaires qu’il y a de destinataires : dans ce dernier cas, une circulaire aux préfets compte pour quatre-vingt-six.

9. Il n’en est pas moins utile que chaque affaire reçoive son numéro, mais peut-être serait-il utile de sous-numéroter les pièces d’une même affaire, soit en employant des lettres, soit des chiffres romains. On aurait donc, par exemple, no 8,340 a, 8,340 b, 8,340 c et ainsi de suite.