Dictionnaire de la langue française du seizième siècle/Bourreau

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Éditions Édouard Champion (Ip. 660).
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Bourreau. Se faire payer en bourreau. Se faire payer d’avance. — Un pendart de valet Barbier… se faisant payer en bourreau, et garnir la main, paravant rien faire. Du Fail, Contes d’Eutrapel, 28 (II, 91).

(Fém.). Bourrelle. — Bourrelle des Amans, chagrine jalousie. Baïf, l’Amour de Francine, L. I (I, 140). — O mort cruelle, Triste bourrelle De nostre vie. Rivaudeau, Aman, I, p. 74. — Furies, laissés-moy ! lâs, laissés-moy, bourrelles. id., ib., IV, p. 112. — Mais toy, bourrelle sale et orde, De ta main ta gorge étreindras Avec la corde et te pendras. Baïf, Passetems, L. 1 (IV, 230). — Le severe Minos et le cruel Pluton, Tous deux tes outragez, hucheront Alecton, Megere, Tisiphone, execrables bourrelles, Pour ribler, forcener, ravager en tes mouelles. R. Garnier, Hippolyte, 111. — Sœurs au poil coulevrin, Eumenides cruelles, Quoy, serez-vous tousjours de vous mesmes bourrelles ? Du Bartas, 2e Semaine, 1er Jour, les Furies, p. 96. — Ah ! longues nuictz d’hyver, de ma vie bourrelles, Donnez-moy patience, et me laissez dormir. Derniers vers de Ronsard (VI, 302). — Je n’en excepteray les trois bourrelles de nos esprits : l’amour, l’ambition et l’avarice. E. Pasquier, Lettres, IX, 5. — Est-ce l’ambition, bourrelle de la vie ? Montchrestien, Aman, III, p. 255. — La mort, qui d’un costé se presente, effroyable, La faim de l’autre bout, bourrelle impitoyable. Aubigné, les Tragiques, I (IV, 44). — Ils avoient changé l’eau à donner mort par elle ; Il falloit que la terre aussy fust leur bourelle. id., ib., IV, p. 164.

Bourrelle, adjectif. — Quelle bourelle destinee A ce jour pour moy ramenee ! Jodelle, l’Eugene, IV, 3. — Le sçavoir n’est sinon qu’une bourrelle rage Qui tourmente le cœur. Tahureau, Poes. div., Vanité des hommes (II, 205). — Que les. Dragons grifus, les Dragons inhumains, Que l’enfançon d’Alcmene estoufa de ses mains, Ne vindrent demembrer de leurs griffes bourrelles Mon corps pendant encor à vos cheres mamelles ? R. Garnier, Porcie, 1682. — Venez, bourrelles Sœurs, En vos mains secouez vos fouets punisseurs. Baïf, Poemes, L. III (II 112). Tremblant d’une fiebvre bourrelle, Je passoy’ la glace en froideur, Puis une fournaise d’ardeur Brusloit mon sang et ma moelle. Aubigné, Primtems, I, 46. — Rompons nos vestemens, decouvrons nostre sein, Aigrissons contre luy nostre bourrelle main. R. Garnier, les Juifves, 474. — Elles volent vers l’homme, où leurs dextres bourrelles Font à qui forgera des peines plus cruelles. Du Bartas, 2e Semaine, 1er Jour, les Furies, p. 99. — Ministre de tourment, bourrelle jalousie ! Vauquelin de la Fresnaye, Divers Sonets, 62. — Et cet esprit divin, hoste d’un corps humain, En est chassé dehors d’une bourrelle main. Montchrestien, la Reine d’Escosse, V, p. 108.