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Dictionnaire de la Bible/Abel-Beth-Maacha

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Letouzey et Ané (Volume Ip. 31-32).
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ABEL-BETH-MAACHA

ABEL-BETH-MAACHA (hébreu : ʿAbêl bêṭ Maʿakâh, « prairie de la maison ou de la famille de Maacha »), ville de la tribu de Nephthali, appelée aussi Abelmaïm, ou « prairie des eaux », dans le second livre des Paralipomènes, xvi, 4. Par abréviation, elle est nommée simplement Abel, II Reg., xx, 18 (Vulgate : Abéla), parce qu’elle avait été désignée sous son nom complet trois versets plus haut. Dans ce dernier passage, II Reg., xx, 15, notre édition latine porte, comme au ꝟ. 14 : « In Abela et in Bethmaacha ; » mais il est probable qu’il s’agit d’une seule et unique ville, et que la conjonction et (qui se lit aussi dans le texte hébreu, ꝟ. 14, mais non ꝟ. 15) doit être retranchée. Cette ville tirait des eaux qui l’arrosaient son nom d’Abelmaïm, et elle devait celui d’Abel-Beth-Maacha soit à la circonstance qu’elle faisait partie du petit royaume de Maacha ou était située dans son voisinage, soit à ce qu’elle avait appartenu à une famille appelée Maacha, soit peut-être enfin à ce qu’elle était située dans la plaine à l’est du Jourdain, au pied du Liban, maʿakâh signifiant « dépression ». — Au troisième livre des Rois, xv, 20. saint Jérôme, traduisant le mot beth, qui signifie « maison », appelle Abel-Beth-Maacha « Abeldomum Maacha » ou « Abel-Maison-de-Maacha ». Il fait de même IV Reg., xv, 29 ; mais, dans ce dernier passage, nos éditions de la Vulgate, plaçant une virgule entre « Abel-Domum » et « Maacha », en font deux villes distinctes au lieu d’une seule ville.

Abel-Beth-Maacha était une cité considérable, puisque l’auteur sacré l’appelle « une mère en Israël ». II Reg., xx, 19. Sa situation à la frontière septentrionale de la Palestine avait dû augmenter l’importance de cette place forte, destinée à servir de défense à tout le pays contre les attaques qui pouvaient venir du nord. Mais elle a été si complètement ruinée, qu’on ne peut affirmer aujourd’hui avec une entière certitude où était son emplacement. Stanley, Sinai and Palestine, in-8o, Londres, 1856, p. 386, suppose qu’il était dans la plaine marécageuse du lac Mérom, à cause du nom d’Abel-Maïm, qui lui est aussi donné. Cependant la plupart des géographes s’accordent maintenant à adopter l’opinion de Robinson, qui a retrouvé l’antique Abel-Beth-Maacha dans le village actuel d’Abil el-Kamh. Ce village, habité par des chrétiens, s'élève sur un Tell, à l’est du Derdarâh, petit affluent du Jourdain, qui coule de Merdj-Ayoùn. Son surnom d’el-Kamh lui vient de l’excellence du blé que produit le voisinage. E. Robinson, Later biblical researches in Palestine, in-8o, Londres, 1856, p. 372. Il est à une heure et demie environ au nord-ouest de Dan, aujourd’hui Tell el-Kadi, sur la route qui se dirige de Banias vers Sidon.

Abel-Beth-Maacha est mentionnée pour la première fois dans l’Écriture à l’occasion de la révolte de Séba, ce Benjamite qui, après la mort d’Absalom, fomenta une nouvelle insurrection contre David. Poursuivi par les troupes de Joab, Séba se réfugia à Abel-Beth-Maacha, et Joab alla l’y assiéger. Les habitants de la ville, sur le conseil d’une femme, coupèrent la tête au chef des révoltés et firent ainsi lever le siège de la place. II Reg., xx, 14-22. — Quatre-vingts ans plus tard, le roi de Damas, Benadad, contemporain d’Asa, roi de Juda, et de Baasa, roi d’Israël, faisant la guerre à ce dernier, d’accord avec le roi de Juda, s’empara de plusieurs villes du nord de la Palestine, en particulier d’Abel-Beth-Maacha (Abeldomum Maacha), III Reg., xv, 20 ; II Par., xvi, 4 (Abelmaïm). — Deux siècles environ s'écoulèrent depuis cette époque jusqu’au dernier désastre de la ville. Sous le règne de Phacée, roi d’Israël, Téglathphalasar, roi d’Assyrie, s’empara d’Abel-Beth-Maacha, et il en déporta les habitants dans son royaume. IV Reg., xv, 29 (Abel-Domum, Maacha). Les fragments des Annales de Téglathphalasar, qui ont été retrouvés dans les ruines de son palais, mentionnent la prise de la place forte israélite et la déportation des sujets de Phacée en Assyrie : « Je soumis, dit-il, les villes de Galaad, … d’Abel-(Beth-Maacha), qui est la frontière de la terre de Bit-Humri (le royaume d’Israël)… Je transportai ses habitants les plus distingués en Assyrie. » Cuneiform inscriptions of Western Asia, t. iii, pl. XX, n° 2. Ces événements se passaient en 734 ou 733. À partir de cette époque, il n’est plus question d’Abel-Beth-Maacha.

F. Vigouroux.