Dictionnaire de la langue française du seizième siècle/Juge

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Juge. Juge mage. Principal juge. — Le juge mage de Carcassonne. J. d’Auton, Chron., 201 ro (G.). — MM. le juge maige, les lieutenants et conseillers presidiaulx. 1560. Arch. min. Agen (G.). — Je les renvoyay aulx juge-maige et procureur de vostre majesté au dict Perigueux. Monluc, Lettres, 156 (V, 67). — Le juge mage propre, qui est une personne timide, n’ausoit rien dire. id., Commentaires, L. V (II, 371). — Vacant l’estat de juge maige d’Agenois, qui est une belle charge et honorable, il se ressouvint qu’ung bon clerc luy avoit faict une belle harangue à Orléans, le nom duquel il avoit mis en son rollet. id., ib., L. VII (III, 485). — II inclineroit plus que le lieutenant eut la charge que le jugemaïe, par ce qu’il est plus resident au lieu. St François de Sales, Lettres, 327 (XIII, 137).

Juge magistral. Juge principal. — Jean de Brillac, lieutenant et juge magistral criminel en ladite senechaussee de Poictou. 1559. Proc. verb. des coust. de Poictou (G.).

Juge pedanée (pedaneus), juge sous l’orme. Juge d’un tribunal inférieur, juge de village. — Les sergens, huissiers… notaires, grephiers et juges pedanées. Rabelais, III, 42. — Attendue l’enorme concussion que voyons huy entre ces juges pedanees soubs l’orme. id., IV, 16. — Je voy cette façon de faire estre observée, tant à l’endroit des juges royaux qu’autres juges guestrez et pedanées. E. Pasquier, Recherches, II, 4. — De villages et bourgs les juges pedanées Se font, par fin moyen, riches en peu d’années. Anc. Poés. franç., III, 110. — Le juge pedanee ordonna que le tout seroit mis par devers luy. Guill. Bouchet, 9e Seree (II, 131). — Un juge pedanee… fut bien empesché à la vuidange d’un procés, qui est tel. id., ib. (II, 166). — La meilleure vacation que vous peustes choisir, ce fut de vous faire clerc du greffe de quelques petits juges sous l’orme. Du Vair, Démosthène pour Ctésiphos, p. 504.

Au juge vif et juge mort. L’un des jeux de Gargantua. Rabelais, I, 22.

(Proverbe). De fol juge brieve sentence. — Leroy Midas estant à l’audience En juge fol donna brieve sentence, Et prefera la musete hault quinant De Pan au luc de Phebus doux sonnant. B. Aneau, Imagination poetique, p. 120. — Il faut enquerir devant que juger… Ce proverbe est tout commun, De fol juge, brefve sentence. Calvin, Serm. sur le liv. de Job, 72 (XXXIV, 135). — II les argue de leur temerité, comme on dit en proverbe, De fol juge brefve sentence : car ceux-ci se hastoyent par trop de condamner Job devant que l’avoir ouy. id., ib., 78 (XXXIV, 207). — Ce qui fait juger les hommes follement des œuvres de Dieu, c’est qu’ils se hastent par trop, n’attendans point l’issue pour savoir comme Dieu a prouveu à toutes choses. Et ainsi nous pratiquons tous le proverbe, De fol juge breve sentence. id., ib., 149 (XXXV, 375). — Si je n’aves peur de fascher M. Philalethes, j’allegueres le proverbe commun contre sa sentence. — J’enten bien : vous voulez dire, De fol juge (ou faux juge) breve sentence. H. Estienne, Dial. du lang. franç. ital., II, 276. — Ils ne se sont pas contentez de dire, De fol juge breve sentence : mais pour se faire encore mieux entendre, ont dict aussi, Sage est le juge qui escoute et tard juge. id., Precellence, p. 209. — Il respond donq à ce dernier exemple que, « qui voudroit en un mot se desvelopper de ce passage diroit que tels dialogues sont remplis de recits frivoles. » De fol juge briefve sentence. St François de Sales, Defense de la Croix, III, 10.

Jugesse. Femme qui juge. — Gylon m’en est jugesse droicturiere. G. Colin Bucher, Poesies, 79. — Et touteffois dueil crie qu’on le venge ; Las ! mais tu es jugesse en sa clameur. id., ib., 132.

Femme d’un juge. — N’y venez poinct, beau père, dist la jugesse. Marg. de Nav., Heptam., 46. — Si elle eust esté aussi saige que la jugesse. Ead., ib.