Dictionnaire des antiquités grecques et romaines/ACCLAMATIO

La bibliothèque libre.

◄  ACCESSIO
Index alphabétique — A
ACCRESCENDI JUS  ►
Index par tome


ACCLAMATIO, laudatio, laudes, bona vota, εύφημία, εύλογία, έπαινοζ, έπιβοημα) — Les circonstances dans lesquelles la faveur et la défaveur, l’admiration, la joie, le mécontentement ou tout autre sentiment se traduisait par des acclamations, des applaudissements ou d’autres marques bruyantes d’approbation ou d’improbation, étaient extrêmement nombreuses et variées chez les Grecs et chez les Romains. Nous renvoyons aux articles où se trouve naturellement leur place,


les explications qui se rapportent aux acclamations en usage dans certaines fêtes ou dans les cérémonies des mariages et des funérailles [hymenaeus, nuptiae, funus, et les noms des diverses fêtes] ; les cris qui saluaient les généraux vainqueurs sur le champ de bataille, ou dont les soldats et le peuple accompagnaient les triomphateurs [imperatoh, triumphus]. On trouvera également ailleurs les renseignements nécessaires sur les acclamations adressées aux athlètes, aux vainqueurs des jeux, aux acteurs et à toutes les personnes qui paraissaient sur la scène ou descendaient dans l’arène des cirques et des amphithéâtres [circus, ludi, histrio, theatrum], ou encore aux auteurs qui récitaient leurs compositions en public ou chez les particuliers [recitatio]. Dans cet article spécial, nous ne nous occuperons que des acclamations qui, à Rome, accueillaient au sénat, au théâtre et dans les lieux publics, l’empereur, les membres de sa famille, plus rarement d’autres personnages, et qui finirent par recevoir une organisation régulière.

On ne voit pas que rien de semblable ait existé dans la Grèce tant qu’elle fut libre, ni à Rome avant la fin de la République. L’expression du sentiment populaire vis-à-vis des hommes qui étaient le plus en vue dans les cités grecques fût souvent passionnée, tumultueuse, mais elle resta spontanée. Les délibérations publiques étaient fréquemment troublées par les clameurs de l’assemblée. Les orateurs eurent toujours à compter avec les soudains entraînements de l’auditoire le plus mobile et le plus prompt aux applaudissements comme aux invectives 1[1] ; en toute occasion, les hommes en possession de la faveur du peuple étaient l’objet de démonstrations enthousiastes 2[2] ; mais dans ces mouvements de la foule, on ne reconnaît rien de semblable aux acclamations concertées et disciplinées des Romains sous l’Empire. Dès avant cette époque, celles qui s’adressaient aux hommes publics, lorsqu’ils paraissaient au forum ou au théâtre, n’étaient pas toujours à l’abri du soupçon d’avoir été achetées ou préparées par la brigue. On peut voir par les lettres de Cicéron 3[3] quel prix on attachait à une approbation sans mélange et sans fraude ; mais les félicitations et les vœux publiquement exprimés n’avaient pas encore un caractère officiel, comme au temps où ils furent le privilège à peu près exclusif de l’empereur, de sa famille et de ses favoris.

L’habitude paraît avoir été prise, dès le règne d’Auguste, de se lever quand le prince entrait au théâtre et de le saluer par des applaudissements, par des cris, ou par des chants à sa louange 4[4], et il ne fut plus permis d’adresser les mêmes acclamations à toutes personnes indifféremment, ni même à tous les membres de la famille impériale 5[5]. Les paroles et le rhythme en étaient réglés. Néron perfectionna l’art des acclamations qui s’adressaient à sa personne, ou plutôt il introduisit à Rome un art plus raffiné, depuis longtemps sans doute mis en pratique à la cour des despotes de l’Orient. Charmé de la manière musicale de saluer (modulatis laudationibus) de quelques Alexandrins qui s’étaient trouvés à Naples quand il y avait chanté pour la première fois sur la scène, il en fît venir d’autres de leur patrie ; puis il fit choisir, parmi les chevaliers romains et dans le peuple, plus de cinq mille jeunes On peut voir sur divers monuments les acclamations de la foule ou des soldats en présence de l’empereur indiquées par le geste de tous les assistants qui tiennent un bras levé, par exemple dans les bas-reliefs des colonnes de Trajan[6] et de Marc-Aurèle[7], ou sur des médailles. Ainsi, au revers d’un grand bronze d’Adrien[8], frappé en commémoration de la remise de sommes dues au fisc, on voit un licteur brûlant les registres des dettes et la foule acclamant l’empereur (fig. 37). C’est encore le revers d’un grand bronze du même empereur que représente la figure 38[9]. Adrien est

Fig. 37. Acclamations.

Fig. 38. Acclamations.

debout sur la tribune aux harangues, des citoyens répondent à son allocution par des acclamations. E. Saglio.

  1. ACCLAMATIO. 1 Xen. Hellen. I, 7 ; Demosth. De fals. leg. Op. Dem. 297, 300, 310, éd. Wolf, Francfort, 1604 ; Æschin. ib. p. 408 ; Aristoph. Acharn. 37, 54 et Schol. ad h. l.
  2. 2 Plut. Them. 34 ; Xen. Hellen. I, 4.
  3. 3 Cic. Ad Att. I, 16, 11 ; II, 19, 3 ; XIV, 2 ; id. Pro Sest. 54 sq. ; Plut. Sertor. 5.
  4. 4 Phaedr. V, 7 ; Suet. Aug. 56.
  5. 5 Suet. Aug. 54, 56.
  6. 25
  7. 26
  8. 27
  9. 28