Dictionnaire de la Bible/Athanase (Saint)

La bibliothèque libre.
Letouzey et Ané (Volume Ip. 1207-1208-1209-1210).
◄  ATHANAI
ATHANASE (Saint)

1. ATHANASE (Saint), docteur de l’Église, né vers 296 à Alexandrie, diacre dès avant 319, évêque d’Alexandrie en 328, mort dans cette ville en 373. Au rapport de saint Grégoire de Nazianze, son panégyriste, il avait été instruit dès son enfance dans les sciences divines, et s’était appliqué à une profonde étude de l’Ancien et du Nouveau Testament, « dont il possédait, dit-il, tous les livres avec plus de perfection que les autres n’en savent un seul en particulier. » Orat. xxi, 6, t. xxxv, col. 1088. Voir les belles paroles qu’il dit de l’Écriture Sainte, à la fin de son traité De l’Incarnation, t. xxv, col. 393-196. Il prit part comme diacre de son évêque au concile de Nicée (325) et à la définition de la consubstantialité. Évêque, sa vie entière fut consacrée à la défendre contre le rationalisme hellénique, que représente l’arianisme. Déposé par le concile arien de Tyr (335), cinq fois exilé, il défendit toujours la vraie doctrine, et s’opposa soit sur son siège, soit en exil, à la sécularisation de l’Église par le parti arien. Par là il a mérité le nom de jurisconsulte, que lui donne Sulpice Sévère, et plus encore de père de la foi orthodoxe, que lui donne saint Épiphane.

De ses œuvres exégétiques, il ne nous reste que divers fragments de commentaires, soit de Job, soit du Cantique des cantiques, soit de saint Matthieu et de saint Lue, soit de saint Paul. Ces fragments se trouvent dans les Chaînes. Montfaucon les a réunis dans son édition des œuvres complètes d’Athanase, reproduite par Migne, Patr. gr., t. xxvii, col. 1344-1408. Leur attribution à saint Athanase ne repose que sur l’autorité des compilateurs des dites Chaînes. Le fragment sur le Cantique des cantiques est d’un auteur qui a visité Jérusalem et les Saints Lieux (col. 1353) : or aucun texte ne nous apprend d’ailleurs que saint Athanase ait jamais fait ce pèlerinage. Le fragment de commentaire de saint Matthieu, développement du texte : Quicumque dixerit verbum contra Filium hominis, Matth., xii, 32, est important par la mention qui y est faite de Novatien, d’Origène, de Photin, mais, par les formules théologiques dont il se sert, il paraît être contemporain du concile de Chalcédoine ou des querelles origénistes du commencement du ve siècle (col. 1381-1385).

Parmi les œuvres apocryphes de saint Athanase figure une Synopsis Scripturæ Sacræ, Patr. gr., t. xxviii, col. 283-437, donnant la liste, l’incipit et l’analyse sommaire des livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, et, à la fin, une liste des livres non canoniques. Au jugement de MM. Zahn et James, cette Synopsis aurait été composée aux environs de l’an 500. Elle a été publiée par Montfaucon, d’après un manuscrit unique aujourd’hui disparu, mais dont on a récemment signalé une répétition du xive-xve siècle. Voir Robinson, Texts and Studies, t. II, no 2, p. 7, Cambridge, 1892 ; Zahn, Geschichte des neutestam. Kanons, Leipzig, 1890, t. ii, p. 290-318. — On signale un Athanasii Commentarius in Psalmos, inédit, dont le texte grec existe à Venise et à Milan, et une version slave, à Bologne. Montfaucon, qui avait étudié ce commentaire, le tient pour postérieur au patriarche de Constantinople Germain (✝ 733), qui s’y trouve cité. Voir Patr. gr., t. xxvii, col. 602 et 606. — Plus importante est l’Interpretatio Psalmorum, publiée sous le nom de saint Athanase par Antonelli, Rome, 1747, reproduite par Migne, Patr. gr., t. xxvii, col. 649-1344. C’est un psautier grec, dont chaque psaume est divisé en stiques, excellente méthode pour dégager le parallélisme de la composition ; chaque stique est accompagné d’une courte glose qui en marque le sens allégorique, chaque titre, expliqué selon le même système d’allégories. Nous ne voyons pas que ce commentaire ait d’attestation plus ancienne que le manuscrit qui nous l’a conservé et qui est du IXe siècle (897), le Vaticanus palatinus gr., 44. L’auteur y marque une estime éminente de la vie monastique au désert (col. 1250), le dédain de la science humaine (col. 1054, 1287), son éloignement pour toute dignité ecclésiastique (col. 1247), et la conviction plusieurs fois répétée que le monde, créé en six jours, ne durera que six mille ans (col. 686, 794, 1010). Ce commentaire est vraisemblablement de quelque moine égyptien ou sinaïtique du Ve siècle. — Montfaucon a publié le texte grec d’une Expositio in Psalmos, t. xxvii, col. 55-546, attribuée à saint Athanase par les manuscrits et par la Chronique pascale, au VIIe siècle, Patr. gr., t. XCII, col. 544. Comme la précédente, c’est une édition glosée du Psautier ; mais, plus développée, elle est aussi plus grave et plus relevée. L’auteur entend les Psaumes comme des prophéties concernant le Christ et l’Église, et il applique ce principe d’interprétation historique à tout le Psautier. Contrairement à l’auteur de l’Interpretatio publiée par Antonelli, il s’applique à ne jamais prononcer le nom des hérétiques, et il évite les interprétations théologiques proprement dites : ce qui est surtout sensible dans le commentaire du psaume Dixit Dominus, où, ayant à parler de la « génération du Seigneur », il l’entend de la « génération selon la chair », et détourne le verset Ante luciferum genui te de son interprétation commune. Voir t. xxvii, col. 462 et col. 1146. Il a utilisé Origène et Eusèbe (cf. col. 54), ce dernier notamment. Enfin il a travaillé, le texte des Hexaples sous les yeux (cf. col. 71 et 470). Ce sont là autant de raisons de douter que ce commentaire soit d’Athanase. — On possède enfin un court et élégant traité intitulé Epistula ad Marcellinum in interpretationem Psalmorum, t. xxvii, col. 11-46. Cet opuscule figure déjà dans le Codex Alexandrinus de la Bible grecque (ve siècle), sous le nom d’Athanase, et Cassiodore le connaissait également et le donne comme d’Athanase. De institut. divin. litt., l, t. lxx, col. 1115. Ce petit livre, adressé à un solitaire nommé Marcellin, est un éloge du Psautier, éloge mis dans la bouche d’un saint vieillard dont on ne dit pas le nom. Il groupe les Psaumes par affinités aux divers sentiments de l’âme chrétienne (pénitence, compassion, action de grâce, confiance, etc.), et il les partage entre les divers jours de la semaine et les diverses circonstances de la vie. Quelques critiques identifient ce traité avec le De titulis Psalmorum, œuvre de saint Athanase que connaissait saint Jérôme, De vir. ill., 87, t. xxiii, col. 731. — Voir Möhler, Athanasius der Grosse, in-8o, Mayence, 1827 ; traduct. française, 2 in-8o, Bruxelles, 1841 ; E. Fialon, Saint Athanase, in-8o, Paris, 1877.

P. Batiffol.