Dictionnaire de l’administration française/AMNISTIE

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AMNISTIE. 1. Acte du pouvoir souverain dont l’effet est d’effacer un crime ou un délit.

2. Il ne faut pas confondre l’amnistie avec la grâce ; celle-ci n’intervient qu’après que la justice a eu son cours, et lorsque la condamnation est prononcée, tandis que l’amnistie peut intervenir avant la condamnation et embrasser également les prévenus et les condamnés. La grâce ne remet que la peine, l’amnistie efface jusqu’au souvenir du crime. La grâce est spéciale et individuelle ; l’amnistie s’applique généralement à toute une classe de délinquants.

3. L’amnistie est surtout une mesure de haute politique, qui s’emploie à l’égard de ceux qui ont été condamnés pour crimes contre la sûreté de l’État. Cependant, à l’occasion d’une fête ou de tout autre événement, il arrive aussi qu’une amnistie est proclamée pour des contraventions et des délits déterminés.

4. C’est la constitution qui détermine l’autorité qui a le droit d’accorder des amnisties. Dans les monarchies, c’est presque toujours le prince qui exerce ce droit ; dans les républiques, le pouvoir législatif doit généralement intervenir. Ainsi, sous la constitution de 1852 (S.-C. 25 déc. 1852) c’est l’empereur qui accordait les amnisties, tandis que la loi du 17 juin 1871 en réserve le droit au pouvoir législatif.

administration comparée.

En Angleterre aussi, il faut une loi pour proclamer une amnistie, mais l’initiative de la proposition appartient à la couronne et le parlement se prononce après une seule lecture. (Ersk. May.)

Le droit du roi de Prusse d’accorder une amnistie est discuté par les auteurs. (Voy. Rœnne, Staatsrecht, t. Ier a, p. 327.) L’art. 49 de la constitution ne lui accorde que le pouvoir de gracier ou de commuter une peine. Cependant on distingue entre une amnistie individuelle (abolitio specialis) qui supprime une poursuite commencée, celle-ci ne peut avoir lieu que par une loi, et une amnistie générale (abolitio generalis) qui a lieu avant toute poursuite ; celle-là peut avoir lieu, pensent la plupart des auteurs, par simple ordonnance. L’empereur d’Allemagne ne possède pas ce droit. Depuis 1850 (date de la constitution) il ne s’est pas rencontré d’occasion pour une amnistie générale.

Le droit de l’empereur d’Autriche n’est pas contesté.

La constitution italienne dit seulement : Il re può grazia e commutare e le pene.

L’art. 73 de la constitution belge, ainsi que l’art. 73 de la constitution espagnole de 1869, dit du roi : « Il a le droit de remettre ou de réduire les peines prononcées par les juges… » Il n’est donc pas question d’amnistie. Le mot ne se trouve pas dans la constitution.

Il nous semble que dans quelques constitutions l’absence du mot amnistie est l’effet d’un simple oubli, car produire l’apaisement après des luttes violentes, ce doit être la mission naturelle du pouvoir modérateur confié au prince. M. B.