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Dictionnaire de la langue française du seizième siècle/Renard

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Renard. Ainsi dit le renard des meures, expression proverbiale, comme le renard et les raisins. — Qu’est-il besoing s’amuser à querir Si grandz tresors…? Mais gens de court avec lesquelz demeures Diront que ainsi dit le regnard des meures. Cretin, A Massé de Villebresme, p. 211. — Vous avez la teste assez grosse pour porter une couronne, Mais quoy ! vous dites que n’en voulez point, et qu’elle vous chargeroit trop ? Les meschants Politiques disent qu’ainsi disoit le regnard des meures. Sat. Men., Har. du recteur Roze, p. 151.

Faire le renard. Agir en poltron. — Voyés-vous ceste enseigne ? Si vous ne la gaignés, tant que j’en trouveray devant moy en allant qui vouldront fere le renard, je vous copperay les jarretz. Monluc, l. II (I, 316).

Toussir comme regnard, la toux du renard, express. proverb. — Ces pauvres haires toussissoient comme regnards. Rabelais, II, 28. — Marion, je crois que ma toux Se transportera autre part. — Ma foy, c’est la toux du renard ; C’est le plus beau de tous vos biens. Grevin, Esbahis, I, 2.

Un renard qui rencontre poules esgarees, express. proverb. — Mon huguenaut se print derechef à rire… et tous ceux de la compagnie ne se monstrerent point moins joieux qu’un renard qui rencontre poules esgarees. Marnix, Differens, I, iv, 20. — Incontinent elles commencent à danser, baller, et tressaillir de joye, comme un renard qui rencontre poulles esgarées. II, iv, 20.

Au regnard, cri de moquerie. — Nos soldats crioient à ceux de dehors, Au regnard, au regnard, au regnard : et se disoient mille injures les uns aux autres. Paré, Voyage de Mets (III, 703). — Il se mist à crier contre ceux qui avoient accordé la treufve ; dit que c’estoient des sots et des badins, et que desja on attiltroit les petis enfans pour crier apres eux au regnard. L’Estoile, Mém., 2e part., p. 168 (G., Compl.).

Escorcher le renard, tirer au renard. Vomir, rendre gorge. — Tu escorche le latin, par sainct Jan je te feray escorcher le renard, car je te escorcheray tout vif. Rabelais, II, 6. — Tous ces bonnes gens rendoyent là leurs gorges devant tout le monde, comme s’ilz eussent escorché le regnard. II, 16. — Quand on pense à ceste saulse, il n’y a si bon cœur qui ne tire au regnard, et qui ne l’escorche par faulte de peletier. G. Bouchet, 22e Seree (III, 301). — Quand je pense à vostre medecine, il n’y a si bon cœur qui ne tire au regnard. Cholières, 2e Matinée, p. 77. — Vous hantez tous les jours avec des personnages qui n’oseroient boire un trait, si l’eau ne surmontoit le vin de deux tiers et un quart, autrement il faudroit jouer à la corbette, ou aller in requiem, ou escorcher à faute de peletier le regnard. id., 1re Ap.-disnée, p. 30. — Il en pourroit avoir l’estomach si degousté qu’il viendroit à en escorcher le renard. Marnix, Differens, II, v, 1. — Si on peut passer sur son livre sans avoir mal au cœur et sans ecorcher le renard, on y voit une satyre du coq à l’asne, une charrette mise devant les bœufs. Pasquier, Lettres, XI, 2.

(Jeu de mots). — A l’heure du paroxisme il escorchoit un renard pour antidote et contre-poison. Rabelais, IV, 44.

Au renard, à escorcher le renard, jeux de Gargantua. id., I, 22.

Ecorcher le renard (?). — Il dit assez proprement et parle bon courtisan pour un homme de sa sorte, car au temps qui court chacun veut prendre un peigne et s’en mesler ; chacun veut escorcher le renard. F. d’Amboise, Neapolitaines, Prologue.

(Fém.). Renarde. Quand vous verrez qu’un coq prendra Un renard ou une renarde, C’est signe que Bon Temps viendra De brief. Anc. Poésies, IV, 137. — Pourquoy feray je mention de la regnarde telvesie, beste tant pernicieuse et fascheuse ? Pasquier, tr. Plutarque, p. 14. — Aussi dit-on qu’il n’y a chasse que de vieilles renardes pour chasser et porter à manger à ses petits. Brantôme, Dames, part. II (IX, 351).

Renard (adj.). De renard. — Astuce. Fine, caute, rusee… deceptive, renarde. La Porte, Epith., 86 ro. — Fay que de mes propos le flateur artifice Surprenne dans ses laqs sa renarde malice. Du Bartas, Judith, IV, p. 384. — Il forge en soy une astuce ny millitaire ny renarde, mais du tout diabollique. Brantôme, Dragut (II, 56).

Renard. Sorte de poisson. — Le renard charitable et l’abidoise amie… Se sçavent depestrer du ferré vermisseau. Du Bartas, 1re Sem., 5e J., p. 224.

Pour renard on écrit souvent regnard. — Il n’eschappoit ny lievre ny regnard devant luy. Rabelais, I, 42. — Comme un fangeux pourceau l’un desplaist à mes yeux, Comme d’un fin regnard de l’autre je me garde. Du Bellay, Regrets, 73. — Il y en a d’autres que moy meschans, Je ne suis pas seul regnard par les champs. Amyot, Thémistocle, 21. — Où la peau du lyon ne peut suffire, il y faut coudre un lopin de celle du regnard. Montaigne, I, 5 (I, 30). — Voir d’autres exemples dans les alinéas précédents.