Dictionnaire de la langue française du seizième siècle/Meurtrier

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Meurtrier. (Expressions proverbiales.) Asseuré, résolu comme un meurtrier, asseurance de meurtrier. Ces expressions s’emploient pour marquer une extrême audace, une assurance excessive, une grande impudence. — Là, de tous cas jugent assurément Comme un meurtrier, lequel asseuré ment. Des Périers, Prognost. des prognost. (I, 135). — Voaa donc ks hommes qui seront asseurez comme des meurtriers, jusques à tant que Dieu les ait bien mattez. Calvin, Serm. sur le liv. de Job, 90 (XXXIV, 366). — L’Escriture donc nous monstre que les contempteurs de Dieu sont plus asseurez que meurtriers. Car ils pensent avoir complot avec la mort et appoinctement avec le sepulchre. id., Serm. sur l’Harmonie Evangel., 43 (XLVI, 533). — Dieu voulut qu’il fust prins par un prevost des mareschaux et conduit à Pavie, où, estant interrogé par le juge criminel, asseuré comme un meurtrier, nioit tout. Larivey, trad. des Facetieuses Nuits de Straparole, X, 5. — Toutefois pour demeurer ordinairement sur la besoigne quarré et asseuré en sa boutique comme un meurtrier… entra en tel credit et si haute reputation du commun peuple. Du Fail, Contes d’Eutrapel, 24 (II, 44). — Nostre pere loiolite faict mine de ne s’en estonner poinct : car il est asseuré comme un jesuite meurtrier des rois. Ph. de Marnix, Differ. de la Relig., I, ii, 5. — Il faut faire de la résolue comme un meurtrier, de l’effronté, de l’assurée à boire toute honte. Brantôme, des Dames, part. II (IX, 669). — Je ne entends couraige de brebis. Je diz couraige de loup, asseurance de meurtrier. Rabelais, IV, 23. — Ils cheminent cn asseurance comme des meurtriers, tellement qu’il ne four chaut plus de toute menace. Calvin, Serm. sur le liv. de Job, 86 (XXXIV, 306).

Vois de meurdrier. Voix ferme, assurée. — Comment se pourroit il faire qu’un homme… eust peu telllement se commander à soynesme que de donter le courrous, l’apprehension et la honte, et au lieu de crever et desirer d’estre cent piés sous terre, montrer un visage impudent et une vois de meurdrier entre tant de fautes qui n’eussent pas laissé pour tout cela de lui estre imputees ? Jodelle, Recueil des Inscriptions (I, 271).

Quel meurtrier ! Quel homme résolu ! — Est-ce raison Que j’endure telle bravade, Moy qui pour une canonnade Jamais ne me suis estonné ? — Ha ! quel meurtrier ! Grevin, les Esbahis, V, 1.

Meurtrier (adj.). Placé dans une meurtrière. — Quatre colovrynes murtrieres de fer montees sur chevalots. Texte de 1521 (G.).

(Prononc.). — 1o  Ces sacrileges… qui se vantent d’estre murtriers de Jesus Christ. Calvin, Instit., XII, p. 662. — 2o  Certes plustost un bon pere desire Son filz blessé que meurdrier ou jureur. Marot, Chants divers, 7. — 3o  (-ier formant une seule syllabe). Ainsi le cerf par la plaine elancé Evite l’arc meurtrier qui l’a blessé. Du Bellay, l’Olive, 70. — Douce beauté, meurdriere de ma vie, En lieu d’un cœur tu portes un rocher. Ronsard, Amours de Cassandre (I, 63). — Le volleur, le meurtrier impunis ne demeurent. id., Hymnes, L. I, Hymne de Henry II (IV, 190). — Pour tes beaux yeux je suis en ce tourment, O inhumaine, ô cruelle meurdriere ! Baïf, l’Amour de Francine, L. I (I, 116). — Je beniray la main qui sera ma meurtriere. Desportes, Cleonice, 90. — Ces deux esprits, meurtriers de la France mi-morte. Aubigné, les Tragiques, I (IV, 50).